Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
LCP
Extension de l’AME à Mayotte : Estelle Youssouffa (LIOT) retire sa proposition de loi après avoir obtenu une "avancée importante"
#Mayotte #sante #AME #inegalites #AssembleeNationale
Article mis en ligne le 16 mai 2025

La proposition de loi visant à "étendre l’aide médicale de l’Etat (AME) à Mayotte" a été retirée, lors de son examen à l’Assemblée ce jeudi 15 mai, par son auteure Estelle Youssouffa (LIOT), après qu’elle a obtenu des engagements du ministre de la Santé, Yannick Neuder pour faciliter les évacuations sanitaires des Mahorais qui doivent se faire soigner hors de l’archipel qui manque d’équipements et de personnels de santé.

"C’est cynique, mais à Mayotte, nous sommes désespérés." Estelle Youssouffa (LIOT) a retiré de manière sa proposition de loi visant "à étendre l’aide médicale de l’Etat à Mayotte", ce jeudi 15 mai, après avoir obtenu une "avancée importante" pour les Mahorais. Le texte, dont l’examen commençait dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale lors de son retrait, était le premier inscrit au programme de la journée d’initiation parlementaire du groupe "Libertés, indépendants, outre-mer et territoires" (LIOT), présidé par Laurent Panifous.

La députée de Mayotte a toutefois eu le temps d’alerter, lors de la discussion générale de sa proposition de loi, sur la situation du département français de l’océan Indien, "désert sanitaire", où le seul établissement public de santé est engorgé par la prise en charge des étrangers en situation irrégulière, largement issus des Comores voisines. "40 % de notre budget de santé est prélevé, par dérogation, pour soigner les étrangers en situation irrégulière", a-t-elle pointé.

L’engorgement des rares structures de santé entraîne en outre un "effet d’éviction scandaleux", le centre hospitalier ne fonctionnant plus que pour les urgences vitales et les accouchements, a souligné Estelle Youssouffa, rappelant que le ministère de la Santé avait en conséquence organisé une "externalisation de la santé des Mahorais à La Réunion et dans l’Hexagone", via des évacuations sanitaires. Avant de souligner : "Le nombre de places est limité : tout le monde n’est pas sélectionné", indiquant, là encore, que les non-assurés sociaux représentaient 40 % de ces évacuations. (...)

Le ministre a cependant été sensible aux arguments développés par Estelle Youssouffa (LIOT), ce qui l’a incité à prendre un engagement au sujet des évacuations sanitaires. A savoir la mise en place, d’ici à la fin du mois de juillet, d’un "guichet unique" piloté par la caisse de Sécurité sociale de Mayotte. Un dispositif destiné à gérer les évacuations sanitaires programmées, qui concernent des problèmes de santé non urgents. "Les travaux sont déjà en cours et mobilisent l’ensemble des acteurs locaux." En parallèle, un système informatique dédié sera déployé. "Il permettra de donner de la visibilité pour toutes les parties prenantes sur l’ensemble des demandes en cours." Yannick Neuder a également rappelé les mesures du plan d’attractivité et de fidélisation des professionnels de santé à Mayotte annoncé en avril.

A la suite de ces engagements "pour le bénéfice des assurés sociaux à Mayotte", Estelle Youssouffa a décidé de retirer sa proposition de loi, au profit des autres textes inscrits à l’ordre du jour de la "niche parlementaire" du groupe LIOT. (...)

"C’était un peu de stratégie. utiliser le chiffon rouge de l’AME pour retourner l’hémicycle (...) et faire paniquer le gouvernement", a détaillé l’élue mahoraise. (...)

Lire aussi :

 (Infomigrants)
Mayotte : des droits particuliers pour les étrangers
(...)
En ce qui concerne la santé, l’Aide médicale d’État (AME) n’existe pas dans le 101e département français, le plus pauvre du pays. Avec peu de médecine de ville, la plupart des soins sont promulgués au centre hospitalier de Mamoudzou. Et pour les personnes sans assurance, l’accès au soin y est conditionné au paiement d’un montant forfaitaire de 10 ou 20 euros (...)

 (HCSP)
Positionnement du Haut Conseil de la santé publique sur l’aide médicale de l’État (AME)

Le HCSP tient à souligner les vertus de l’aide médicale de l’État (AME) pour la santé publique de tous les concitoyens, et partage quatre valeurs fondatrices :

  • Les bénéficiaires de l’AME sont à sur-risque d’être atteints de maladies infectieuses qui affectent d’abord leur santé, mais sont également susceptibles d’être transmises à la population générale si elles ne sont pas dépistées et traitées efficacement. Faciliter l’accès aux soins des patients permet non seulement de les soigner conformément au devoir d’humanité mais de protéger la collectivité, comme parfaitement démontré pour la tuberculose, le VIH-sida, les hépatites virales, les infections sexuellement transmissibles (IST), la Covid-19, …
  • Les bénéficiaires de l’AME sont également plus exposés aux troubles psychiques en raison de leurs conditions de vie souvent difficiles et précaires ainsi que des évènements qu’ils ont pu vivre avant et pendant leur parcours migratoire voire parfois, de troubles liés à l’usage de substances. Là aussi la prise en charge rapide et adaptée des personnes concernées, et en particulier de leurs psychotraumatismes si fréquents, est justifiée d’un point de vue de santé publique, facilitée par la couverture proposée par l’AME et bénéficie à toute la collectivité, en limitant les décompensations psychologiques non médicalisées.
  • L’AME permet aussi aux personnes concernées de bénéficier de soins en ville (consultations en médecine générale, médecine spécialisée, soins infirmiers, biologie, imagerie…). Remettre en cause ce dispositif induirait automatiquement un transfert d’activité et aussi un surcroit de charge financière sur le système hospitalier et les acteurs territoriaux et associatifs, retentissant immédiatement sur toute la collectivité. En particulier, l’impact sur les services d’urgence, déjà chroniquement en tension, pourrait être conséquent, exposant tous ses usagers au risque de soins de moindre qualité. Par ailleurs, les permanences d’accès aux soins de santé (PASS), les équipes mobiles psychiatrie précarité (EMPP) et les consultations associatives et en centres de santé territoriaux déjà tournées vers les populations précaires apparaissent structurellement bien trop fragiles pour apporter une offre de soins alternative suffisante en cas de suppression de l’AME.
  • Contraindre les soignants à renoncer à soigner est non seulement contraire au code de déontologie et l’énoncé du serment d’Hippocrate - « Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me le demandera », une valeur partagée par tous les autres professionnels de santé - mais à haut-risque de majorer la souffrance au travail aujourd’hui exprimée par un nombre élevé de soignants de tous métiers. Les conséquences en seraient très néfastes non seulement pour les acteurs concernés mais aussi pour l’attractivité des métiers et pour la qualité globale de la prise en charge de tous les concitoyens.

Le HCSP souligne avoir déjà partagé ces constats lors de son audition en novembre 2023 par la mission parlementaire menée par MM Claude Evin et Patrick Stefanini.

À travers cette note sans dimension politique, le HCSP souhaite souligner les valeurs qu’il porte sur la santé de toutes les personnes sans distinction et son attachement à la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé, notamment chez les personnes vulnérables. Ainsi, le HCSP va poursuivre sa réflexion sur la thématique de l’AME sous la forme d’une auto-saisine portée par le groupe de travail permanent « Inégalités sociales et territoriales de santé », en complément de son expertise en cours relative aux populations vulnérables, dont les conclusions seront publiées dans un rapport à paraitre en 2025.