
La montée en puissance de l’extrême droite dans de nombreux pays européen pourrait compromettre la solidarité prônée par le nouveau pacte sur la migration et l’asile de l’Union européenne.
Il y a à six mois à peine, l’Union européenne (UE) a approuvé une réforme de sa politique d’asile, l’aboutissement de dix années de difficiles négociations lancées après l’arrivée en 2015 et 2016 en Europe de plus d’un million de migrants, notamment des personnes fuyant la Syrie et l’Afghanistan.
Dans le pacte européen sur la migration et l’asile, les 27 se sont mis d’accord pour répartir plus équitablement les coûts liés à l’accueil des demandeurs d’asile au sein de l’UE, mais aussi à renforcer la protection des frontières extérieures pour empêcher les arrivées.
Aujourd’hui, alors que des formations d’extrême droite exercent une influence toujours plus grande dans de nombreux pays européens, qu’ils soient au pouvoir ou dans l’opposition, ce pacte semble plus fragile que jamais.
Ras de marée électoral (...)
Ces dernières semaines, une série de pays qui avaient joué un rôle déterminant dans l’adoption du paquet de réformes, dont l’entrée en vigueur est prévue pour 2026, ont annoncé un durcissement de leurs politiques en matière d’asile.
En France, ou le Rassemblement national a gagné aux dernières élections davantage de sièges aux élections, le nouveau gouvernement de droite a annoncé des plans visant à renforcer les frontières du pays. En Allemagne, sous la pression des récents succès électoraux du parti d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne (AfD), le gouvernement de coalition de centre-gauche a mis en place des contrôles à toutes les frontières du pays dans le but affiché de mieux maitriser l’immigration et de potentielles menaces terroristes. (...)
Aux Pays-Bas, l’extrême-droite a remporté les dernières élections législatives. Issue du parti PVV, la ministre chargée de l’asile, Marjolein Faber, prône la mise en place de la "politique migratoire la plus stricte qui soit".
Elle a déclaré à la Commission européenne qu’elle chercherait à soustraire les Pays-Bas à l’ensemble des règles européennes juridiquement contraignantes.
Quelques jours plus tard, Budapest a annoncé des ambitions similaires, suscitant la crainte d’un effet domino.
Pour donner toutes les latitudes aux Etats membres, il faudrait toutefois renégocier les traités de l’UE, ce qui n’est pas à l’ordre du jour.
Il est théoriquement possible d’obtenir des dérogations à la législation européenne pour certaines politiques (le Danemark en a une pour sa politique migratoire), mais il faut l’accord des autres États. (...)
Les gouvernements en Europe sont de plus en plus tentés d’afficher de la fermeté en matière d’immigration. De nombreux politiques craignent d’être accusés par l’opinion publique de se plier aux lois européennes et de vouloir accueillir davantage de demandeurs d’asile.
Le nouveau système de répartition des réfugiés compromis
Pendant les deux prochaines années, chaque Etat membre devra transcrire le nouveau pacte européen sur l’asile dans sa législation nationale. En vertu des nouvelles règles, le cas d’un demandeur d’asile doit être examiné de manière plus approfondie dans les sept jours suivant son arrivée dans l’UE. Elles permettent également de retenir certains demandeurs aux frontières extérieures et d’évaluer leur dossier dans le cadre d’une procédure accélérée. Cette procédure est destinée à augmenter le rythme des expulsions des demandeurs déboutés.
Mais pour les leaders d’extrême droite, comme le Premier ministre hongrois Viktor Orban, la partie la plus controversée de la réforme est le mécanisme qui oblige tous les États membres de l’UE à accueillir des demandeurs d’asile provenant d’autres pays membres, afin de répartir les nouveaux arrivants de manière plus équitable.
En vertu des règles de l’UE, les demandes d’asile doivent généralement être déposées dans le pays d’arrivée. Ce système appelé règlement de Dublin est considéré comme injuste par les pays au sud de l’Europe, comme l’Italie et la Grèce. (...)
Les États qui refusent ces relocalisations, dont des milliers devraient avoir lieu chaque année, devront payer une contribution financière de 600 millions d’euros par an ou offrir un soutien logistique à la place. (...)
A la fin, étant le fruit d’un compromis, aucun Etat est totalement satisfait par le pacte européen sur la migration et l’asile.
Pour les défenseurs des droits de l’Homme, la réforme n’empêchera pas les naufrages en mer Méditerranée et risque surtout de porter atteinte au droit de demander une protection internationale.
Selon Alberto-Horst Neidhardt, "si le pacte devait échouer, cela signifierait la fin du système d’asile européen commun. Et ce n’est dans l’intérêt d’aucun des États membres, qu’il s’agisse de l’Allemagne, des Pays-Bas ou d’autres pays". (...)
Depuis des années, l’UE consacre davantage de moyens à la protection des frontières et dédie des fonds aux pays d’origine pour tenter d’empêcher les départs, (...)