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Le partage/Nicolas Casaux
Quand Starlink et Elon Musk apportent internet à un peuple isolé de l’Amazonie
#internet #Musk #starlink #Amazonie
Article mis en ligne le 14 août 2024
dernière modification le 13 août 2024

Les hommes sombrent dans le porno…

Depuis septembre 2023, le peuple Marubo, qui vit isolé dans la forêt amazonienne et dont le mode de vie est encore largement traditionnel, constitué de pêche, de chasse, etc., dispose d’une connexion à internet à haut débit et de téléphones portables.

Outre les Marubo, qui sont près de 2000, au Brésil, des centaines de tribus ont été connectées à internet par l’entreprise Starlink, qui propose un accès à Internet par satellite, et qui est une filiale de Space X, la compagnie spatiale privée d’Elon Musk. Depuis son entrée au Brésil en 2022, Starlink a connecté la plus grande forêt tropicale du monde, apportant le web à l’un des derniers endroits déconnectés de la planète. (...)

Mais revenons-en au village Marubo. Les antennes Starlink qui y ont été installées sont alimentées en énergie par des panneaux solaires (c’est écolo ! hourra ! en fait non). Et apparemment, elles ont déjà « sauvé des vies » (...)

Le problème, évidemment, c’est les coûts de tout ça. Ça sauve des vies, mais à quel prix ?

Il me semble que deux plans sont à prendre en compte. D’abord le plan écologique. Impossible de produire des satellites Starlink, des antennes Starlink, des smartphones, etc., sans une civilisation techno-industrielle. Aucune des industries qui composent la civilisation industrielle n’est durable, écologique, soutenable. (...)

Sur le plan social, l’expansion de la civilisation industrielle, c’est l’expansion d’une uniformisation culturelle majeure. (...)

Sur le plan social, l’expansion de la civilisation industrielle, c’est l’expansion d’une uniformisation culturelle majeure. (...)

Claude Lévi-Strauss le dénonçait aussi à sa manière : « L’humanité s’installe dans la monoculture ; elle s’apprête à produire la civilisation en masse, comme la betterave. »

Les Marubo s’en rendent bien compte et le déplorent :

« Alfredo Marubo, chef d’une association de villages Marubo, est devenu le critique d’internet le plus virulent de la tribu. Les Marubo transmettent leur histoire et leur culture oralement. Alfredo Marubo craint que le savoir ne se perde. “Tout le monde est tellement connecté qu’il arrive qu’on ne parle même plus à sa propre famille”, explique-t-il. Ce qui le perturbe le plus, c’est la pornographie. Des jeunes hommes partagent des vidéos explicites dans des groupes de discussion, ce qui est surprenant dans une culture qui réprouve les baisers en public. “Nous craignons que les jeunes ne veuillent essayer”, a‑t-il déclaré à propos des scènes de sexe dans les vidéos. Certains responsables lui ont dit qu’ils avaient déjà observé un comportement sexuel plus agressif de la part des jeunes hommes. » (...)

Une Marubo âgée de 73 ans commente : « Les jeunes sont devenus paresseux à cause de l’internet. Ils apprennent les coutumes des Blancs. »

Sur le plan social, internet et les téléphones portables vont détruire la culture Marubo. Purement et simplement. Donnez-leur quelques années, et bientôt une grande partie d’entre eux aspireront à avoir accès à différentes marchandises et différents services proposés par la civilisation industrielle. Et pour ça, il leur faudra travailler, vendre leur temps de vie comme nous sommes toutes et tous contraints de le faire. De la culture Marubo et du mode de vie qui allait avec, rapidement, il ne restera plus grand-chose.

Encore une fois, partout où elle s’étend, la civilisation industrielle propage un même mode de vie (métro, boulot, dodo), une même forme de vie sociale : le capitalisme. Un même asservissement à une gigantesque machinerie planétaire d’entr’exploitation et d’exploitation de tout sur laquelle nous n’avons presque aucun pouvoir.

Mais ça sauve des vies !

Oui, temporairement, au prix de l’ethnodiversité, de la biodiversité, de la vie sur Terre, de la liberté des humains et de toutes les espèces vivantes.

Temporairement « sauver » des vies humaines de manière abstraite (sans aucune réflexion sur la nature des vies sauvées), au prix de la destruction de la nature et de la liberté, est-ce vraiment ça qu’on veut ?