Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
splann/Enquête
En l’absence de contrôle, des méthaniseurs grossissent et menacent l’environnement.
#Bretagne #metahaniseurs #biodiversite #urgenceclimatique
Article mis en ligne le 15 décembre 2024
dernière modification le 13 décembre 2024

En théorie, tout est sous contrôle. En théorie, quand une installation comporte un risque important, la réglementation se durcit et les inspections se multiplient pour éviter tout dommage sur la santé humaine, animale, la faune, la flore. En réalité, les méthaniseurs bretons cumulent les dérogations. Les inspections sont rares. Il est donc simple pour les exploitants de créer leur unité sans crainte de sanction, malgré les risques en termes de pollution des cours d’eau, d’intoxication, voire même d’explosion.

  • Les méthaniseurs ne sont quasiment pas contrôlés malgré des pollutions majeures et répétées.
  • Parmi les rares unités de méthanisation inspectées en 2020 en Bretagne, 85 % n’avaient pas installé les moyens nécessaires pour limiter les risques d’accidents et de pollutions.
  • Un méthaniseur sur trois s’agrandit dans les cinq années qui suivent sa construction, selon la stratégie du fait accompli.

(...) Sans filet de sécurité, les accidents sont légion

Pourtant, la méthanisation est une technologie récente, fragile, qui mérite d’être surveillée. Le service de suivi des risques industriels du ministère de la Transition écologique a publié, en septembre 2021, une synthèse des accidents dans la filière. Il en recense 130 en France, entre 1996 et 2020. Dans 77 % des cas, il y a un rejet de matières dangereuses ou polluantes. « C’est le phénomène majoritaire, suivi par l’incendie », précise l’autrice du rapport, Aurélie Baraër. La faute aux « lacunes dans la gestion du risque et dans la formation des opérateurs ». Elle estime qu’un défaut de matériel est la cause principale de ces incidents. (...)

Sur cinq pollutions du méthaniseur d’Arzal, une seule est comptabilisée dans le recensement ministériel. Le conseil scientifique national sur la méthanisation, le CSNM, qui réunit des scientifiques réservés sur cette technologie telle qu’elle se pratique aujourd’hui, tient ses propres comptes. Il évalue à 315 le nombre d’incidents en France. Presque trois fois plus que les services de l’État, sur la même période.
Pas de mesure sanitaire préventive

Les conséquences de ces incidents sont essentiellement environnementales et touchent en premier lieu les cours d’eau. Cours d’eau par ailleurs pompés pour alimenter la population. À cela s’ajoutent des conséquences sanitaires car le digestat, produit issu de la méthanisation, est épandu comme engrais sur les sols et peut être vecteur de maladies (lire : « Les méthaniseurs, clusters potentiels des maladies de demain »).

Pour éviter ces risques, la réglementation pose des garde-fous. (...)

, la réglementation peut imposer de traiter ces déchets à 70 °C pendant une heure pour éliminer les pathogènes. Mais ce n’est pas obligatoire si le volume global de déchets, animaux et végétaux, est inférieur à 30 000 tonnes par an. Cette dérogation concerne la quasi-totalité des méthaniseurs bretons. Ça tombe bien car ce passage à 70 °C coûte très cher, au point de compromettre la rentabilité d’une installation.

Des méthaniseurs qui doublent de volume (...)

Un tiers des méthaniseurs augmente donc leur capacité en cours de route. Une décision qui ne peut s’improviser en raison des investissements nécessaires. Les augmentations de capacité interviennent ainsi rapidement après la mise en activité. Difficile d’imaginer que nombre d’entre elles ne soient pas étudiées dès le montage du projet.

Si le régime de la déclaration séduit autant c’est aussi parce que « les ICPE [concernées] ne sont pas soumises à contrôles périodiques et n’ont lieu d’être contrôlées qu’en cas de plainte ou de signalement ou lors de campagnes « coup de poing » », observe la Cour des comptes dans son rapport de novembre 2021. Pas de signalement, pas de contrôle.

85 % des installations contrôlées ne sont pas dans les clous (...)

Depuis près de dix ans, la réglementation qui encadre ces installations présentant des risques pour l’environnement ne cesse de s’assouplir. Avec son « choc de simplification », François Hollande avait commencé à la détricoter, en 2013. Depuis, d’autres garde-fous ont été supprimés, comme en 2018, sous le premier quinquennat d’Emmanuel Macron. Modifier des seuils qui font passer une installation du régime le plus contraignant à un régime intermédiaire, miser sur la confiance et l’auto-contrôle des porteurs de projet, renvoyer les contrôles à des services de l’État de plus en plus dépeuplés… Gouvernement et législateurs, bien conseillés, savent quels curseurs bouger. D’autant qu’ils savent que sans contrôleur, pas de contrôlé.

Dans son rapport de 2021, la Cour des comptes démontre cette absence de contrôle, d’auto-contrôle ou même de sérieux dans le suivi des sites de méthanisation. (...)

À quoi bon se contraindre à respecter la loi si elle n’est pas appliquée, et que personne ne vient sanctionner ? Les directions départementales de la protection des populations (DDPP), rattachées aux préfets, confirment ce constat. (...)

Dans 85 % des cas, les aménagements prévus dès le début du projet n’ont pas été réalisés. Il s’agit de cuves de rétention évitant des déversements accidentels dans le milieu naturel, de systèmes d’évacuation d’eaux pluviales, de clôture, d’alerte incendie. Autant de promesses d’aménagements non tenues.
L’État, laxiste

Les méthaniseurs ne sont pas tous très scrupuleux. Les services de contrôle de l’État, pas au rendez-vous. L’État lui-même ne montre pas beaucoup de zèle pour faire appliquer certaines directives européennes prises pour protéger l’environnement. (...)

Dit sans élément de langage, on développe la filière, mais pour une partie des incidences environnementales, on verra plus tard (...)