
La Cour suprême américaine a retoqué jeudi la décision d’une cour d’appel de la Nouvelle-Orléans, qui avait rétabli en 2023 plusieurs des restrictions d’accès à la mifépristone, une pilule utilisée pour les IVG médicamenteuses.
Dans leur arrêt unanime, les neuf juges de la cour à majorité conservatrice dénient l’"intérêt à agir", condition pour saisir la justice, des plaignants - des associations de médecins ou des praticiens hostiles à l’IVG qui ne prescrivent ni n’utilisent la pilule mifépristone, utilisée dans la majorité des avortements dans le pays. Ils annulent donc la décision d’appel, qu’ils avaient de toute façon suspendue (...)
Une cour d’appel, composée de juges ultraconservateurs, avait rétabli en 2023 plusieurs des restrictions d’accès à la mifépristone, pilule utilisée pour les IVG médicamenteuses, levées par l’Agence américaine des médicaments (FDA) depuis 2016.
"La lutte continue"
"Les plaignants n’ont pas démontré que l’assouplissement des règles de la FDA leur porterait probablement préjudice dans les faits", écrit dans sa décision, au nom de la Cour suprême, le juge Brett Kavanaugh. "Pour cette raison, les tribunaux fédéraux ne sont pas la voie adéquate pour répondre aux inquiétudes des plaignants au sujet des actions de la FDA", ajoute-t-il, soulignant qu’ils peuvent en saisir le pouvoir exécutif ou législatif.
Le président démocrate Joe Biden, qui a fait de la protection du droit à l’avortement un axe de sa campagne pour l’élection de novembre face à son prédécesseur républicain Donald Trump, a pris acte de la décision mais souligné que "la lutte continuait". (...)
"Cette décision ne change pas le fait que des millions d’Américaines vivent aujourd’hui sous de cruelles interdictions d’avortement à cause de Donald Trump", a renchéri sa vice-présidente Kamala Harris. "Ni les menaces sur les avortements médicamenteux", a-t-elle ajouté. (...)
L’institut Guttmacher, un centre de recherche favorable au droit à l’avortement dont les études font autorité, s’est dit "soulagé" que la Cour suprême ait pris "la seule décision raisonnable" possible sur la mifépristone, mais a déploré que cette plainte "de mauvaise foi et sans base factuelle ou scientifique" n’ait pas été rejetée bien avant. "Nous devons rester vigilants. Le mouvement anti-avortement poursuit sans relâche son objectif d’interdire l’avortement à l’échelle nationale", a ajouté Destiny Lopez, coprésidente de l’institut Guttmacher.
La présidente du Center for Reproductive Rights, (Centre pour les droits reproductifs), Nancy Northup, a salué la décision, mais également estimé que "ce dossier sans fondement n’aurait jamais dû arriver aussi loin". "Malheureusement, les attaques contre les pilules abortives ne s’arrêteront pas là", a-t-elle prévenu, soulignant que le mouvement anti-avortement était "prêt à tout pour en bloquer l’accès". (...)
Blocage au Sénat d’un texte sur la FIV
Invoquant des risques potentiels pourtant écartés par le consensus scientifique, la décision d’appel, si elle avait été confirmée, aurait ramené la limite de dix semaines de grossesse à sept, interdit l’envoi des comprimés par voie postale et rendu de nouveau obligatoire la prescription exclusivement par un médecin.
Près des deux tiers des avortements (63 %) aux États-Unis en 2023 ont été réalisés par voie médicamenteuse, selon l’institut Guttmacher.
Sur un autre front de la bataille pour les droits reproductifs, les sénateurs républicains ont bloqué jeudi une proposition de loi démocrate pour protéger l’accès à la fécondation in vitro (FIV). "Les amis de Trump au Sénat montrent une fois de plus qu’ils ne reconnaissent pas aux femmes le droit fondamental de prendre des décisions pour leur santé et leur propre corps", a réagi Kamala Harris.