
Plus de 330 migrants ont été évacués du parvis de l’hôtel de ville du 18e arrondissement de Paris sur lequel ils s’étaient installés il y a deux jours pour réclamer un toit. Parmi ces familles, "des gens qui travaillent" et "qui sont là depuis des années", assure l’association Utopia 56, qui dénonce depuis des mois un "nettoyage social" en vue des Jeux olympiques.
(...) "339 personnes en famille et cinq hommes isolés" ont été transférés "vers des hébergements d’urgence franciliens (...)
"Ce sont des gens que l’État a essayé d’orienter en région depuis des mois, mais qui refusent parce qu’ils ont une vie à Paris, des enfants scolarisés, des démarches administratives (...) Il y a des gens qui travaillent, qui sont là depuis des années", a expliqué Yann Manzi, membre fondateur d’Utopia 56. "Moi, j’ai cinq enfants qui sont français, et qui sont dehors", témoignait jeudi matin une Sénégalaise de 39 ans auprès de l’AFP. (...)
Après l’opération en revanche, 120 personnes ont été "laissées sur le carreau", sous la pluie, d’après le militant. "Comme à toutes les évacuations, il y a des gens qui se sont rajoutés au dernier moment, [les services de l’État] n’ont pas voulu les prendre. Il y a aussi des familles qui ne sont pas montées dans les bus car les maris étaient partis travailler", a ajouté Yann Manzi. Plusieurs familles restent donc à la rue, mais celles avec les "bébés les plus vulnérables" ont été hébergées chez des particuliers.
La préfecture, elle, assure que "toutes les personnes présentes sur le parvis de la mairie du 18e arrondissement se sont vu proposer une solution d’hébergement ".
"Vider les quais juste à temps"
Ces dernières semaines, les démantèlements de campements et les évacuations se sont multipliés dans la capitale et ses alentours. Entre le 16 et le 18 juillet, près de 500 migrants ont été évacués de leurs lieux de vie informels, situés sur les bords des canaux de l’Ourcq et de Saint-Denis, ainsi que sur les quais de Seine du Pont Marie à Paris.
La plupart – comme ceux installés devant la mairie du 18e arrondissement - ont été orientés vers des centre d’accueil et d’examen de la situation (CAES) franciliens. Une décision bienvenue pour les associations, qui s’étonnent en revanche de cette soudaine disponibilité. "Comment cela se fait-il que ces places soient libres maintenant ? Alors que jusqu’ici on nous disait toujours que c’était plein, d’où les transferts en SAS régionaux", s’interrogeait auprès d’InfoMigrants Antoine de Clerck, membre du collectif Revers de la médaille, qui alerte sur l’expulsion des populations précaires de Paris en amont des Jeux olympiques de Paris. (...)
Sur ces lieux de campements expulsés la semaine dernière, depuis, "il y a une présence continue de la police, pour empêcher toute réinstallation et continuer d’invisibiliser les ‘indésirables’", dénonce sur X le Collectif Accès au droit (CAD).
"Nettoyage social"
Depuis plusieurs mois, les associations dénoncent "un nettoyage social" en région parisienne à l’approche des JO, servant à "invisibiliser les personnes en situation de précarité, au nom d’un Paris de carte postale", a dénoncé Antoine Clerck ce jour dans un point presse. "Et les autorités ont dans un sens atteint leur objectif : aujourd’hui à Paris, il n’y a plus un seul camp informel". (...)
À noter, ces données ne prennent pas en compte les expulsions de squats, où se réfugient des centaines d’exilés sans domicile. Et d’après le Revers de la médaille, les chiffres sont plus élevés : 12 500 personnes ont été évacuées de campements et de squats l’année dernière, une augmentation de 40 % par rapport à la même période il y a deux ans. (...)
Les migrants installés dans les campements subissent "des réveils quotidiens le matin par la police leur disant ’il faut partir’" et les empêchant par ailleurs de déployer des tentes", avait expliqué Oriane Sebillote, doctorante à l’EHESS, à InfoMigrants. Des pratiques qui incitent de plus en plus souvent les migrants à partir d’eux-mêmes, et à s’éloigner, de fait, des réseaux associatifs où ils peuvent obtenir de l’aide. "Une fois que ces personnes partent, on perd le contact avec elles. C’est très dur de la maintenir à distance, explique Antoine de Clerck. Alors forcément, pour ces exilés, c’en est fini des soins qu’on peut apporter, ou des distributions de nourriture".
La présence policière quasi omniprésente depuis quelques jours à Paris, et la hausse des prix des transports isolent d’autant plus les migrants. (...)