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À France Info, le malaise de journalistes “déstabilisés” par le management et les choix éditoriaux
#medias #FranceInfo #management
Article mis en ligne le 1er juillet 2025
dernière modification le 29 juin 2025

Fin mai, les syndicats évoquaient une fin de saison “d’une grande brutalité”. Les salariés rencontrés par “Télérama” questionnent les décisions et les méthodes de la direction. Laquelle vante, au contraire, un “dialogue de qualité”.

Remaniements en série sur l’antenne de France Info. À la rentrée, des rendez-vous quotidiens vont disparaître (l’entretien médiatique de 9h50, la demi-heure culturelle Tout public, l’invité de 18h32), d’autres devenir hebdomadaires (L’invité éco, Franceinfo junior). Le 5h-7h s’arrête pour permettre à la tranche suivante, la matinale, de démarrer à 6 heures. Allongé mais délesté de certaines chroniques, le prime time matinal n’accueille, à ce stade, qu’un seul nouveau billet, consacré aux réseaux sociaux et incarné par Constance Vilanova, entendue sur Mouv’. « L’antenne de France Info doit être “chamboulable”, notre vocation première est de traiter l’actu chaude sans buter sur quoi que ce soit qui nous en empêcherait », justifie le directeur de la rédaction, Richard Place, qui assume vouloir mieux répartir les forces internes, en les fléchant notamment vers le reportage. Le week-end, les séquences valsent ; des nouveautés se dessinent. Exit, par exemple, les chercheurs François Gemenne et Jean Viard ; bienvenue au trentenaire Bill François, biophysicien vulgarisateur repéré dans une vidéo devenue virale de Jamel Debbouze.

Dans cette station perçue comme une « radio très bosseuse et Bisounours », certains journalistes dénoncent cependant des entretiens « inattendus » sur leur avenir, au ton parfois jugé « cassant ». (...)

Le style cash d’Agnès Vahramian

Ce chambardement porte la marque d’Agnès Vahramian, la nouvelle patronne, qui depuis son arrivée en septembre ébranle la station, tant sur le fond que sur la forme. Fin mai, un tract de la CGT et du SNJ-CGT a dénoncé une fin de saison « d’une grande brutalité », des interruptions de collaboration extérieure apprises « entre deux portes » et des changements de poste « décidés sans concertation ». « Nous avons reçu des alertes sur le ton cavalier des discussions », explique Lionel Thompson, élu SNJ-CGT. La direction, elle, défend une « co-construction », un « dialogue de qualité » avec plusieurs propositions faites aux salariés en CDI. (...)

Si certains apprécient « l’accessibilité » de la nouvelle patronne, d’autres la jugent trop « intrusive » sur l’éditorial. (...)

« C’est rageant, car sur le fond du projet on est d’accord, son énergie est positive, mais ses méthodes sont contre-productives. J’ai rarement senti les gens aussi déstabilisés, plusieurs sont allés à la médecine du travail. Je n’ai jamais connu une direction avec aussi peu d’empathie. » (...)

Dans cette ambiance, certains à la rédaction regrettent que le directeur Richard Place, figure de la maison, n’aide pas à arrondir les angles. « Quand quelque chose lui déplaît, il peut avoir des mots excessifs, une brutalité froide qui déstabilise les gens. Certains débriefs, c’est du tir à la carabine ! », estime une journaliste. « Le problème avec ce duo, c’est qu’on a deux bad cops », juge un salarié. S’expliquant en CSE le 22 mai, les deux patrons se sont déclarés « bienveillants ».

Aujourd’hui, Richard Place reste sur cette ligne. « Je suis direct, je tranche car c’est mon travail, mais je ne suis pas brutal. Si certains ont ce ressenti, je le regrette. » Le 18 juin, après avoir présenté la grille de rentrée en interne, Agnès Vahramian s’est aussi défendue. Excédée, elle a confié en longueur son agacement devant des équipes médusées. « Ce que je lis sur moi est faux, et vous savez quoi, j’en ai assez du portrait qu’on dresse de moi […] ça suffit ! Est-ce que je hurle sur les gens ? Non. » La patronne a assuré avoir développé « un sentiment d’appartenance » vis-à-vis de la station et espère désormais une rentrée « plaisir ». La promesse pourrait se heurter au projet de holding de Rachida Dati, qui prévoit d’unir la radio aux équipes numériques et télévisées de Franceinfo dans une même filiale. Une perspective que la rédaction voit d’un mauvais œil…