
Êtes-vous frustré par le manque d’engagement de votre employeur en matière de développement durable ? Peut-être songez-vous à une « démission climatique » ou « climate quitting » en anglais : quitter votre emploi parce que vous vous inquiétez de l’impact de votre employeur sur l’environnement ou parce que vous voulez travailler directement sur les questions climatiques.
Si tel est le cas, vous n’êtes pas seul : la moitié des employés de la génération Z (personnes nées entre la fin des années 1990 et le début des années 2010) au Royaume-Uni ont déjà démissionné en raison d’un conflit de valeurs. 48 % des personnes âgées de 18 à 41 ans se disent prêtes à accepter une baisse de salaire pour travailler dans une entreprise qui s’aligne sur leurs valeurs en matière de développement durable.
Une enquête menée l’an passé montre que les salariés français du secteur ne sont pas moins préoccupés. Les compagnies pétrolières et gazières, en particulier, peinent par ailleurs à attirer de nouveaux talents, en partie parce qu’elles ont perdu de leur superbe avec la montée des enjeux climatiques, accusées de nourrir la crise. Et ce malgré leurs efforts pour minimiser leur rôle perçu dans le réchauffement climatique : la responsabilité reposerait parfois selon leur rhétorique sur les consommateurs, les entreprises ne faisant que répondre à la demande. (...)
Quitter son emploi n’est jamais une décision facile, et les démissionnaires que nous avons interrogés ont révélé qu’ils avaient en fait apprécié de nombreux aspects de leur travail. Ils étaient bien payés, trouvaient leur travail intellectuellement gratifiant et avaient des possibilités d’évolution de carrière et de voyage. Quelles ont été leurs motivations pour passer à l’acte ?
Urgence climatique
D’après les résultats d’une enquête réalisée en Grande-Bretagne en 2022, les personnes âgées de 16 à 29 ans constituent le groupe d’âge le plus enclin à se sentir « très inquiet » au sujet du changement climatique. Nos entretiens menés dans le cadre de recherches en cours ont confirmé cette tendance. (...)
Beaucoup ont mentionné le rapport 2021 de l’Agence internationale de l’énergie, qui affirme que les nouvelles explorations pétrolières et gazières doivent cesser immédiatement si nous voulons atteindre nos objectifs en matière de climat.
Les enquêtés ont également indiqué que les actions et les priorités de leurs employeurs ne correspondaient pas à cette urgence de la transition. Certains ont indiqué que leurs directions ne tenaient pas compte de ces avertissements et qu’ils revenaient même sur leurs engagements antérieurs en matière de climat. (...)
de nombreuses entreprises du secteur de l’énergie optent pour une rhétorique verte sans que les actes ne suivent et diluent leur responsabilité en matière d’action climatique. (...)
Les personnes que nous avons interrogées néanmoins ont fait état d’un sentiment croissant de malaise et de conflit de valeurs au travail, qui les ont amenées à envisager de partir. (...)
de nombreuses personnes interrogées dans le cadre de notre étude non publiée encore ont finalement décidé de démissionner à la suite de l’échec de leurs tentatives de changer les choses de l’intérieur. Certaines ont rejoint des groupes de travail sur le développement durable au travail, tandis que d’autres ont essayé d’occuper des postes axés sur la transition vers l’énergie propre. Mais, dans l’ensemble, ils n’ont pas eu l’impression d’avoir l’impact qu’ils souhaitaient. (...)
Une enquête menée cette année auprès de 10 000 professionnels de l’énergie de plus de 160 pays a révélé que 85 % des personnes interrogées envisageraient de changer de poste : la moitié de ces personnes ont déclaré qu’elles espéraient se tourner vers les énergies renouvelables.
Il existe en parallèle une communauté croissante d’organisations dont la mission est de promouvoir le « climate quitting » – notamment Work on Climate, Terra.do et My Climate Journey. Ces organisations proposent des services de mentorat, des réseaux de soutien, des répertoires d’offres d’emploi et des formations pour aider les personnes à trouver un poste dans le domaine du climat. (...)