1/ Une roche aux propriétés fâcheuses
Véritable coffre-fort à radioactivité, le sous-sol de Bure ? Placez-le, placez ce CIGéo dans l’eau et le voilà qui, tel l’Aspro, se délite, intégralement ! Tout comme avait pu le remarquer le géophysicien A.Mourot, sans être écouté.
2/ L’ennemie n°1 débusquée
Quelle importance ? S’il n’y a pas d’eau à Bure, aucune possibilité que le site se trouve ennoyé un jour. Pas d’eau à Bure, l’Andra l’a assuré pendant des années, jusque dans ses docs. Oui mais voilà…
3/ Eau… secours
Le secret de Bure éventé : un coffre-fort factice, soumis aux caprices de dame nature, masses d’eau, site « gruyère », failles, séismes… et comment ne pas trouver les failles indésirables
4/ 2 ou 3 questions troublantes
Contrôle, surveillance, évaluation : crédibilité ? Réversibilité ? Anticiper ou subir ?
1/ Une roche aux propriétés fâcheuses
Cherche roche pour piéger pendant un million d’année la radioactivité des déchets nucléaires. Trouvée, ici à BURE (Champagne/Lorraine), s’était exclamée l’ANDRA (organisme chargé de gérer ces déchets) après une quête à rebondissements lancée dès le début des années 1980. Une roche inespérée, imperméable, dure comme du bêton. Un véritable « coffre-fort » comme la qualifiera l’agence.
Pourtant ! Pourtant M.Guéritte, de l’association La Q.V., vient de démontrer de manière expérimentale et magistrale, sous format vidéo (cf tous les détails en bas de ce message), une propriété des plus fâcheuses pour un coffre-fort. Plongée dans l’eau, la roche prévue pour confiner les déchets radioactifs (argilite) se… désagrège. Rien de moins. Et rapidement. En une poignée de minutes, un fragment d’argilite se délite tel un cachet d’aspirine, intégralement. Le regretté A.Mourot, géophysicien, avait pu faire une constatation similaire, passée quasi inaperçue à l’époque, en plaçant sur un muret extérieur de sa résidence un morceau de la même argilite. Après quelques averses, était disparu le « caillou », transformé en un petit tas de poudre boueuse.
2/ L’ennemie n° 1 débusquée
Contrariant, assurément, mais faut-il pour autant crier au loup ? Car, pour voir le site de stockage partir en javel, à 500 mètres de profondeur, il faudrait que le site se trouve ennoyé, que de l’eau se situe au-dessus, et qu’elle s’infiltre. De l’eau ? Si dès son implantation dans la région de Bure (début 1994), l’agence ANDRA affirmait que l’ennemie n° 1 d’un stockage souterrain de déchets radioactifs c’était l’eau, elle s’empressait d’ajouter que le secteur choisi en était justement exempt. D’ailleurs, quelques années après son arrivée dans la région, début 1999, et juste avant qu’elle ne reçoive le feu vert gouvernemental pour l’implantation d’un labo à Bure (décret du 3.08.1999), l’agence affirmait toujours que « les couches calcaires à traverser ne contiennent pas d’eau » (doc « Au Cœur de la Roche » ci-dessous, sur-lignage en jaune par nos soins).
Pas d’eau dans le sous-sol de Bure, dans les couches supérieures ? Il fallut la ténacité et le « harcèlement » (suivant son témoignage) d’un C.Collin, alors représentant du CEDRA, au sein du CLIS de Bure (Comité local d’information et de suivi) pour que le directeur de l’ANDRA à BURE reconnaisse publiquement et par écrit, en janvier 2002, que « les volumes [d’eau] se chiffrent… en millions de m3 »
3/ Eau… secours
Le secret de Bure étant éventé - mais l’autorisation d’implantation étant obtenue - l’ANDRA ne se gênait plus et lâchait dès décembre 2002, dans un document « Stockage géologique profond : des éléments pour comprendre » :
Voilà donc ce qu’il en est du « coffre-fort géologique » : asservi aux caprices de masses d’eau bien n présentes (aquifères), sinistre épée de Damoclès. Des masses d’eau qui pourraient s’engouffrer et suivre des failles jusqu’au stockage situé en-dessous, car si l’Andra décrit le secteur de Bure comme un « bloc homogène », les études des scientifiques J.Muller/A.Mourot/A.Godinot démontraient au contraire, sur le terrain, combien la région était fracturée, multi-faillée. Et que si le Professeur Lancelot, dans une plénière publique du CLIS, se voulait rassurant en assurant que sur le site les failles étaient « cicatrisées » (selon son expression), il reconnaissait par là-même que failles et microfailles étaient bien réelles. Des failles ou microfissures qui pourraient se rouvrir sous l’effet du vide créée par les centaines de km de galeries et alvéoles d’un stockage (la nature ayant horreur du vide…), couplé à l’effet de séismes réguliers dans les Vosges toutes proches.
