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l’Humanité
Comptes fermés et refus de virement : ces banques françaises qui empêchent la solidarité avec la Palestine
#Israel #Gaza #Cisjordanie #genocide #famine #tortures #cessezleFeu #Banques
Article mis en ligne le 15 décembre 2025
dernière modification le 13 décembre 2025

Depuis plus d’un an, des associations, des collectifs et des particuliers engagés dans la solidarité avec le peuple palestinien dénoncent une série de blocages bancaires en France. Le phénomène touche des structures militantes, mais aussi des ONG et des citoyens agissant dans le cadre du droit humanitaire.

Depuis 2024, plusieurs témoignages indiquent que des plateformes de collecte comme GoFundMe ont, par ailleurs, bloqué des millions d’euros destinés aux civils palestiniens. Les organismes financiers opposent à chaque fois à leurs clients l’application des règles de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT). Pour les associations, collectifs et personnes concernées, ces pratiques s’inscrivent surtout dans une logique de criminalisation de la solidarité avec la lutte du peuple palestinien.

Les témoignages étaient déjà nombreux fin 2024, provenant notamment de clients de la Banque postale et de la Caisse d’épargne qui auraient subi le blocage de plusieurs transferts d’argent vers la Cisjordanie et Gaza. Sollicitées par l’Humanité, les deux banques n’ont pas souhaité répondre.

Mais l’Association France Palestine solidarité (Afps) le confirme. « Ce qui passait il y a quelques années ne passe plus. Chaque envoi doit désormais être adossé à une convention détaillée, avec budget et objectifs », explique Anne Tuaillon, présidente nationale de l’association.
Entre « consignes implicites » et « frilosités locales »

Certaines antennes locales font part, par ailleurs, de difficultés quand elles cherchent à ouvrir un compte.

Mais l’Association France Palestine solidarité (Afps) le confirme. « Ce qui passait il y a quelques années ne passe plus. Chaque envoi doit désormais être adossé à une convention détaillée, avec budget et objectifs », explique Anne Tuaillon, présidente nationale de l’association.
Entre « consignes implicites » et « frilosités locales »

Certaines antennes locales font part, par ailleurs, de difficultés quand elles cherchent à ouvrir un compte. (...)

Le cas de l’Union juive française pour la paix (UJFP) illustre parfaitement cette dérive. Elle aide depuis plusieurs années une coopérative agricole gazaouie qui a bien failli être privée des apports financiers de l’association, cette dernière s’étant tournée vers un autre organisme bancaire. Car, après vingt ans de relation avec le Crédit coopératif, en juillet 2024 son compte a été définitivement fermé.

« Sans explication, sans rien, dénonce Pierre Stambul, porte-parole de l’organisation juive antisioniste. La banque a reçu 4 000 lettres de protestation. On lui a donné toutes les preuves de traçabilité : l’identité de notre correspondant à Gaza, les rapports d’utilisation des fonds. Rien n’y a fait. »

Pour l’UJFP, aucune des réponses fournies par le Crédit coopératif ne « tient debout », son porte-parole dénonçant « une logique de suspicion infamante » et « un étranglement financier délibéré de l’aide à Gaza » qui rend la banque « complice de génocide ». (...)

Interrogé par l’Humanité, Pascal Pouyet, directeur général du Crédit coopératif, se défend : « Nous accompagnons des ONG partout dans le monde, y compris en Palestine. Mais nous devons garantir la traçabilité des flux. Si elle n’est pas suffisante, nous ne pouvons pas poursuivre. »

Concernant l’UJFP, il affirme que la procédure de clôture du compte a été menée après « neuf mois d’échange et de dialogue », bien au-delà du délai légal, pour démontrer une tentative de conciliation. Néanmoins, il refuse d’en expliquer les motifs, invoquant une « position très asymétrique » due à la réglementation LCB-FT, qui lui « interdit d’en parler ».

