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Mediapart
Droits voisins : Mediapart lance la bataille de la transparence contre Google
#medias #GAFAM #Google #Mediapart
Article mis en ligne le 30 avril 2024
dernière modification le 29 avril 2024

En raison des clauses de confidentialité imposées par Google, Mediapart n’encaissera pas l’argent que lui doit l’entreprise au titre de la propriété intellectuelle. Une question de confiance avec notre lectorat. Contre l’opacité des Gafam, un front uni du secteur est plus que jamais nécessaire.

En mars 2024, Mediapart aurait dû toucher une substantielle somme en contrepartie de l’usage, par Google, de nos articles, et donc de nos informations exclusives, sur son moteur de recherche. Mais en l’absence de transparence, nous avons stoppé l’arrivée du virement sur nos comptes.

Depuis avril 2019, en effet, une directive européenne relative aux « droits voisins » de la presse, transcrite dans la loi française en juillet de la même année, oblige les plateformes numériques à rétribuer, au nom de la propriété intellectuelle, les éditeurs et les agences de presse en échange de la diffusion d’extraits de leurs contenus, dont elles tirent des revenus, notamment publicitaires. (...)

Dans ce cadre, un accord a été signé en octobre 2023 avec Google au nom des adhérents de l’OGC-DVP, qui représentent aujourd’hui 305 éditeurs et agences, parmi lesquels, outre Mediapart, l’AFP, Radio France, France Télévisions, L’Équipe, Le Canard enchaîné, ainsi que des membres du Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM), de la Fédération nationale de la presse d’information spécialisée (FNPS) et du Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne (Spiil), dont Mediapart est membre fondateur. (...)

Mais une condition incontournable pour notre journal n’a pu être arrachée : la transparence sur le contrat signé et ses modalités d’application. Les clauses de confidentialité imposées par Google nous empêchent aujourd’hui de publiciser auprès de nos lectrices et de nos lecteurs non seulement la somme totale versée, mais aussi celle que Mediapart est en droit de percevoir.

Au regard du lien de confiance avec nos abonné·es, qui garantissent la quasi-totalité de nos revenus (98 %), et alors que nous publions chaque année nos comptes, il nous est apparu inconcevable d’encaisser le moindre centime, aussi légitime soit-il. (...)

La rétribution ne retourne pour autant pas à l’envoyeur (Google) : elle reste en réserve dans l’organisme de gestion collective, en attendant que le voile sur les chiffres soit levé. (...)

Après Google, des négociations sont en cours avec Facebook, Microsoft, X et LinkedIn : pour faire plier les mastodontes de la tech, il est urgent que la représentation nationale, via le Parlement, prenne le relais et complète la loi de 2019 en inscrivant ce refus du secret dans le marbre. Face aux dérives monopolistiques actuelles, dont pâtissent en priorité les structures les plus petites et les plus indépendantes, la régulation ne peut plus se faire attendre.
Contre la mainmise des Gafam et de l’IA sur l’information (...)

La course à l’intelligence artificielle ne fait que confirmer à quel point l’information est l’objet de toutes les convoitises.

Aujourd’hui, le danger pour la démocratie est patent. Les défis technologiques et économiques sont tels que nous, entreprises de presse, ne pouvons laisser ces mégapouvoirs reconfigurer à leur profit exclusif l’espace public, au détriment du droit de savoir. (...)

Pour une bataille collective

Contre la loi du plus fort, qui étouffe la presse indépendante et fausse la concurrence, il est de notre responsabilité de ne rien céder en matière d’indépendance et de transparence. C’est pourquoi, à rebours de certains journaux, Mediapart a toujours refusé de signer avec ces entreprises des accords commerciaux, qui n’ont rien à voir avec la rémunération de droits voisins, en ce qu’ils consacrent des partenariats financiers, techniques et parfois éditoriaux.

Rentable depuis treize ans, notre modèle économique sans publicité, sans aides publiques, sans mécènes et sans actionnaires, garantit, aux yeux de nos lectrices et de nos lecteurs, la production d’informations sans interférences, sans censure ni autocensure. (...)

Nous regrettons que certains confrères fassent cavalier seul plutôt que d’engager un rapport de force collectif. Pour n’en citer qu’un, Le Monde vient de conclure un partenariat pluriannuel bilatéral avec la société d’intelligence artificielle OpenAI, sans révéler le moindre élément financier, après avoir fait, dans un premier temps, de même avec Google et Facebook. Cet accord « permettra à la société de s’appuyer sur le corpus du journal pour établir et fiabiliser les réponses de son outil ChatGPT, moyennant une source significative de revenus supplémentaires », explique le journal. De l’autre côté de l’Atlantique, le New York Times a fait le choix inverse, en intentant un procès à ce créateur du logiciel ainsi qu’à Microsoft pour dénoncer le vol de sa propriété intellectuelle. (...)

Après les matières premières minérales, l’information de qualité ne doit pas devenir le nouvel eldorado de l’industrie extractiviste mondiale. (...)