
Il y a sept mois, une « boule de démolition » - c’est son expression – a traversé la vie de Virginie. Elle menaçait de céder depuis trois mois, tenait Virginie en apnée… boule d’émotion qui subit l’effet boule de neige. Témoignage de Lydie Rivière, psychologue en colère, avec l’autorisation de sa patiente (dont le prénom a été modifié).
« Mémoire traumatique », on appelle ça : chaque jour de nouvelles odeurs, des injonctions, des images, à la fois si nettes et si furtives, s’imposent à elle avec la force d’un uppercut dans l’estomac. L’inceste, les viols… Chaque nuit, elle se fait manger par des zombies, ou on la bâillonne et lui ordonne de se taire… Enfin, pas chaque nuit, non... Seulement celles où elle parvient à fermer l’œil une heure ou deux.
Virginie est forte et courageuse, même si cela, elle ne le sait pas encore et refuse de se l’entendre dire. Elle voit plutôt ses efforts comme quelque chose de viscéral, mais c’est un véritable combat qu’elle mène, contre cette envie d’en finir, contre cette idée -qu’on lui a planté dans la cervelle dès son plus jeune âge à grand renfort de beignes - qu’il y a une part d’elle irrémédiablement pourrie qui justifierait cette maltraitance, et que disparaitre serait la meilleure solution pour tout le monde. Combat encore, contre l’idée même que parler témoignerait d’un égoïsme monstre, qu’elle serait à l’origine d’un cataclysme qui bouleverserait des vies, juste pour sa petite personne. Combat entre ses envies impulsives à pénétrer son ventre d’un couteau et l’engagement qu’elle a pris envers une amie de tenir dix jours quand lui prend l’envie d’en finir…. Mais cette envie d’en finir est quotidienne, et les forces de Virginie s’épuisent… Pour ses amies, pour moi, c’est une course contre la montre. (...)