
Les agriculteurs et agricultrices produisent suffisamment pour nourrir le monde entier, contrairement à ce qu’avancent la FNSEA et certains éditorialistes. Le système agricole est bien défaillant, mais autoriser la culture des jachères ne fera qu’aggraver le problème.
L’action menée ces derniers jours par les syndicats agricoles FNSEA et Jeunes Agriculteurs a été reproduite dans des centaines de communes françaises, avec deux mots d’ordre : « On marche sur la tête » et « Pas de transition sous pression ».
« Le mouvement veut dénoncer les incohérences politiques auxquelles est soumise l’agriculture française. “Toujours plus de normes, d’interdictions, de restrictions à respecter’’ », a ainsi expliqué la journaliste de L’Opinion, Emmanuelle Ducros, lors d’une chronique sur Europe 1, le 22 novembre dernier. (...)
L’idée que la France doit produire plus car des millions de gens meurent de faim, est un poncif des tenants de l’agriculture productiviste. Certes, la faim ne cesse de croître partout dans le monde. Mais le paradoxe est le suivant : alors qu’environ 820 millions de personnes dans le monde se trouvent en situation d’insécurité alimentaire, la production de denrées agricoles permettrait aujourd’hui d’en nourrir douze milliards, résume Olivier De Schutter dans son dernier ouvrage, Changer de boussole. La croissance ne vaincra pas la pauvreté (éditions Les Liens qui libèrent, 2023). En France, près d’une personne sur trois a du mal à se payer trois repas par jour. Pour les 9 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté, la nourriture est potentiellement une variable d’ajustement. Dans le même temps, d’après l’Ademe, 10 millions de tonnes de nourriture consommable sont gaspillées chaque année – soit 150 kilogrammes par personne et par an. Comment expliquer cette absurdité ? (...)
Un système agricole défaillant (...)
« Le problème n’est plus la production. L’insécurité alimentaire est aujourd’hui essentiellement liée à des questions de pouvoir d’achat et de protection sociale », précise Olivier De Schutter dans un entretien à Politis. « Les agriculteurs et agricultrices produisent plus qu’assez pour nourrir le monde entier », appuie un rapport d’Oxfam publié en septembre 2022. Les données publiées en novembre 2023 par la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) attestent qu’entre les niveaux de production prévus et les stocks disponibles, il y a suffisamment de céréales disponibles en 2023 pour répondre à la demande mondiale. Toujours d’après la FAO, la disponibilité alimentaire à l’échelle mondiale est d’environ 2950 kilocalories (kcal) par personne et par jour sur la période 2018-2020, quand les apports énergétiques recommandés sont en moyenne de 2360 kcal par jour.
Dans les faits, une alimentation correcte demeure inaccessible aux populations les plus pauvres, dont une partie de la paysannerie elle-même, pointe le rapport « Qui veille au grain ? », publié par Les Greniers d’Abondance. (...)
« Le problème n’est plus la production. L’insécurité alimentaire est aujourd’hui essentiellement liée à des questions de pouvoir d’achat et de protection sociale », précise Olivier De Schutter dans un entretien à Politis. « Les agriculteurs et agricultrices produisent plus qu’assez pour nourrir le monde entier », appuie un rapport d’Oxfam publié en septembre 2022. Les données publiées en novembre 2023 par la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) attestent qu’entre les niveaux de production prévus et les stocks disponibles, il y a suffisamment de céréales disponibles en 2023 pour répondre à la demande mondiale. Toujours d’après la FAO, la disponibilité alimentaire à l’échelle mondiale est d’environ 2950 kilocalories (kcal) par personne et par jour sur la période 2018-2020, quand les apports énergétiques recommandés sont en moyenne de 2360 kcal par jour.
Dans les faits, une alimentation correcte demeure inaccessible aux populations les plus pauvres, dont une partie de la paysannerie elle-même, pointe le rapport « Qui veille au grain ? », publié par Les Greniers d’Abondance. (...)
Dans son livre La France qui a faim (Seuil, 2023), l’anthropologue Bénédicte Bonzi décortique les défaillances du système. Ses conclusions sont claires : « La production de nourriture ne fait pas défaut. C’est la répartition qui est inégalitaire. »
Les jachères, dans le viseur de la FNSEA
S’attaquer aux terres agricoles laissées en jachère fait pourtant partie des priorités de la FNSEA. La France s’est faite le relais de cette demande en portant la proposition le 20 novembre 2023, en conseil des ministres de l’Agriculture de l’Union européenne, de déroger à cette obligation de la politique agricole commune. (...)
« Le problème n’est plus la production. L’insécurité alimentaire est aujourd’hui essentiellement liée à des questions de pouvoir d’achat et de protection sociale », précise Olivier De Schutter dans un entretien à Politis. « Les agriculteurs et agricultrices produisent plus qu’assez pour nourrir le monde entier », appuie un rapport d’Oxfam publié en septembre 2022. Les données publiées en novembre 2023 par la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) attestent qu’entre les niveaux de production prévus et les stocks disponibles, il y a suffisamment de céréales disponibles en 2023 pour répondre à la demande mondiale. Toujours d’après la FAO, la disponibilité alimentaire à l’échelle mondiale est d’environ 2950 kilocalories (kcal) par personne et par jour sur la période 2018-2020, quand les apports énergétiques recommandés sont en moyenne de 2360 kcal par jour.
Dans les faits, une alimentation correcte demeure inaccessible aux populations les plus pauvres, dont une partie de la paysannerie elle-même, pointe le rapport « Qui veille au grain ? », publié par Les Greniers d’Abondance. (...)
Dans son livre La France qui a faim (Seuil, 2023), l’anthropologue Bénédicte Bonzi décortique les défaillances du système. Ses conclusions sont claires : « La production de nourriture ne fait pas défaut. C’est la répartition qui est inégalitaire. »
Les jachères, dans le viseur de la FNSEA
S’attaquer aux terres agricoles laissées en jachère fait pourtant partie des priorités de la FNSEA. La France s’est faite le relais de cette demande en portant la proposition le 20 novembre 2023, en conseil des ministres de l’Agriculture de l’Union européenne, de déroger à cette obligation de la politique agricole commune. (...)
Pourtant, « la science témoigne clairement du rôle essentiel des jachères : amélioration de la qualité des eaux, lutte contre l’érosion, restauration des sols, protection intégrée des cultures, séquestration du carbone et bien sûr, accueil de la faune sauvage », alertait Alain Bougrain-Dubourg, président de la Ligue de protection des oiseaux, dès mai 2022. (...)
Au sein même de la profession agricole, cultiver les jachères n’est pas une option qui fait consensus. (...)
Produire plus d’agrocarburants
En réalité, si la FNSEA tient à cultiver ces terres en jachère, ce n’est pas tant pour nourrir les humains que les voitures ! « Ces surfaces pourraient permettre de produire, particulièrement la biomasse nécessaire pour la transition énergétique », précise ainsi le syndicat dans son communiqué. Entendez par là : produire des agrocarburants.
Or, c’est précisément ce détournement de la vocation nourricière des terres agricoles qui participe à la crise alimentaire mondiale. (...)
D’après le Financial Times, la quantité totale de cultures utilisées annuellement pour les agrocarburants équivaut à la consommation de calories de 1,9 milliard de personnes. Chaque jour, l’Europe transforme 10 000 tonnes de blé – l’équivalent de 15 millions de miches de pain – en éthanol destiné aux voitures, et 10 % de sa production céréalière est utilisée comme carburant. (...)