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Formation des enseignants : un projet de réforme hors sol et inquiétant
#educationNationale #enseignants #reformes
Article mis en ligne le 26 mars 2024
dernière modification le 24 mars 2024

Ces derniers jours a circulé un document de travail du gouvernement, présentant dans les grandes lignes un projet de réforme de la formation des enseignants, du primaire et secondaire. Ce qui nous en est parvenu apparait extrêmement problématique, sur le fond et sur la forme. Nous, enseignants et enseignants-chercheurs, ressentons aujourd’hui malaise et inquiétude.

Souhaitée par G. Attal, construite à la va-vite et sans réel travail de consultation avec les acteurs de terrain ni les spécialistes, cette réforme devrait être mise en place à partir de la rentrée prochaine. (...)

Sur le fond, le projet annoncé conduirait à diminuer à nouveau l’apport de connaissances fondamentales, au profit d’enseignement dits « didactique et de pédagogie », déjà largement présents dans les formations. S’il est primordial de maîtriser des techniques d’enseignement et de gestion de classe, il est aussi nécessaire de maîtriser les savoirs à transmettre aux élèves.

On ne peut que rapprocher cet affaiblissement programmé du niveau des enseignants d’autres réformes mises en œuvre (manuel labellisé, etc.), visant à appauvrir la capacité de réflexion et la liberté pédagogique des enseignants, pour en faire de simples exécutants.

Sur la forme, la réforme témoigne une fois de plus du mépris et de la violence de ce gouvernement vis-à-vis du personnel de la fonction publique en général, et de l’enseignement en particulier.

Les informations circulent au compte-goutte, par des canaux plus ou moins officiels, provoquant une difficile incertitude (...)

sur le terrain les formateurs seront sommés d’agir dans l’urgence, avec le stress que cela implique.

Plus généralement, pour qui connaît un tant soit peu le système actuel de formation, le projet comporte une multitude de zone d’ombres et soulève autant de questions. (...)

Face au déclin du nombre de candidats aux concours d’enseignement, les gouvernements successifs n’ont proposé depuis une dizaine d’année qu’une série de réformes, toutes plus rapides et inabouties les unes que les autres. En l’espace de 10 ans, les IUFM sont devenus ESPE puis INSPE et seront désormais les ENSP ; le concours a été placé pour partie en M1 et M2, puis uniquement en M1, puis uniquement en M2, et sera désormais en L3. Systématiquement, et notamment lors de la dernière réforme, les formateurs ont alerté le ministère sur les incohérences des dispositions mises en œuvre. Ils n’ont pas été écoutés. Ces réformes successives ont à chaque fois nécessité des moyens financiers et surtout un important investissement important des équipes de formateurs, psychologiquement coûteux. Avec quels résultats ?

Les causes de la désaffection du métier d’enseignant sont connues : conditions de travail dégradées, établissements vétustes, classes surchargées, successions de réformes délétères imposées sans aucun dialogue, mépris répétés des ministres, gestion problématique des mobilités géographiques et enfin perte régulière du pouvoir d’achat. En dépit des annonces gouvernementales, les enseignants français restent parmi les moins bien payés des pays de l’OCDE, et particulièrement en milieu de carrière.

Afin de rendre la profession plus attractive, la solution la plus évidente est d’en revaloriser les conditions de travail et d’emploi, en particulier le salaire. Au lieu de cela, Attal choisit de baisser les exigences de formation disciplinaire, et de mettre devant les élèves des enseignants moins compétents sur les contenus à transmettre, donc plus susceptibles de se retrouver en grande difficulté dans leurs classes et d’éprouver du mal-être au travail. (...)