
La plainte de Judith Godrèche déposée mardi contre Benoît Jacquot et Jacques Doillon pour « viol sur mineur » met en lumière l’appétence malsaine des cinéastes des années 80 pour les jeunes filles. Une érotisation qui a broyé de nombreuses actrices.
En 1986, l’agente Isabelle de la Patellière (1) s’inquiète : « Tous les jours, je reçois des coups de téléphone de metteurs en scène qui systématiquement me demandent de leur présenter, une très jeune fille, le plus souvent inconnue. Jusqu’ici, leur âge tournait autour de 17, 18 ans, mais depuis le succès de l’Effrontée, nous sommes descendus à 14, 15. » (...)
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L’actrice a porté plainte contre le réalisateur, mardi 6 février, pour viols sur mineure. Elle dénonce des faits qui se sont déroulés lorsqu’elle était adolescente.
"Je regardais cet homme comme une figure paternelle, comme l’autorité sur le tournage", confie jeudi 8 février à France Inter l’actrice Judith Godrèche au sujet de Benoît Jacquot, contre qui elle a porté plainte mardi 6 février pour viols sur mineure. Le parquet de Paris a annoncé, mercredi 7 février, l’ouverture d’une enquête préliminaire.
La relation entre la comédienne et le cinéaste de 25 ans son aîné a débuté alors qu’elle avait 14 ans (...)
L’actrice décrit la relation d’emprise qui se noue avec le cinéaste de "façon insidieuse". Elle compare ainsi Benoît Jacquot au "loup qui s’est déguisé en grand-mère dans Le Petit Chaperon rouge". "C’est comme quelqu’un qui avancerait dans votre dos avec un plan, une vision de ce qu’il veut (...) et qui vous jette un grand drap noir sur la tête", précise-t-elle. Selon elle, le cinéaste lui fixe des règles sur sa manière de s’habiller, sur la longueur de ses cheveux ou encore sur sa nourriture. "Tout est sacré, tout est de l’ordre du fétiche", se remémore la comédienne. (...)
Elle explique également que Benoît Jacquot "crée un système de manque", la poussant à se sentir "complètement dépendante". (...)
"C’était comme une main qui se referme sur votre cœur, qui serre et dont il est impossible de s’en dégager", déplore-t-elle, la voix tremblante. (...)
Judith Godrèche confie avoir eu "peur" de déroger aux règles que lui fixait le cinéaste, expliquant avoir "de bonnes raisons". Elle assure ainsi qu’il racontait "avoir tué quelqu’un, qu’il avait un pistolet" chez lui. (...)
La comédienne raconte que si au début, elle "n’avait pas de raison d’avoir peur", à "partir du moment où [elle a] commencé à émettre des désirs, des souhaits qui ne correspondaient pas aux règles", la situation est devenue "terrifiante". Elle évoque "de la violence physique" et des "coups" qui s’intensifient, (...)
Elle détaille ce "long cheminement" qui lui a pris plusieurs années. Judith Godrèche évoque par exemple le rôle de la sortie du livre Le Consentement de Vanessa Springora (2020, éditions Grasset). (...)
Judith Godrèche craint de ne pas être la seule à avoir été victime de telles violences. "Je le pense et je le sais", soutient-elle. La comédienne confie également se sentir "un peu responsable" et décrit, avec énormément d’émotions dans la voix, un sentiment de culpabilité. (...)