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Mediapart
L’Assemblée vote un objectif de 400 000 exploitations pour stopper l’hémorragie du monde agricole
#agricuture #AssembleeNationale
Article mis en ligne le 26 mai 2024
dernière modification le 25 mai 2024

C’est un chiffre qui n’était souhaité ni par le gouvernement ni par la FNSEA. La France devra compter « au moins 400 000 exploitations et 500 000 exploitants » en 2035, dit la nouvelle version de l’article 8 de la loi d’orientation agricole, votée jeudi à l’Assemblée nationale.

Faut-il se fixer un cap pour mettre un terme à la chute démographique du monde agricole et à l’agrandissement perpétuel des exploitations ? La loi d’orientation agricole discutée depuis le 15 mai à l’Assemblée nationale a précisément pour but de faciliter le renouvellement des générations dans un paysage déserté, actuellement frappé par une vague massive de départs à la retraite. (...)

Cette baisse doit désormais être enrayée, et c’est la loi qui le dira. (...)

voté jeudi 23 mai dans l’hémicycle, amenant enfin les débats au cœur du sujet avec quelques paragraphes programmatiques. Une nouvelle version validée en fin d’après-midi dans des rangs très clairsemés, par 47 voix contre 2.

Le gouvernement ne voulait pas de cet objectif chiffré : le projet de loi déposé en conseil des ministres n’en contenait pas et, selon nos informations, la FNSEA n’en voulait pas non plus. La chute ininterrompue du nombre d’exploitations agricoles, corrélée au déclin démographique du secteur et à la concentration des terres, pouvait donc allègrement se poursuivre. (...)

C’était sans compter la volonté de l’un des corapporteurs de la loi, Pascal Lecamp (MoDem), et celle du député socialiste Dominique Potier, partagée par tout le camp de la gauche. (...)

Certes, l’objectif n’a pas de caractère contraignant et il ne peut se suffire à lui-même. « Il manque un véritable outil de régulation de foncier, et des financements publics », a plaidé Aurélie Trouvé (LFI) dans l’hémicycle. (...)

L’inscription d’un chiffre a toutefois le mérite de fixer un cap dans une loi très libérale, dépourvue de toute planification. (...)

Le collectif Nourrir – dans lequel on retrouve, entre autres, Greenpeace, la FNAB (Fédération nationale d’agriculture biologique), Réseau action climat, le mouvement des paniers Amap, l’association Terre de liens et la Confédération paysanne – a publié l’an dernier un manifeste en ce sens. Son calcul reposait sur la simulation, à l’échelle nationale, d’une production de nourriture de qualité, celle-ci nécessitant plus de main-d’œuvre que l’agriculture conventionnelle, qui recourt aux produits chimiques.

À l’évidence, ce n’est pas la voie choisie par le camp présidentiel et le ministre de l’agriculture, Marc Fesneau, qui défendent le maintien du modèle agro-industriel, aux côtés d’une agriculture biologique minoritaire pour laquelle ils avaient même retiré, la semaine dernière, toute ambition.

La séquence autour de l’article 8 a ainsi été l’occasion, pour le gouvernement et le corapporteur de la loi, d’un rétropédalage après l’effacement du Code rural, la semaine dernière, d’un objectif chiffré : 21 % de la surface agricole doit être cultivée en bio d’ici à 2030, sachant que la proportion aujourd’hui atteint à peine 11 %. Cette réécriture, soulevée après coup par LFI, a été à nouveau l’objet de débats ce jeudi, et à l’exception du Rassemblement national (RN), chaque groupe politique y est allé de son amendement pour rétablir l’ambition.

Conclusion : « L’État se donne comme objectif, d’ici au 1er janvier 2030, que la surface agricole utile cultivée en agriculture biologique […] atteigne 21 % et que celle cultivée en légumineuses [légumes secs riches en protéines, comme les haricots, pois chiche, lentilles, fèves, etc. – ndlr] atteigne 10 % », dit désormais un nouvel article inséré juste après l’article 8 et voté dans la foulée. (...)

les rangs de l’opposition ont repoussé un peu plus loin l’arrivée, voulue par l’exécutif, d’investisseurs privés en agriculture, qui avait déjà du plomb dans l’aile depuis les débats en commission des affaires économiques. Un amendement supprimant les « investisseurs privés » aux côtés de collectivités territoriales dans l’élaboration de portage foncier est ainsi passé avec les voix de la gauche et du RN, contre la Macronie et Les Républicains.

Dans un océan d’amendements rejetés, la gauche, sous l’impulsion de Dominique Potier, a par ailleurs obtenu quelques micro-avancées. Actant que le texte était très en deçà d’une politique concrète pour permettre l’arrivée massive de nouvelles personnes en agriculture, elle a gagné la promesse d’une future grande réforme foncière afin de mieux lutter contre les phénomènes d’agrandissement des exploitations.

Elle a également fait voter la mise en cohérence, face à l’objectif du nombre de fermes à maintenir, des schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles (SDREA) – un point déterminant car ces documents fixent dans chaque région les critères d’attribution des terres agricoles et peuvent donc favoriser l’installation de nouveaux agriculteurs et agricultrices. Ce dernier amendement a recueilli un avis défavorable du corapporteur et du ministre ; il est passé avec les voix des Républicains. (...)