
Les familles des victimes de féminicides ont pris la tête de la manifestation parisienne qui a réuni plusieurs milliers de personnes, samedi.
C’est un cortège qui brandit des photos. Des visages, souvent souriants, de femmes. Sous les photos, on a écrit les prénoms et les âges. Valérie, 32 ans, écarquille les yeux en gonflant ses lèvres. Marie-Alice, 52 ans, cheveux blancs au carré, affiche un grand sourire, comme Hélène, Sandrine, Natacha. En dessous, l’année de leur assassinat.
Une association des familles de victimes de féminicide (l’UNFF) a pris la tête du cortège de la manifestation contre les violences faites aux femmes et aux minorités de genre, à l’appel du collectif #NousToutes, samedi, à Paris. On croirait une marche blanche, mais c’est le violet qu’on voit partout, écharpes, pancartes, pulls et banderoles violettes. « Elles étaient nos mères, nos filles, nos sœurs, nos cousines, nos amies », proclame la banderole de tête, où figurent aussi des photos. (...)
En 2022, 244 000 femmes ont été victimes de violences conjugales en France, et en 2023, 121 féminicides ont déjà été comptabilisés par les associations – contre 118 en 2022. « Nous ne voulons plus compter nos mortes », proclamait Le collectif #NousToutes dans son appel à manifester.
« Les féminicides ont fait mille orphelins depuis le début du quinquennat, dénonce une jeune femme au mégaphone. Et 30 % des bourreaux étaient déjà accusés de violences conjugales et condamnés pour ça. » À l’arrière, une sono diffuse « Balance ton quoi » d’Angèle, repris par la foule. Les trottoirs du boulevard Voltaire débordent. La manif avance. « Les visages et les pancartes ne sont pas juste des noms !, poursuit la militante à l’adresse de la foule. Ce sont des étoiles qui sont parties sous les coups de leurs conjoints ! Ayez une pensée pour elles ! »
Une jeune fille prend le micro. Elle a 16 ans et tient aussi une pancarte sur laquelle elle a écrit : « Mon père a tué ma mère sur un féminicide. » « J’avais prévenu que ma mère allait être assassinée, dit-elle. Maintenant, on m’écoute mais c’est trop tard. » (...)
À quelques mètres, Gabriel, un ingénieur de 25 ans, marche avec des amies. Embauché il y a un an, il est écœuré par le sexisme de ses collègues « de la génération des 50-60 ans », une majorité d’hommes. Une de ses amies, Enora, 25 ans aussi, découvre le sort des jeunes femmes exilées, victimes de mauvais traitements et parfois de viol, prises en charge dans l’association où elle est bénévole.
Sur une banque, une jeune femme écrit à la bombe de peinture noire : « J’ai été agressée deux fois par un policier. » (...)
Les associations demandent la création de 15 000 places d’hébergement pour les femmes fuyant leur conjoint violent.
Derrière le cortège de l’association Attac, animé par les désormais célèbres « Rosies », et ceux d’autres collectifs féministes et intersectionnels, des militantes iraniennes dénoncent la répression subie par les femmes en Iran.
Dans un texte, l’association Grève féministe et les collectifs et syndicats organisateurs appelaient d’ailleurs à soutenir « toutes les femmes dans le monde, premières victimes avec les enfants des conflits armés ». « Nous manifestons particulièrement notre soutien aux femmes d’Ukraine, de Birmanie, de Palestine, d’Israël, du Haut-Karabakh », indiquait leur communiqué. Un minimaliste cortège ukrainien s’est faufilé parmi la foule. Et deux cortèges de soutien aux Palestinien·nes se sont déployés à l’arrière de la manifestation.
À Nation, un cortège de militantes juives féministes venues dénoncer les crimes et les féminicides du Hamas a par contre été mis à l’écart par un des services d’ordre des organisateurs.