M. Pouyet affirme, en outre, n’avoir subi aucune « pression ni de l’État français, ni de la Banque de France, ni de la Commission européenne, ni d’Israël, ni des États-Unis » pour prendre sa décision, qui se justifie, selon lui, par la seule application du cadre légal.

Il en veut pour preuve les relations entretenues par la banque avec l’ONG Handicap international, dont les transferts vers la Palestine continuent. Une réponse qui laisse l’UJFP sceptique. « S’il n’y a pas de directive spéciale concernant la Palestine, alors pourquoi ces blocages ciblés existent-ils ? » questionne Pierre Stambul.

Au Parlement, la sénatrice écologiste Raymonde Poncet-Monge a interrogé le ministre de l’Économie sur ces questions. « Existe-t-il une directive visant les associations pro-palestiniennes ? » Le gouvernement a répondu par la négative. Pour lui, seules s’appliquent les règles générales de vigilance financière. La députée LFI Élisa Martin a, pour sa part, sondé la Banque de France.

Cette dernière lui a fait la même réponse que celle donnée à l’Humanité (...)

Ces dénégations sont loin d’apaiser les inquiétudes. « Si aucune consigne n’existe, pourquoi ces blocages se multiplient-ils depuis 2024 ? interroge, de nouveau, Anne Tuaillon. Nous sommes face à une zone grise où la peur du risque se transforme en interdiction de fait. »
De prétendues « petites opérations » suspectes (...)

La colonisation israélienne toujours financée par les banques françaises

Car, pendant que ces militants doivent justifier 30 euros envoyés à une traductrice, les grands groupes bancaires, eux, continuent de financer des entreprises impliquées dans la colonisation israélienne. Le dernier rapport de Don’t Buy Into Occupation est, à ce titre, accablant. (...)

On y retrouve aussi les acteurs financiers directement impliqués dans les blocages qui concernent les acteurs de la solidarité en France. La BPCE, maison mère du Crédit coopératif, a investi à raison de 3,33 milliards d’euros, le Crédit mutuel, 2,35 milliards et La Banque postale, plus de 1 milliard.

Ces fonds soutiennent des géants comme Alstom, Siemens, Caterpillar, Airbnb ou Booking.com, tous cités par l’ONU pour leur rôle dans l’implantation illégale de colonies israéliennes. « Les institutions financières ont la responsabilité d’éviter de faciliter les violations des droits humains », rappelle le rapport. Une responsabilité que les banques semblent moins zélées à respecter que lorsqu’il s’agit de la prétendue conformité réglementaire entraînant la fermeture des comptes de militants solidaires. (...)

On y retrouve aussi les acteurs financiers directement impliqués dans les blocages qui concernent les acteurs de la solidarité en France. La BPCE, maison mère du Crédit coopératif, a investi à raison de 3,33 milliards d’euros, le Crédit mutuel, 2,35 milliards et La Banque postale, plus de 1 milliard.

Ces fonds soutiennent des géants comme Alstom, Siemens, Caterpillar, Airbnb ou Booking.com, tous cités par l’ONU pour leur rôle dans l’implantation illégale de colonies israéliennes. « Les institutions financières ont la responsabilité d’éviter de faciliter les violations des droits humains », rappelle le rapport. Une responsabilité que les banques semblent moins zélées à respecter que lorsqu’il s’agit de la prétendue conformité réglementaire entraînant la fermeture des comptes de militants solidaires. (...)

Au-delà des chiffres, c’est la liberté d’association qui est attaquée. (...)

En clair, dans un contexte où la Cour internationale de justice juge l’occupation israélienne des territoires palestiniens illégale et où l’ONU alerte sur le risque de génocide des Gazaouis, les organismes bancaires français ferment, « par peur du risque », des comptes d’organismes et de personnes tentant de venir en aide aux Palestiniens, mais continuent d’alimenter un système de colonisation jugé illégal par le droit international.

Face à cela, élus, ONG et citoyens solidaires réclament des règles claires, une transparence accrue et la fin des financements complices. (...)