 
	Elle est l’une des rares femmes à être connue du grand public comme figure du mouvement des droits civiques, au même titre que Martin Luther King ou Malcolm X. Une vie que raconte l’historienne Caroline Rolland-Diamond dans un ouvrage très fouillé publié chez Gallimard.
Rosa Parks est décédée il y a vingt ans, le 24 octobre 2005. Il y a soixante-dix ans, en décembre 1955, elle a 42 ans et commet le geste qui fera d’elle une « icône de la liberté », la « mère », ou encore « la pionnière » du mouvement contre la ségrégation raciale aux États-Unis. Pourtant, cet acte audacieux de résistance n’est pas venu de nulle part.
C’est ce que s’emploie à démontrer l’historienne spécialiste de l’histoire des mobilisations sociales et politiques des États-Unis Caroline Rolland-Diamond. En librairie ce 23 octobre, son ouvrage publié chez Gallimard révèle des pans méconnus de la vie de la militante et de ses combats.
Peu connaissent l’histoire de Rosa Parks au-delà de son refus de céder sa place à un Blanc dans un bus. Pourquoi avez-vous estimé essentiel de travailler à une biographie aussi fouillée et précise depuis sa naissance jusqu’à sa mort ? (...)
Le livre permet de se replonger dans la dure réalité de l’Amérique de la ségrégation puis, après la victoire du boycott des transports par les Noirs, de suivre son action dans le contexte très différent de la ville de Detroit, symbole de la grande migration des Noirs du Sud des États-Unis vers le Nord, où elle passera la majeure partie de sa vie.
Que recherchent ceux qui perpétuent cette seule image de la douce et respectable couturière fatiguée qui, un jour, a bravé la ségrégation raciale ?
La mémoire collective s’attache à des récits simples et aime les symboles. L’image de la petite couturière fatiguée incarne une forme de dignité non violente, modérée, qui permet d’effacer le radicalisme de ses positions. Si Rosa Parks a toujours cru en l’idéal d’une société mixte où Noirs et Blancs seraient traités en égaux, elle avait aussi une analyse de classe et une conscience de la prégnance d’un racisme structurel qui la rapprochent du Black Power.
Toute sa vie, elle est restée proche des cercles de militants noirs plus radicaux. Mais dans un contexte où le Black Power est encore souvent décrié pour la « violence » de ses positions et où les inégalités du capitalisme américain sont rarement dénoncées, il n’est pas étonnant que l’on préfère mettre en avant la douceur de Rosa Parks. (...)
De la même manière, Martin Luther King est seulement vu comme le militant chrétien non violent de l’égalité raciale alors qu’il a toujours accordé une grande importance à la question de la justice économique et que, dans les dernières années de sa vie, ses critiques contre la guerre du Vietnam ou la persistance de la pauvreté étaient très radicales. (...)
Mémoire collective et historiographie ont longtemps construit une relation d’opposition binaire entre le mouvement non violent des droits civiques et le Black Power.
Mais depuis vingt-cinq ans, les historiens ont montré combien l’approche non violente de King et les formes plus militantes de résistance défendues par Malcolm X n’étaient pas opposées, mais au contraire liées, dans une même histoire de lutte pour l’égalité et la justice.
