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Comment Anticor bataille pour retrouver son agrément : « Nous ne sommes pas dissous »
#anticor #lobbys #AssembleeNationale
Article mis en ligne le 29 juillet 2023

Le 23 juin, le tribunal administratif de Paris a décidé de retirer son agrément judiciaire à l’association Anticor, un précieux sésame qui lui permettait de se constituer partie civile dans des dossiers liés à la lutte contre la corruption.

Saisi par deux dissidents de l’ONG, le tribunal administratif de Paris a estimé que l’arrêté comportait une « erreur de droit ».

La perte de cet agrément est un indéniable coup dur pour Anticor, cofondée en 2002 par le magistrat Eric Halphen et Séverine Tessier. Sans celui-ci, il sera très difficile pour l’association de lutte contre la corruption de déclencher de nouvelles poursuites. La décision du tribunal administratif étant rétroactive, la présence de l’ONG pourrait en outre être remise en cause dans les affaires où elle s’était constituée partie civile depuis le 2 avril 2021. Des personnes mises en cause pourraient également déposer des demandes de nullité concernant certains actes de procédure. (...)

A ce jour, Anticor est impliquée dans 159 procédures, selon sa présidente Elise Van Beneden. Parmi elles, les investigations en cours sur l’attribution du Mondial de football au Qatar, l’enquête pour prise illégale d’intérêts visant le secrétaire général de l’Elysée Alexis Kohler ou celle contre le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti devant la Cour de justice de la République – raison pour laquelle le renouvellement avait été signé par Jean Castex et non le ministre de la Justice…

Le 20 juin, trois jours avant de perdre son agrément, l’association avait aussi déposé une plainte contre X soupçonnant des concessionnaires d’autoroutes d’avoir été favorisé par le gouvernement Valls en 2015. Une plainte qui risque de ne pas aboutir du fait de la perte de l’agrément.

Le magistrat Eric Alt, actuel membre du conseil d’administration de l’association dont il fut le vice-président, explique à « l’Obs » :

"« Dans le cas où l’instruction d’une des affaires où nous sommes partie civile est en cours, le tribunal correctionnel peut décider de poursuivre “mollement” l’instruction jusqu’à son terme. Mais dans les cas où nous n’avons pas eu le temps de nous porter partie civile parce que nous en étions au stade de l’enquête préliminaire, et c’est notamment le cas dans l’affaire des autoroutes, c’est au parquet de rendre ses conclusions. »"

Une nouvelle demande d’agrément déposée

Une fois la colère de l’association passée, comment sauver Anticor ? De nombreuses procédures sont en cours, du simple appel au changement complet de la procédure d’agrément. (...)

Cela passe par une procédure d’appel « assez longue », ainsi que par la demande de suspension de la rétroactivité de la décision. « Sur ce deuxième point, la jurisprudence ne nous laisse que peu d’espoir, mais rien n’est vain » (...)

Presque immédiatement après la décision du tribunal administratif, une nouvelle demande d’agrément a été déposée par l’association auprès du cabinet de la Première ministre Elisabeth Borne. La locataire de Matignon dispose de quatre mois pour y répondre. « Tous les éléments sont là pour juger ce dossier rapidement. Le temps qu’il reste est un temps politique, celui de la volonté », estime Eric Alt. (...)

« La légitimité d’Anticor à bénéficier d’un agrément ne fait aucun doute. L’exécutif doit assurer au plus vite [son] renouvellement », avait affirmé dans un communiqué Transparency International, l’une des deux autres associations titulaires d’un agrément anticorruption avec Sherpa, après la décision du tribunal administratif de Paris. (...)

En parallèle, Anticor s’active également pour changer la manière dont l’ONG peut obtenir son agrément, afin qu’elle ne soit plus dépendante du bon vouloir des politiques. Pour Eric Alt, c’est à la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie publique (HATVP) que doit revenir le pouvoir d’instruire les demandes d’agrément (...)

En attendant, Anticor poursuit ses missions et scrute attentivement l’évolution des procédures. « Contrairement à ce que j’ai pu entendre, non, l’association n’est pas dissoute, assure Eric Alt. On continue à travailler sur les dossiers antérieurs à 2021, où nous possédons encore nos prérogatives, et nous étudions la jurisprudence pour ce qui concerne les dossiers postérieurs. Mais nous sommes là, l’association fonctionne très bien. »