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Basta !
Des bénévoles se mobilisent pour débloquer les dossiers des « naufragés » de la Caf, privés d’aides sociales
Article mis en ligne le 14 mai 2022

RSA suspendu sans explication, dossiers bloqués, impossibilité de parler à un conseiller… Face aux difficultés des allocataires, une association de Mulhouse s’est mobilisée, et a réussi à obliger la Caf à les écouter.

C’est un combat qu’on mène depuis longtemps. Le service public ne va pas. On ferme partout des bureaux, les entrées sont filtrées, il n’y a pas vraiment de réponses à nos demandes. » Isabelle Maurer, 59 ans, est bénévole dans des associations sociales en Alsace depuis 34 ans. Elle-même sans emploi, elle vit avec le RSA et aide d’autres allocataires dans la même situation. (...)

Les choses « ne s’arrangent pas, dit-elle. Aujourd’hui encore, j’ai eu un homme de 57 ans qui a pleuré au téléphone, il a été renvoyé de son usine, il attend une réponse de la Caf depuis trois mois. » En 2016, Isabelle Maurer a subi un contrôle de patrimoine de la Caf, qui a abouti à une suspension de son RSA pendant plus de deux ans, parce qu’un courrier s’était perdu. (...)

« Ils m’ont coupé le RSA pendant 27 mois. J’ai erré pendant ce temps avec mes affaires de toilettes » (...)

Dans sa ville de Mulhouse (Haut-Rhin), Isabelle Maurer a rejoint la Maison de la citoyenneté mondiale, une association membre du Mouvement national des chômeurs et précaires. Avec les autres bénévoles, elle manifeste depuis près d’un an tous les premiers mardis du mois devant la Caf de la ville. Parce que « si nous, les allocataires, on ne se bouge pas, ça ne changera pas. »
« Le système a ses failles, il faut que la Caf le reconnaisse »

« Nos slogans lors des rassemblements, c’est qu’il faut sortir de la honte face à la dégradation du service public. Nous demandons non pas du contrôle, mais une relation avec des agents et un accompagnement aidant et non pas culpabilisant, explique Serge Bertelli, lui aussi actif au sein de l’association mulhousienne. Nous avons à souffrir dans nos propre rangs, chez nos bénévoles, de la répétition de la suppression totale d’allocations. Le système a ses failles, il faut que la Caf le reconnaisse. Elle informe très mal les allocataires, pour ne pas dire pas du tout. Il y a des espaces personnels numérisés, prétendument de dialogue, mais quand vous y posez des questions, vous n’avez aucune réponse. »

À force de mobilisations, l’association de Mulhouse a réussi à obtenir des rendez-vous avec des représentants la Caf. « Nous avons été reçus par l’ancien directeur, précise Isabelle Maurer. Ils nous accueillent parce que c’est le minimum qu’ils sont obligés de faire, mais sortis de là, on a toujours l’impression de seulement les déranger. » (...)

Tout de même, les bénévoles ont pu instaurer le contact, et le conserver, avec des référents, puis une médiatrice. Ce qui permet de poser directement des questions sur des dossiers bloqués (...)

« Mais du coup, seuls les dossiers connus de nous et de nos associations partenaires, actives dans l’hébergement, peuvent bénéficier de cet accompagnement. Les dossiers du public naufragé face à l’administration, et qui n’a pas de contact avec les associations, restent perdus ». (...)

Autre spécificité du département du Haut-Rhin : les allocataires au RSA y sont censés faire des heures de bénévolat. La mesure prise en 2016 avait d’abord été retoquée par le tribunal, avant d’être finalement validée par le Conseil d’État, à condition qu’il s’agisse d’un « contrat personnalisé » entre le département et l’allocataire.

« Quand nous signons notre contrat d’échange réciproque, tous les trois mois, nous devons indiquer les actions engagées pour se réinsérer, rapporte Isabelle Maurer. Parmi elles, il y a marqué “je m’engage à faire du bénévolat”, de sept heures par semaine. Moi, je n’ai pas attendu cela. Si toutes mes heures de bénévolat depuis plus de trente ans avaient été payées, je péterais les compteurs de la retraite. Et si je voulais du travail au noir, j’en aurais aussi eu depuis longtemps. » (...)

C’est nous les bénévoles qui passons des heures à écouter les gens, à remettre leur dossier en place. » Pour elle, « il n’y a que le revenu universel individuel et inconditionnel qui peut nous sauver. »