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Au Salon de l’agriculture, les paysans sont des rois muets
#agriculture #paysans
Article mis en ligne le 6 mars 2023
dernière modification le 5 mars 2023

Le Salon de l’agriculture n’a pas laissé indemne le maraîcher bio Mathieu Yon. Il s’y joue une « comédie politique », bien loin de la réalité du secteur en crise.

Mon champ n’est pas dans ce Salon. Mon métier n’est pas ici : des casques de réalité virtuelle montrent des vignes et leurs besoins en traitements phytosanitaires, des conférences évoquent sans peine la fin des agriculteurs, et le développement d’une agriculture de sous-traitance. Ici, les paysans sont au centre de toutes les attentions politiques et médiatiques, mais ils sont muets. Ils sont exposés, mais ils se dévoilent finalement assez peu. (...)

entendre le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau annoncer un plan de souveraineté pour les fruits et légumes. Car la filière va mal : 60 % d’importations pour les fruits, 40 % pour les légumes. Nous attendions beaucoup de ce plan à la Confédération paysanne. Nous avions fait deux propositions structurelles au sein d’Interfel [1] : les prix minimums d’entrée et la Sécurité sociale de l’alimentation. Aucune d’elle ne fut citée. Dans la foulée, nous avons donc rédigé un communiqué de presse. (...)

Dans ce lieu, pendant quelques jours, nous étions des rois. Les journalistes réclamaient notre parole, les politiques mendiaient quelques photos avec nous, et les grandes écoles d’hôtellerie nous servaient comme si nous étions issues de la haute bourgeoisie parisienne, nous les « bouseux ». Alors nous buvions des canons, grisés par notre nombre, comme si la France comptait encore des millions de paysans.

Quand les effets de l’alcool retombèrent, je vis à nouveau les allées, le bitume et le béton. Je vis les visages fatigués des paysans et des visiteurs. (...)

Je repenserai à cette terre qui ne nous lâche pas, aux étables et aux villes, aux fermes et aux immeubles, aux paysans et aux passants.

Égarés ensemble dans les trajectoires du progrès, nous avions un commun : quelque chose en nous qui veut vivre.