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Le Monde
De Dakar à Saint-Louis, une forêt comme rempart contre les assauts de la mer
Cet article fait partie d’un dossier réalisé dans le cadre d’un partenariat avec SOS SAHEL International France.
Article mis en ligne le 20 juin 2020

Reverdir le Sahel (3). Les maraîchers de la côte des Niayes, menacée par l’érosion, bataillent pour préserver la bande de filaos qui fixe les dunes de sable.

Si cette terre de bord de mer est riche, elle est aussi menacée par l’érosion côtière au point que, dans les années 1980, le Sénégalais a dû déménager à plusieurs reprises, chassé par le sable qui ensevelissait les maisons de son village. Pour survivre, Ibrahima Ka s’est mobilisé au sein de l’Union forestière de la commune de Mboro, association créée en 1992 pour préserver la bande protectrice des filaos qui, sur 400 mètres de large, serpente en suivant la zone côtière des Niayes. Résistant, cet arbre tropical est capable de stopper la désertification parce qu’il tolère les sols salés qu’il a même la capacité de régénérer. Mais maintenir la forêt ici, sur les quelque 9 000 hectares classés par l’Etat sénégalais, nécessite un vrai suivi. (...)

« la partie nord a disparu sous les eaux à cause de l’avancée de la mer. Et au sud, c’est l’extension croissante de Dakar qui a grignoté la forêt, se désole Mamadou Ndiaye, coordinateur de l’AUMN. Mais nous ne baissons pas la garde. Et la loi interdit les constructions sur cette zone protégée. »
Diversification de revenus

Selon lui, la sauvegarde de cette forêt essentielle passe par une véritable implication des populations locales. « Ce sont elles qui ont la responsabilité d’entretenir, d’exploiter et de reboiser la forêt de filaos, sous la supervision de la direction des Eaux et forêts du ministère », explique le militant, qui refuse que ce travail passe aux mains d’acteurs économiques privés. Ils « n’auraient pas les mêmes convictions, ni la même implication ou les mêmes intérêts », justifie celui qui regrette que l’Etat n’abonde pas davantage ce projet salvateur pour la production agricole du pays comme pour la préservation du littoral.

Au total, dans le pays, 3 000 hectares de terres ont déjà été restaurés grâce à la plantation de près de 2 millions d’arbres. (...)

Chaque année au mois de mars, les agriculteurs de la région se retrouvent dans les pépinières autour des arbustes qui seront repiqués, cinq à six mois plus tard, à la saison des pluies. Et il en faut de très grandes quantités puisque chaque lot de 2 hectares compte plus de 3 200 pieds. (...)

Mais même bien rodé, ce reboisement se complique au fil des ans, à cause du réchauffement climatique. « Avant, nous pouvions régénérer la forêt sans arroser, grâce aux cuvettes. Mais désormais elles sont sèches, et nous manquons d’eau douce », se désole Mansour Ka, le président de l’Union forestière de Mboro. Alors, pour répondre à ces nouveaux défis, l’ONG sénégalaise SOS Sahel a construit des puits, formé et équipé l’Union forestière pour que les pépinières produisent leur relève de filaos sans lesquels le maraîchage devient impossible et toute l’économie plonge. Mais pour que les familles aient de quoi vivre, de plus en plus, elles doivent s’aventurer dans des cultures nouvelles. (...)
oignons, carottes, papayes, poivrons, mangues, pommes de terre, et même oranges et citrons grâce au forage de 12 mètres creusé pour répondre à la sécheresse. (...)

Grâce à l’exploitation de la forêt de filaos par les groupements villageois, au développement de l’agroforesterie et à la diversification des cultures maraîchères, les rendements ont crû de 15 % en dix ans sur ces terres agricoles devenues plus fertiles. (...)