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Mediapart
A la FNSEA, le train de vie hors sol des dirigeants
#agriculture #FNSEA #UE #Macron
Article mis en ligne le 3 février 2024
dernière modification le 2 février 2024

Le syndicat majoritaire du monde agricole dénonce régulièrement les conditions de vie de plus en plus difficiles du secteur. Mais ses cadres dirigeants se sont rarement portés aussi bien. Mediapart s’est plongé dans les arcanes de la FNSEA. Premier volet de notre enquête.

À trois jours de l’ouverture du Salon de l’agriculture, la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) a tracé les grandes lignes thématiques de cette édition 2020 : faiblesse des revenus et retraites agricoles, changement climatique et lutte contre les zones de non-traitement aux pesticides (ZNT) sont au cœur de ses préoccupations. (...)

Si le secteur recouvre des situations très diverses, une grande partie de la profession, de fait, va mal. Selon l’Insee, le revenu moyen des agriculteurs exploitants une fois déduits leurs déficits était de 1 210 euros par mois en 2017.

Du côté des dirigeants salariés du syndicat majoritaire des exploitants agricoles, nulle menace en revanche sur le pouvoir d’achat. C’est plutôt l’inverse. Selon les informations de Mediapart, le train de vie de la direction de la FNSEA est allé crescendo ces derniers temps, tandis qu’un nouveau poste a été trouvé pour l’ancienne directrice générale, Catherine Lion. Officiellement retraitée depuis octobre 2019, cette dernière, désormais conseillère à temps partiel, touche aujourd’hui des revenus proches de ceux, déjà importants, qu’elle percevait quand elle dirigeait le syndicat. (...)

Dans les comptes de l’organisme financé en grande partie par les cotisations syndicales de ses adhérents et des subventions publiques (6,3 millions d’euros pour les premières via les fédérations départementales FDSEA et les « Associations spécialisées » ; 4,2 millions d’euros pour les secondes), nulle amélioration du résultat ne vient justifier ce nouveau traitement salarial : le déficit de la FNSEA se creuse d’année en année (...)

Les niveaux de salaire de la direction du syndicat historique du monde agricole, qui compte près de 120 salariés, n’ont pourtant rien de modeste. Ils sont déjà bien supérieurs à ce qui se fait dans des entreprises de taille équivalente, mais aussi à ce qui se pratique dans les autres syndicats. Insuffisant, semble-t-il, pour le nouveau directeur général, Clément Faurax… Prenant ses fonctions en avril 2019, ce dernier a décidé une augmentation immédiate sur la plupart des postes de direction allant, selon les cas, de 5 à 30 % du montant de leur rémunération. (...)

Lui-même, devenant directeur général après avoir été directeur adjoint, s’est octroyé une hausse de 22 % après avoir déjà connu une revalorisation de près de 8 % en 2017. Il émarge aujourd’hui à 13 400 euros brut mensuels, soit 3 300 euros de plus que le ministre de l’Agriculture qui est rémunéré, comme les autres membres du gouvernement, 10 100 euros brut chaque mois. (...)

En un mois, l’équivalent de ce que touche un exploitant agricole sur une année (...)

Catherine Lion touche, à partir d’avril, 14 900 euros brut mensuels sur un poste de conseillère à temps partiel – pour 14 800 euros de salaire lorsqu’elle était directrice générale à temps plein. Autrement dit, pour trois jours de travail par semaine, l’équivalent de ce que touche en moyenne un exploitant agricole sur une année entière… (...)

Catherine Lion n’est jamais partie. Elle est toujours salariée à temps partiel du syndicat, pour une rémunération de 7 100 euros brut mensuels, et elle cumule cet emploi avec sa pension de retraite – ce qui est autorisé par la loi. La retraite de l’ex-DG de la FNSEA s’élevant, d’après la direction du syndicat, à environ 37 % de son ancien salaire, Catherine Lion touche, à l’heure où nous écrivons ces lignes, un total retraite + salaire de plus de 12 500 euros par mois.

Pour calculer le montant de sa pension, Catherine Lion a par ailleurs bénéficié, là aussi, des ressources de la FNSEA. C’est le cabinet « France Retraite », facturé 4 200 euros à l’organisme syndical, qui a missionné un gestionnaire de retraite pour traiter son dossier. (...)

Le cumul des mandats et des rémunérations n’est pas propre à l’ancienne directrice générale. Au sein du syndicat majoritaire, plusieurs cadres dirigeants et élus de premier plan y ont recours, multipliant de ce fait leurs sources de revenus. (...)

Dans un communiqué de presse diffusé quelques heures après la mise en ligne de notre article, la FNSEA ne dément aucune de nos informations. « La FNSEA assume pleinement les niveaux de rémunération de ses cadres dirigeants », peut-on lire dans son texte. (...)

Cette politique salariale favorable à la direction du syndicat ne ruisselle pas. À la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles, l’écart salarial va de un à sept au sein des effectifs.