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Dans une société en proie à la montée de l’extrême droite et aux inégalités économiques, pourquoi ne pas s’en prendre aux chômeurs ? La réforme du revenu de solidarité active (RSA) impose ainsi, entre autres, une durée hebdomadaire d’activité « d’au moins quinze heures » pour les bénéficiaires. Pour les artistes auteurs, le ministère de la Culture confirme qu’un aménagement des modalités d’application reste au programme.
Prévue par la loi « pour le plein emploi » adoptée en novembre 2023, la réforme du revenu de solidarité active (RSA) inclut notamment une durée hebdomadaire d’activité « d’au moins quinze heures » pour ses bénéficiaires. Qualifiées de moyen « favorisant [l’]insertion sociale ou professionnelle » par le gouvernement, ces heures ne peuvent pas « être du travail bénévole réalisé en dehors du cadre du Code du travail », précise la Direction de l’information légale et administrative. (...)
Le non-respect de cette obligation peut entrainer la suspension du versement du RSA, en tout ou partie et pour une durée fixée par le président du conseil départemental. Rappelons qu’aujourd’hui, le montant forfaitaire du RSA, pour une personne seule sans personne à charge, s’élève à 635,71 € par mois. (...)
La réforme et en particulier l’obligation des 15 à 20 heures d’activité ont été largement critiquées, perçues comme des attaques envers les plus démunis. La Commission nationale consultative des droits de l’Homme, dans une déclaration adoptée le 19 décembre 2024, y voit même une atteinte aux droits humains. (...)
L’inquiétude des artistes auteurs
Le 19 mars 2024, la ministre de la Culture Rachida Dati, à l’occasion de sa première audition par la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale, avait été interrogée sur le sujet. Les artistes auteurs voyaient en effet d’un mauvais œil cette réforme du RSA et l’obligation des 15 à 20h d’activité qui l’accompagnait.
Plusieurs organisations pointaient ainsi l’incompatibilité de cette charge avec les conditions d’exercice du métier, particulièrement précaire, qui nécessite par ailleurs de longues heures de création. Rappelons que cette période n’est pas rémunérée autrement que par un à-valoir, lorsque l’éditeur en verse un. Cet à-valoir correspond à une somme calculée par l’éditeur, sur laquelle l’auteur n’a généralement qu’une faible marge de négociation, qui représente une avance sur les droits d’auteur touchés sur les ventes du livre.
Autrement dit, déjà sous l’eau financièrement, les artistes auteurs n’avaient guère besoin d’un poids supplémentaire sur les épaules. Devant les députés, donc, Rachida Dati avait indiqué qu’elle et ses services étaient « en train de travailler à l’aménagement » de ce RSA, pour qu’il prenne « en compte la spécificité de l’activité des artistes auteurs ». (...)
Presque une année plus tard, et tandis que la réforme du RSA est entrée en vigueur le 1er janvier 2025, plusieurs organisations d’artistes auteurs s’alarmaient de ne pas voir cet aménagement mis en place. « Créer nécessite du temps », rappelait ainsi une coalition d’organisations du secteur, dans une tribune.
Contacté, le ministère de la Culture nous confirme que les artistes auteurs « sont concernés par la réforme du RSA qui prévoit notamment l’inscription des allocataires à France travail et la mise en œuvre d’au moins 15 heures d’activités hebdomadaires à compter du 1er janvier 2025 ».
Toutefois, il ajoute que des travaux « ont été menés par le ministère de la Culture, en collaboration avec le ministère du Travail et avec France travail, afin d’adapter la réforme aux spécificités des artistes auteurs », conformément à l’annonce faite par Rachida Dati en mars 2024. « Ce dispositif adapté aux artistes auteurs doit leur permettre de bénéficier d’un accompagnement mené par des professionnels qui connaissent leurs secteurs, que cela soit à France Travail ou à l’AFDAS », précise la rue de Valois.
Une réunion de présentation de ce projet de dispositif auprès des organisations professionnelles représentatives est prévue le 6 février prochain, dans la lignée des réunions de concertation et de travail effectuées avec les organisations d’auteurs en 2024. (...)