Microfailles ? Microfissures ? Non, affirme l’ANDRA qui met en avant une longue et coûteuse campagne de « sismique 3D » qu’elle a récemment menée, à grand renfort de com. L’inconvénient, et le géophysicien A.Mourot l’avait déjà souligné en son temps devant le CLIS, c’est que cette technique ne permet justement pas de déceler les microfissures et les décrochements de quelques mètres d’amplitude. Le géologue J.Cabrera, qui étudie le sujet dans le laboratoire souterrain de Tournemire (Aveyron) enfonce le clou : « La surprise [avec la sismique 3D] c’est que nous n’avons pas vu les failles dans la couche d’argilite, mais seulement celles dans les couches inférieures, où le décrochement était plus grand, d‘environ 15 m. C’est important, car si on ne voit pas les failles par sondage sismique à Bure cela ne veut pas dire qu’il n’y a rien. » Il y aurait bien une autre technique, fiable, mais l’ANDRA ne l’a pas mise en œuvre à Bure. Au fait, pourquoi ?
4/ 2 ou 3 questions troublantes
Contrôle, surveillance, évaluation ?
Devant une commission de Pax Christi France (qui tout prochainement rendra public le compte-rendu), les tenants de l’enfouissement des déchets nucléaires s’étaient plu à lister les organismes chargés d’expertiser, évaluer, surveiller les travaux de l’Andra à Bure. Sous-entendant qu’un tel empilement ne peut qu’être gage de crédibilité, et de confiance à avoir. Vraiment ? Regardons tout d’abord du côté du contrôleur en chef, l’ASN (autorité de surveillance nucléaire) dont le bras technique IRSN (institut de radioprotection et se sûreté nucléaire) affirme à propos de son laboratoire souterrain de Tournemire (Aveyron) : « Du fait de leurs caractéristiques, les argilites de Tournemire présentent des analogies fortes avec les formations argileuses étudiées à Bure (Meuse/Haute-Marne) ». Analogies fortes ? Il suffit de regarder ci-dessous la courte vidéo de M.Guéritte pour s’affranchir : l’argilite de Tournemire tient à l’eau tandis que celle de Bure part rapidement en sucette. Autre organisme de surveillance, la CNE : « Ces informations [sismique 3D] confirment (…) l’absence de failles pouvant traverser le Cox [couche argilites] » (rapport n°6-nov 2012). On a vu ce qu’il en était de la fiabilité de cette technique « sismique 3D ». Et les spécialistes pourraient poursuivre en pointant du doigt le désopilant office parlementaire OPECST, ou encore l’AIEA, etc, Gage de confiance l’empilement des gendarmes de Bure ?
Réversibilité ?
Comment amadouer nombre de réticents à l’idée d’enfouir des poisons nucléaires ? En leur affirmant que le dépôt serait ré-ver-si-ble, que l’on pourra aller rechercher les déchets si problème survenait ou si solution véritable émergeait. Concept séduisant mais qui au fil de ces dernières années ne convainc plus grand monde. Avec, aujourd’hui, cette question nouvelle : quelle « réversibilité » si le site souterrain était soumis à des arrivées d’eau, et donc la roche hôte (argilite) s’effondrant ?
Anticiper ou subir ?
Pour un projet - l’enfouissement - censé faire l’unanimité, que de questions : sur la géologie du site, sur la multiplicité et l’ampleur des risques, sur les enjeux éthiques, sur les risques économiques et l’image de la région…
Ce message « 2 ou 3 questions troublantes » étant adressé aux décideurs (ministère, parlementaires, élus régionaux et départementaux, Clis, médias, associations, populations),
va-t-on anticiper en regardant la réalité en face, ou bien poursuivre vers les ennuis…