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A propos de la Conférence « GHT (Groupement Hospitalier de Territoire), Quelle hospitalité pour la psychiatrie publique et privée ?
Article mis en ligne le 30 mai 2017

"Santé mentale, travail, logement, citoyenneté : il s’agit de garantir, de retrouver une spécificité de la psychiatrie dans un paysage sanitaire qui se voudrait unifié.
c’est une mosaïque dont nous ne sommes pas sûrs que les pièces s’assemblent.
Quid de la psychiatrie privée ?" (...)

Conférence organisée par Rénovation et l’Agence Régionale de Santé (ARS) Jeudi 30 mars à Bordeaux

( compte-rendu de la conférence à télécharger en fin d’article)

GHT… « je n’ai pas acheté »…. dira Maître Laurent Houdart !

Pourtant, ce que les politiques publiques veulent initier, avec les Groupements Hospitaliers de Territoires, ne peut que rencontrer notre adhésion et fait l’unanimité lors de cette conférence :

il s’agit de mettre au centre des dispositifs le parcours de l’usager. Un parcours sans ruptures, sans discontinuités dommageables. Un parcours qui ne crée pas d’inégalités selon les territoires. Et pour cela, travailler en réseaux, à partir d’un Centre Hospitalier garant, loin de l’hospitalo-centrisme, de l’unité dans la multiplicité d’interventions.

De plus et surtout, il est question de prendre en compte non seulement un malade psychique et ses symptômes, mais aussi tout ce qui constitue la vie d’une personne : sa santé physique, son milieu social, son insertion professionnelle notamment.

jusqu’ici tout va bien…

Mais, pour J. Prémon, Président de Rénovation, « c’est une mosaïque dont nous ne sommes pas sûrs que les pièces s’assemblent » ...

là où les choses commencent à se gâter c’est quand les grosses machines se mettent en place (100 centres hospitaliers publics au lieu de 1000). Il s’agit, précise Maître Laurent Houdart, d’une délégation de compétences à un établissement support : c’est un « mécanisme de groupe, de mère et de filiales ». l’inévitable bureaucratie impliquée vient précéder – pour ne pas dire écraser – les informations complexes et hétérogènes remontant du terrain. On pourrait se demander comment il se fait que beaucoup de professionnels innovent, créent remarquablement mais en faisant le moins possible de vagues ?

Pourquoi la créativité de ceux du terrain et la créativité de ceux qui élaborent les politiques publiques ne se renforcent-elles pas mutuellement ? « Aujourd’hui le risque c’est le risque technocratique » avertit Maître Laurent Houdart. Serait-ce l’effet de nos bien français « mille feuilles administratifs, avec une multiplicité de décideurs » ? qu’il faudrait structurer autrement, selon le Pr. Bouvard. Ici, remarque M. Laforcade, directeur de l’ARS-Nouvelle Aquitaine, « les pouvoirs sont très balkanisés et nous perdons beaucoup de temps. »

Pour prendre des décisions pertinentes, les « décideurs » ont besoin de données précisément, largement – et informatiquement – collectées auprès des professionnels de la base. Cela se traduit au quotidien par un temps conséquent de saisies, de remplissage de formulaires, de confrontation de la pratique à des items venus d’ailleurs. On ne peut pas vraiment dire que la créativité des acteurs soit sollicitée dans ces temps-là. Et leur temps pour l’exercer en est diminué d’autant, ce qui est tout de même regrettable. S’il leur fallait en plus élaborer des stratégies pour faire « remonter » ce qui émane du terrain qualitativement et hors cases, quand feraient-ils leur vrai boulot ?

Et puis il y a l’argent, le nerf d’une guerre entre public et privé… soit un décalage entre patients qui patientent (longtemps) sur une liste d’attente d’établissement public, et ceux qui peuvent s’offrir plus de diligence dans un établissement privé. Le nombre de « lits » disponibles n’est pas vraiment le même quand la politique de réduction des dépenses et des effectifs n’a pas disparu de l’ordre du jour malgré les louables projets. Et la qualité des soins et de l’accompagnement n’est pas insensible à l’injonction de rentabilité. Que devient le Sujet quand « de plus en plus c’est l’apartheid entre les cliniques et l’HP » ? Pour Maître Laurent Houdart « Dans le public comme dans le privé prévaut une logique de performance, d’économies. GHT , moi je n’ai pas acheté… c’est plutôt une hospitalité aux rigueurs budgétaires ! »

La promotion des bonnes pratiques et de la bientraitance émane des mêmes sources qui rationnent les budgets. « Concrètement on ne nous parle plus que de « combien », mais pas de « comment » vous recevez » avertit Maître Laurent Houdart. « La maltraitance au quotidien est masquée par les évaluations où les indicateurs ne sont pas le reflet des questions qu’on se pose. »
Une directive officielle a dû rappeler qu’il est inadmissible d’utiliser la contention de malades pour pallier à l’insuffisance du personnel… on n’est pas loin de l’injonction paradoxale et il y a à craindre pour la santé mentale des professionnels si les choses continuent dans cette voie.

C’est à la recherche des marges de liberté et des chemins de traverse que localement, chacun depuis sa place, exerce sa créativité.

Le Pr. Bouvard ouvre une voie : « Comment arriver à ce que des recommandations au niveau national puissent trouver leur relève dans les groupements, de manière à fournir un service utile ? ».

Pour M. Laforcade, il faut soutenir « l’immense floraison d’initiatives, d’expériences innovantes qui répondent vraiment aux besoins dans notre région », respecter la commande posée mais savoir prendre des libertés. Développer la « culture de la preuve » mais où « ce qui compte, c’est l’expérience collective partagée ».

C’est, pour Maître Laurent Houdart, « trouver des moyens et développer des espaces de convergence où la grande proximité est indispensable » et mettre en cohérence tous les acteurs.

Le Dr. Mathieu Bellahsen poursuit dans les Hauts-de-Seine avec enthousiasme et ténacité le chemin tracé par Tosquelles, en pratiquant contre vents et marées une psychothérapie institutionnelle, ouvrant le plus de portes possible pour lutter contre le cloisonnement, quitte à devoir s’en justifier mille et une fois. Il déplore : « La psychothérapie institutionnelle est en voie d’effacement. c’est étonnant ; cette logique-là se répand partout. »

L’appui sur des dynamiques transversales, associatives, citoyennes, permet sans aucun doute aux soignants de ne pas se laisser transformer en symptôme à leur tour…
Pour Maître Laurent Houdart « les dispositifs sont faits pour que les gens s’adaptent aux besoins des structures au lieu de l’inverse, c’est un gros problème... La démocratie commence quand les gens se rencontrent ».

Marie-Claude Saliceti
avril 2017

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