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SOS Mediterranée
[3 QUESTIONS À] Alexandre, infirmier à bord de l’Ocean Viking
Article mis en ligne le 7 septembre 2022

« Avec les vagues de chaleur intense en Europe et en mer Méditerranée cet été, on est confrontés à beaucoup de cas de déshydratation. »

Alors que la température atteint les 30 °C au port de Syracuse, Alexandre nous explique comment sont gérés les nombreux cas de déshydratation durant l’été. Un problème qui peut s’avérer mortel en mer, particulièrement lors de vagues de chaleur intense.

1. Quels sont les risques spécifiques à la saison estivale encourus par les personnes en détresse en mer ?

Toute l’année, vous avez des personnes qui essaient de traverser la Méditerranée. L’été, on assiste à une augmentation de ces tentatives du fait que la mer peut sembler plus clémente. Mais les changements de météo sont fréquents et parfois radicaux. Ils peuvent rendre les traversées plus difficiles qu’elles n’en ont l’air.

Sachant que les gens partent souvent avec très peu, voire pas du tout d’eau dans leur embarcation, ils se retrouvent parfois à boire de l’eau de mer. Cela va causer ce que l’on appelle une « hypernatrémie » [taux élevé de sodium dans le sang], aggravant ainsi leur déshydratation.

Les personnes secourues étant déjà particulièrement vulnérables, notamment du fait de violences et d’abus subis en Libye ou durant leur parcours migratoire, nos équipes médicales font parfois face à des personnes qui peuvent être extrêmement déshydratées. (...)

2. Comment l’équipe de l’Ocean Viking gère-t-elle ces cas de déshydratation ?

D’abord en anticipant. En été, on essaie de protéger au maximum le pont arrière, où se trouvent les rescapé.e.s. On y installe des bâches pour faire de l’ombre. Nous prévoyons également des stocks plus conséquents d’eau et de solution de réhydratation orale. (...)

Depuis plusieurs années, on expérimente des blocages particulièrement longs en mer – parfois plus d’une dizaine de jours d’attente avant qu’un port ne nous soit attribué pour débarquer les personnes rescapées. Cette période est particulièrement critique pour nous et pour les personnes que nous secourons. Les membres d’équipage se relaient 24 heures sur 24 pour prendre soin des personnes rescapées qui sont déjà extrêmement affaiblies, La chaleur est intense sur le pont d’un navire. On se prépare à cela mais malheureusement, plus le temps d’attente est long, plus le risque est élevé. (...)

3. Est-ce que vous avez eu des cas particulièrement difficiles ?

L’été dernier, nous avons été confrontés à une série de sauvetages assez compliqués, jusqu’à six en moins de 48 heures. L’un de ces sauvetages a été particulièrement marquant en matière de déshydratation pour nous. (...)

[Lorsque nous sommes arrivés], les rescapé.e.s n’avaient plus d’eau du tout. On s’est retrouvés avec six personnes inconscientes à brancarder. Certaines d’entre elles ont dû être réhydratées par intraveineuse.

Malheureusement, avec ces vagues de chaleur intense, on peut s’attendre à davantage de situations de ce genre à l’avenir.