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France24
Aide à mourir : les points clés du texte de loi qui font débat
#mort #findevie #euthanasie #suicideassiste #soinspalliatifs
Article mis en ligne le 15 mai 2025
dernière modification le 14 mai 2025

Après son adoption en commission, la proposition de loi sur l’aide à mourir arrive lundi à l’Assemblée nationale. France 24 examine les principaux points de crispation autour de ce texte en donnant la parole à ses soutiens et à ses opposants.

Soutenu par la majorité des représentants de la gauche et des groupes macronistes, et âprement combattu par ceux du Rassemblement national et du parti Les Républicains, il permettrait aux malades souffrant d’une "affection grave et incurable" qui "engage le pronostic vital, en phase avancée ou terminale" et ne supportant plus leurs souffrances, de recevoir ou de s’administrer une substance létale. (...)

"Aide à mourir" ou "euthanasie" et "suicide assisté" ?

Si les deux associations s’opposent frontalement sur la proposition de loi, elles se rejoignent néanmoins sur la question du vocabulaire. "Il faut appeler un chat, un chat et nous parlons ici d’euthanasie et de suicide assisté. Il y a quelque chose de trompeur dans le terme ’aide à mourir’. On s’aperçoit en discutant avec les gens qu’il y a énormément de confusion et que la plupart des Français ignorent la différence entre suicide assisté et euthanasie", souligne Tugdual Derville, délégué général d’Alliance Vita. (...)

Accès trop restreint ou trop élargi ?

La proposition de loi sur l’aide à mourir définit, pour qu’un patient soit éligible, cinq critères cumulatifs : être âgé d’au moins 18 ans ; être Français ou résident en France ; être atteint d’une "affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, qui engage le pronostic vital, en phase avancée ou terminale" ; cette dernière provoquant une "souffrance physique ou psychologique" réfractaire aux traitements ou insupportable ; et être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée.

Ce dernier point, qui exclut les malades atteints de maladies psychiatriques ou neurodégénératives comme Alzheimer, est contesté par l’ADMD. "On constate que c’est un des textes les plus restrictifs en Europe", estime Philippe Lohéac, qui aimerait qu’un dispositif permette "de poser les conditions d’une aide à mourir au moment du diagnostic de la maladie".

Au contraire, Tugdual Derville de l’Alliance Vita voit dans la proposition de loi d’Olivier Falorni un texte "qui va dans le sens de la facilitation de l’accès au droit à mourir", avec trop peu de garde-fous pour éviter les abus et des décisions prises sur un coup de tête (...)

"Pronostic vital" ou "qualité du reste à vivre" ?

La proposition de loi votée en commission évoque une "affection grave et incurable [...] qui engage le pronostic vital, en phase avancée ou terminale". Dans sa version initiale, le texte prévoyait que le pronostic vital soit engagé "à court ou moyen terme", mais il est particulièrement compliqué de savoir ce que recouvre cette notion de "moyen terme".

Un avis de la Haute Autorité de Santé (HAS) sur le sujet a été rendu le 6 mai. La HAS juge "impossible", faute de consensus médical, de déterminer qui pourrait bénéficier d’une aide à mourir en se basant sur un pronostic vital engagé "à moyen terme" ou sur une "phase terminale" de maladie, mais elle suggère de prendre en compte "la qualité du reste à vivre" de la personne. (...)

Tugdual Derville concède qu’il est impossible pour les médecins de faire des pronostics fiables, mais critique le manque de critère "objectif" pour juger de "la qualité du reste à vivre" d’un patient. "On essaie de faire entrer l’idée que des vies ne valent pas la peine d’être vécues. C’est un basculement qui nous inquiète", affirme-t-il, regrettant qu’aucun avis de psychiatre ou de psychologue ne soit exigé. (...)

L’éligibilité décidée par une personne ou de façon collégiale ?

Autre sujet qui interroge, jusqu’au sein du gouvernement, celui de la collégialité de la décision. Le texte prévoit pour l’instant que le médecin sollicité par le patient décide seul si ce dernier est éligible, après avoir recueilli l’avis d’au moins un autre médecin et un autre soignant, le tout dans un délai de 15 jours.

L’ADMD, qui juge ce délai trop long et milite pour le ramener à quatre jours, ne souhaite pas qu’une décision collégiale soit prise. Pour l’association, le médecin sollicité doit se contenter de vérifier que les critères d’éligibilité sont bien remplis. "La décision doit appartenir au patient. C’est sa vie, c’est sa souffrance", souligne Philippe Lohéac.

À l’inverse, Tugdual Derville de l’Alliance Vita trouve le délai de 15 jours trop court et déplore l’absence de collégialité de la décision concernant l’éligibilité du patient. (...)

En l’état, l’article 14 de la proposition de loi stipule que "les professionnels de santé qui sont disposés à participer à la mise en œuvre" de l’aide à mourir "se déclarent" à la commission de contrôle et d’évaluation. Les noms des médecins ne seront toutefois accessibles qu’aux seuls médecins.

Compte tenu de la configuration de l’Assemblée nationale, la proposition de loi devrait a priori être adoptée par les députés, mais le processus législatif, en l’absence de procédure accélérée, pourrait s’étendre de longs mois. Car le texte devra ensuite être examiné par le Sénat, tenu par une droite beaucoup moins favorable à l’aide à mourir.