
Bluesky est actuellement sous les feux des projecteurs. L’effet boule de neige semble enclenché et on peut voir un nombre croissant de comptes importants partir de X pour des cieux plus cléments. Chez Science, on lit la même chose au sujet de la communauté scientifique.
Bluesky attire pour plusieurs raisons, en plus du critère classique de nouvel horizon. D’une part, des fonctions de blocage et de modération nettes et précises. D’autre part, l’affichage chronologique par défaut des publications, loin des algorithmes poussant à l’engagement. Et que cet engagement se fasse sur les impressions de publicités ou sur les réactions de comptes Premium n’y change rien.
(...) Ce protocole a été pensé initialement pour permettre un fonctionnement décentralisé et fédéré, comme le propose Mastodon. Mais peut-on dire que Bluesky est réellement décentralisé ? La réponse n’est pas si simple. (...)
Lorsque l’on parle de Bluesky, on évoque le réseau dans son intégralité. Mais ce réseau se compose en fait de trois parties, comme l’entreprise l’explique dans sa documentation : les serveurs, les relais et les vues d’applications.
Les serveurs constituent les réservoirs de données personnelles. Un utilisateur peut y stocker toutes ses informations, dont ses publications et tout ce qui sert à l’identifier (nom de connexion, mots de passe, clés cryptographiques) ou encore la liste des personnes suivies. Les PDS (Personal Data Server) gèrent également la mise en relation avec les services en fonction des requêtes. Il peut y avoir autant de PDS que l’on souhaite et tout le monde peut en créer un. En théorie.
Sur les relais en revanche, tout change. Leur mission est de parcourir tous les PDS, d’agréger et indexer le contenu pour en produire un énorme flux unique de données en streaming, souvent appelé firehose dans le jargon. Ce flux est ensuite mis à disposition de tout l’écosystème atproto (protocole AT). Les relais agissent comme un moteur de recherche. (...)

Quant aux vues d’application (App View), elles constituent la face visible de l’iceberg. Une App View est ce qui permet d’afficher des informations exploitables à partir du flux agrégé. Elle réalise un assemblage à partir des critères définis aussi bien par la requête que les différents paramètres. Par exemple, afficher le flux personnel ou les résultats d’une recherche, tout en masquant certains résultats, par exemple provenant des personnes bloquées.
Que peut-on faire soi-même ?
Certaines actions peuvent être entreprises par les utilisateurs, du moins sur le papier. Monter un serveur personnel est le plus simple, Bluesky fournissant de nombreuses informations sur GitHub et jusqu’à un conteneur pour simplifier l’installation. Mais, comme son nom l’indique, un serveur de données personnelles ne peut héberger que ses propres informations. Il n’est pas question de créer une instance comme le fait Mastodon. On ne peut y inviter personne.
Sur les relais, c’est nettement plus compliqué.
Dans sa documentation, Bluesky explique que tout le monde peut en héberger un, mais que c’est « un service assez gourmand en ressources ». Gourmand comment ? Très vorace en fait (...)
Bluesky contrôle notamment deux éléments importants : les DID:PLC et les DM. Les premiers représentent, dans les grandes lignes, les identifiants des utilisateurs. Les seconds sont les messages privés, qui ne sont pas pris en charge par le protocole AT. Les données correspondantes ne sont donc pas présentes dans les PDS, mais gérées directement par Bluesky de manière séparée.
Bluesky n’est ni fédéré, ni décentralisé… pour l’instant (...)
On ne peut pas dire que Bluesky soit actuellement décentralisé, et encore moins fédéré. Il y a bien un centre, et il est géré par l’entreprise Bluesky. Sans son relai, rien ne fonctionne. Chaque serveur de données personnelles ne sert ainsi que comme petit réservoir pour les informations d’une personne, incapable de fonctionner par lui-même.
Pour Gavin Anderegg, ce n’est ni bien ni mauvais : ce n’est que le fonctionnement actuel, qui pourrait changer. Il estime en effet que l’équipe en charge du réseau se dirige petit à petit vers la décentralisation, mais que la tâche reste immense au vu des choix techniques. En outre, il souligne la grande ouverture du protocole, qui permet de voir l’intégralité du flux, puisque toutes les informations y sont publiques.
Cet aspect du réseau est d’ailleurs moins connu et peut avoir toute son importance : rien de ce que vous publiez sur Bluesky n’est privé. (...)
Les profils privés n’existent pas sur le réseau. (...)
