Technologie : Difficile de dire quand frappera la vague, mais elle sera forte : bien au delà de l’industrie la robotique va révolutionner le marché de l’emploi. Points de vue d’experts, entre métiers à risque, rôle des plates-formes d’intermédiation et, oui, revenu universel.
"L’impact des technologies est prévisible sur le travail, l’ampleur du phénomène est très clair". Yves Caseau, le CDO d’AXA, n’a qu’un doute : à quelle échéance le tsunami de l’automatisation va t-il frapper, remodelant d’un coup le monde du travail humain.
Invité à s’exprimer lors de la conférence "Travail 4.0 ou la révolution numérique de l’emploi" organisée le mois dernier par l’institut G9+, il se veut néanmoins optimiste. "Le point de chute est enthousiasmant d’un point de vue humaniste" assure t-il, "mais la transition peut être inquiétante". Dans cette perspective, "le rôle des politiques est fondamental" dit-il. "Sans régulation, on pourrait aller vers le pire".
L’un des premiers rapport sur la question, le rapport Frey / Osborne publié en 2013, mentionnait que 47% des emplois étaient menacés à terme. Ont suivi quantité de documents d’étude, dont celui de l’OCDE en 2016, avançant 9% de perte d’emploi seulement. Et les spéculations continuent. Un récent rapport signé Forrester Research mentionne que si les robots seraient à même de voler 24,7 millions de jobs au marché du travail américain d’ici 2027 (soit 17% des emplois), ils pourraient dans le même temps en créer près de 15 millions.
"Dans un monde de robot il faut redoubler d’attention pour l’humain" (...)
L’incertitude quant à la date de la lame de fond tient aussi à la difficulté rencontrée par les industriels à réussir des projets où l’homme est remplacé par la machine. "En 2012 j’ai visité une usine Sharp de deux kilomètres carrés à Tokyo. Il y avait seulement 20 employés et on avait l’impression de ne jamais croiser personne" dit Yves Caseau. "D’un autre côté, au delà des annonces, Foxconn n’a pas spécialement réussi à remplacer les opérateurs humains sur les chaînes de montages de smartphones". En 2012 le prestataire d’Apple et autre Samsung avait annoncé vouloir supprimer 100.000 emplois par des robots.
"L’automatisation commence avec les emplois experts"
Reste que la tendance est structurellement à la baisse d’emploi. "Avant, en tant qu’infogéreur nous reprenions les postes de nos clients. Aujourd’hui c’est terminé" dit Patrick Nicolet, DGA de CapGemini. Surtout qu’au delà de la diminution des coûts, la fiabilité des machines fait pâlir n’importe quel employé. "Dans la gestion des sinistres dans le secteur des assurance on arrive à 95% de gains de productivité" avec l’automatisation assure le DGA de CapGemini.
Et contrairement aux idées reçues, "l’automatisation commence avec les emplois experts" assure Yves Caseau, confirmant les déboires des banquiers de Goldman Sachs depuis 10 ans. Ailleurs, la détection de tumeur, loin des yeux des médecins désormais, est le travail de programmes spécialisés de type IBM Watson qui proposent un diagnostic semble t-il plus affûté. Pour l’heure toutefois, ce sont moins des emplois qui disparaissent que des environnements de travail qui évoluent assure le CDO d’AXA. On trouve toujours de la main d’œuvre dans les entrepôts logistiques d’Amazon, mais les employés sont assistés par des algorithmes qui optimisent la manière dont ils font les colis.
L’évolution de l’environnement de travail plus que la suppression des emplois, c’est l’orientation à laquelle veulent croire de nombreuses entreprises, qui évoquent "l’augmentation de l’humain". Une transition qui devrait surtout profiter selon Yves Caseau à ce qu’il nomme "les métiers de la relation et de l’interaction" via une forme "d’artisanat de masse".
A quoi ressemblera le jardinier du futur ? (...)