Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
La Quadrature du Net
La loi Narcotrafic devant le Conseil constitutionnel
#loinarcotrafic #ConseilConstitutionnel
Article mis en ligne le 12 juin 2025
dernière modification le 10 juin 2025

Au milieu de l’hiver, la loi Narcotrafic est arrivée à toute vitesse et, avec elle, ont déferlé des propositions sécuritaires et de surveillance qui dépassaient largement la question du trafic de stupéfiants. Avec vous, nous avons mené campagne pour alerter sur les risques de ce texte. Son examen au Parlement est désormais terminé et nous avons envoyé nos arguments au Conseil constitutionnel pour le convaincre de censurer ces dispositions dangereuses et révoltantes. Sa décision sera rendue cette semaine.

Au milieu de l’hiver, la loi Narcotrafic est arrivée à toute vitesse et, avec elle, ont déferlé des propositions sécuritaires et de surveillance qui dépassaient largement la question du trafic de stupéfiants. Avec vous, nous avons mené campagne pour alerter sur les risques de ce texte. Son examen au Parlement est désormais terminé et nous avons envoyé nos arguments au Conseil constitutionnel pour le convaincre de censurer ces dispositions dangereuses et révoltantes. Sa décision sera rendue cette semaine.

Il s’agit de l’ultime étape du processus législatif. Saisi par les députés insoumis, écologistes et socialistes, le Conseil constitutionnel doit désormais analyser si un certain nombre de mesures de la loi « Narcotrafic » sont conformes aux principes constitutionnels. De la même manière que nous avons alerté les député·es de l’inconstitutionnalité de certaines mesures lors des débats parlementaires, nous avons envoyé au Conseil constitutionnel nos critiques en ce qui concerne les dispositifs de surveillance contenus dans la loi (la contribution est accessible ici).

Des cadeaux pour le renseignement (...)

De nouveaux outils de surveillance pour la police et l’administration

Loin de se limiter aux seuls services de renseignement, la loi « Narcotrafic » dote aussi la police judiciaire de nouveaux pouvoirs de surveillance extrêmement intrusifs, dès lors qu’une affaire serait liée à la criminalité organisée. Nous avons rappelé à de nombreuses reprises que ce régime juridique d’exception, qui ne peut, en principe, être mobilisé que pour les seules enquêtes portant sur des faits très graves, est en réalité utilisé de façon très large, loin de se limiter au « haut du spectre » (pour reprendre une expression abondamment utilisée par les défenseurs de ce système) et qui, déjà aujourd’hui, fait l’objet d’utilisations abusives, notamment pour poursuivre des militant·es.

Ainsi, la police pourrait, pour certaines infractions, activer à distance les micros et caméras des objets connectés (articles 38 et 39), en compromettant les appareils grâce à des failles de sécurité. Nous n’avons pas manqué de rappeler au Conseil constitutionnel qu’il a déjà déclaré ce dispositif inconstitutionnel en raison de l’atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée. (...)

De son coté, l’administration n’est pas en reste sur l’extension de ses pouvoirs. Les enquêtes administratives de sécurité, qui conditionnent l’accès à certains emplois, pourraient être très largement étendues à tout emploi public et privé lié à des menaces de corruption (article 54). Ces enquêtes impliquent la consultation de nombreux fichiers de police et de renseignement et reposent sur des critères opaques. Elles ont pourtant des conséquences bien concrètes puisque, pendant les Jeux Olympiques, elles ont conduit à empêcher certaines personnes perçues comme militantes par les autorités de travailler. Nous avons expliqué au Conseil constitutionnel en quoi ces discriminations fondées sur les opinions politiques portent atteinte au principe d’égalité. (...)

Une nouvelle escalade sécuritaire

Nous avons également attiré l’attention du Conseil constutionnel sur l’obligation radicalement disproportionnée faite aux opérateurs de communication électronique de conserver pendant cinq années l’identité civile de toute personne achetant des cartes SIM prépayées (article 29). Non seulement il s’agirait d’une nouvelle forme de contrôle de l’expression en ligne, mais la loi est tellement mal rédigée que ce sont tous les services de communication en ligne (notamment les messageries) qui pourraient être concernés par cette obligation de contrôle d’identité à partir du moment où certaines fonctionnalités sont payantes (comme c’est par exemple le cas pour Olvid, la messagerie plébiscitée par les macronistes).

Enfin, nous avons longuement expliqué que l’extension de l’utilisation des drones en prison (article 56) viole la Constitution, pour trois raisons. (...)

Si nous n’avons que des espoirs mesurés dans la future décision du Conseil constitutionnel, nous regardons aussi les prochains combats à venir. En effet, si l’obligation de mettre en place une porte dérobée au sein des messageries chiffrées a bel et bien été retirée du texte, le président de la commission des lois, Florent Boudié, a annoncé vouloir remettre le sujet sur la table. En parallèle, les ministres Gerald Darmanin et Bruno Retailleau ont brandi la criminalité organisée et le « narcotrafic » comme excuse pour rendre acceptable une potentielle légalisation de la reconnaissance faciale en temps réel mais aussi justifier la confiscation extrajudiciaire des téléphones. (...)