
La militante kurde iranienne, Maysoon Majidi, a été acquittée mercredi par un tribunal italien. La jeune femme, qui a fui la répression du régime iranien, était accusée de trafic de migrants depuis son arrivée en Italie fin 2023 à bord d’un canot pneumatique. Incarcérée pendant 10 mois, elle n’a jamais cessé de clamer son innocence.
Victoire pour Maysoon Majidi et ses soutiens. Cette militante kurde iranienne a été acquittée mercredi 5 février de l’accusation de trafic de migrants par le tribunal de Crotone, dans le sud de l’Italie.
À la lecture du verdict mercredi, la jeune femme de 29 ans a fondu en larmes de joie, aux côtés de son frère Razhan venu d’Allemagne pour la soutenir, et sous une salve d’applaudissements.
"Aujourd’hui, enfin, prend fin une persécution qui a duré plus d’un an, contre une jeune militante qui avait demandé protection et qui s’est retrouvée en prison pour une longue période dans le cadre d’un procès pour trafic d’êtres humains", a commenté Riccardo Noury, porte-parole d’Amnesty international en Italie.
Dix mois en prison
Maysoon Majidi a débarqué le 31 décembre 2023 en Calabre, à bord d’une embarcation de 77 passagers en provenance de Turquie. Elle a été interpellée dès le lendemain et incarcérée, sur la base de deux témoignages, ensuite démentis, l’accusant d’avoir organisé la traversée et d’avoir ainsi joué un rôle de passeur.
Maysoon Majidi passe 10 mois en prison, et ne cesse de clamer son innocence. Elle observe plusieurs grèves de la faim, notamment pour demander un interprète. Parisa Nazari, militante féministe iranienne installée en Italie, a soutenu Maysoon Majidi pendant son incarcération et se souvient de son état de détresse en prison : "Je pouvais sentir ses côtes en la prenant dans mes bras. Elle me demandait constamment : ’Qu’est-ce que je fais ici ?’". (...)
Remise en liberté le 22 octobre 2024, la militante restait en attente du jugement qui devait l’innocenter, grâce notamment à la déposition du capitaine du bateau de fortune, qui l’a blanchie.
Citoyenneté d’honneur
Née en 1996 dans la province iranienne du Kurdistan, Maysoon Majidi a étudié le théâtre et la sociologie. Elle a dénoncé la misogynie ambiante dans plusieurs articles écrits sous pseudonyme, puis réalisé un court-métrage avec des kolbars, ces Kurdes qui risquent leur vie en transportant des marchandises dans les montagnes séparant l’Iran de l’Irak, à défaut d’autres perspectives économiques (...)
Arrêtée en 2019 puis relâchée, "pour avoir accès à ses contacts" pense-t-elle, la jeune femme prend la route de l’exil avec son frère. Réfugiée à Erbil, dans le Kurdistan autonome d’Irak, elle devient journaliste et participe à l’organisation de manifestations du mouvement "Femme, Vie, Liberté", après la mort de Mahsa Amini, étudiante kurde arrêtée et tuée par la police des mœurs iranienne en septembre 2022. De nouvelles menaces la poussent à fuir en Turquie, d’où elle parvient à réunir l’argent nécessaire pour rejoindre l’Italie. Et où elle sera finalement arrêtée et placée en détention.
Amnesty international et plusieurs personnalités politiques ont soutenu Maysoon Majidi, qui a reçu la citoyenneté d’honneur de la commune de Riace en Calabre. Son maire, Domenico Lucano, également député européen, y a porté une politique d’accueil des migrants, dont une communauté kurde.