
Le Conseil d’Etat a rejeté la requête visant à annuler la délibération de la Cnil autorisant l’hébergement par Microsoft des données du projet Darwin EU, dont l’objectif est de fournir un accès à des données de santé réelles pour l’évaluation des médicaments. Les données de dix millions de personnes sont concernées. Le caractère d’urgence n’était pas démontré, a conclu le juge des référés.
Les données de 10 millions de personnes
Le projet "Darwin EU" (pour Data Analysis and Real-World Interrogation Network – European Union) est une initiative de l’Agence européenne des médicaments (EMA), lancée en 2022, pour fournir un accès structuré à des données de santé réelles pour l’évaluation des médicaments et des vaccins tout au long de leur cycle de vie. En pratique, il s’agit de tirer au sort 10 millions de personnes pour constituer un échantillon représentatif en âge, sexe et région.
Dans ce cadre, le Health Data Hub – la base de données qui regroupe les informations de santé des Français – intervient en qualité de sous-traitant de l’Agence européenne des médicaments pour l’extraction des données pertinentes du Système national des données de santé (SNDS), leur pseudonymisation, leur mise au format OMOP-CDM et leur stockage. Le HDH étant hébergé par Microsoft, le fournisseur américain est à nouveau impliqué dans ce projet.
Un risque de transfert de données vers les Etats-Unis
Le traitement des données de santé par l’EMA a été autorisé par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil). C’est cette délibération, rendue le 13 février 2025, qui a été attaquée devant le Conseil d’Etat par l’association Les Licornes Célestes, deux citoyens, et plusieurs acteurs du numérique (Clever Cloud, Nexedi...). Ils estiment que les données sont exposées à l’accès des autorités américaines car Microsoft est une entreprise américaine, et à ce titre, soumise au CLOUD Act. Cette loi américaine permet aux autorités nationales d’exiger, sous certaines conditions, d’accéder aux données hébergées par des fournisseurs américains, quelle que soit leur localisation dans le monde. (...)
Le juge des référés a également rejeté la demande de saisine de la Cour de justice de l’Union européenne sur la validité du Data Privacy Framework (DPF), conclu le 10 juillet 2023. Via ce texte, successeur du Privacy Shield, la Commission européenne constate que les États-Unis assurent un niveau de protection des données personnelles équivalent à celui de l’Union européenne. Les transferts de données personnelles depuis l’UE vers certains organismes étatsuniens peuvent désormais s’effectuer librement, sans encadrement spécifique.