
EuropaCity enterré, la construction du métro du Grand Paris Express repoussée... Belle victoire pour les opposants à l’urbanisation des terres de Gonesse, qui préparent l’« après » depuis de longs mois : ils défendent le projet alternatif Carma, un « pôle d’excellence, tourné vers l’agriculture, la santé et l’alimentation ».
Lovées entre les aéroports de Roissy-Charles-de-Gaulle et Le Bourget, les terres fertiles du triangle de Gonesse (Val-d’Oise), au nord de Paris, ne seront pas sacrifiées au bénéfice d’un demi-millier de boutiques, de quatre hôtels, d’une piste de ski, d’une salle de spectacle, des cinémas, d’un centre aquatique et d’un palais des congrès. C’était pourtant le dessein des promoteurs d’EuropaCity, le groupe Auchan et le conglomérat chinois Wanda, qui souhaitaient attirer près de 30 millions de visiteurs par an. La ténacité de leurs opposants, prêts à s’opposer physiquement à l’avancée des machines, a eu raison de ce projet gargantuesque.
Les opposants à l’urbanisation des terres de Gonesse ont gagné un an de sursis (...)
Durant ce laps de temps, ils espèrent convaincre le gouvernement de préserver la vocation agricole des 670 hectares du Triangle. Ils sont aujourd’hui cultivés par une dizaine d’exploitants, principalement en grandes cultures de colza, d’orge, de blé ou de maïs. « Leurs récoltes ne profitent pas aux habitants du territoire, elles alimentent les marchés mondiaux », regrette Bernard Loup, pour qui « la demande pour une alimentation de proximité n’a jamais été aussi grande ».
« Depuis le 31 décembre 2012, toutes les cantines doivent proposer 20 % de produits bio. C’est obligatoire mais que font les chefs d’établissement, depuis cette date ? Ils reportent l’objectif tous les ans », a regretté Jean-Yves Souben, élu écologiste au Blanc-Mesnil et ancien proviseur d’un lycée d’Aulnay-Sous-Bois, le plus proche des terres agricoles, lors d’une soirée sur l’avenir de la Plaine de France organisée à Villiers-le-Bel. La loi sur l’alimentation (Egalim) prévoit que 50 % des produits dans la restauration collective, notamment dans les cantines scolaires, devront être bio et labellisés d’ici à 2022. « Nous avons un besoin vital des terres du triangle de Gonesse pour nous en approcher », a insisté l’élu.
Ces derniers années, le groupement Carma (Coopération pour une ambition rurale, métropolitaine et agricole) a conçu un projet, alternatif à EuropaCity, allant dans ce sens (...)
Les exemples à suivre ? « La Ceinture aliment-terre liégeoise, Montréal, Milan, Barcelone... » énumère-t-il, des villes « qui ont compris la nécessité de protéger leurs terres agricoles ». (...)
Sur les 670 hectares du triangle, Carma prévoit de développer l’agriculture vivrière, destinée à renforcer l’autonomie alimentaire de la Plaine de France voire au-delà, jusqu’à Paris, en fonction des quantités produites. Le tout en encourageant une diversité « des productions maraîchères », « des cultures céréalières » et « l’introduction des nouvelles méthodes de l’agroécologie et de l’agroforesterie » a expliqué Anne Gellé, administratrice Terre de Liens Île-de-France. Une « ferme expérimentale » servirait de modèle pour la transition des exploitations agricoles qui l’entourent. La filière horticole régionale pourrait être relancée, ainsi que des cultures de plantes utiles en éco-construction.
Le projet se veut inclusif envers « les agriculteurs actuels » et l’équipe de Carma se dit prête « à discuter avec les propriétaires des terres ». (...)
« Carma va élargir les filières de métiers, impliquer l’ensemble du territoire » (...)
avec des ateliers de conditionnement et de transformation des produits récoltés ; de la vente directe via les AMAP, les commerces indépendants et le réseau Biocoop ; et un pôle de valorisation des déchets organiques. Robert Spizzichino aimerait aussi développer l’« enseignement supérieur et professionnel » avec « un campus des métiers de la transition écologique et un pôle de recherche sur l’agroécologie et la santé alimentaire ». Le projet Carma serait financé par un mix de financement participatif, de mécénat et de subventions. (...)