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Mediapart
Violences conjugales : l’Assemblée nationale vote une aide d’urgence pour les victimes
#Violences #Femmes #assembleenationale
Article mis en ligne le 18 janvier 2023
dernière modification le 17 janvier 2023

Les députés ont approuvé à l’unanimité, lundi, la création d’une aide exceptionnelle d’urgence à destination des femmes victimes de violences. Au Palais-Bourbon, le texte a été porté par un député du Rassemblement national, permettant au parti d’extrême droite de s’attribuer une victoire politique en trompe-l’œil. 

Dans un hémicycle où les débats houleux s’enchaînent depuis six mois, la lutte contre les violences faites aux femmes engendre de rares moments de consensus transpartisan. Après l’adoption le 2 décembre d’une proposition de loi créant des juridictions spécialisées contre les violences intrafamiliales, l’Assemblée nationale a voté lundi 16 janvier une proposition de loi créant une « aide universelle d’urgence pour les victimes ». (...)

Le texte a recueilli l’unanimité des 120 député·es présent·es, représentant la majorité et l’ensemble des groupes d’opposition. Rédigée par la sénatrice du Nord Valérie Létard (UDI), elle avait déjà été adoptée à l’unanimité par la Chambre haute le 20 octobre dernier. L’autrice du texte s’est dite, sur son compte Twitter, « fière » de cette « avancée significative pour les victimes sous emprise financière ».

Dans ses cinq articles, la proposition de loi prévoit le versement d’une aide exceptionnelle d’urgence aux victimes de violences conjugales après le dépôt d’une plainte ou la délivrance par la justice d’une ordonnance de protection. Attribuée par la Caisse d’allocations familiales (CAF) en moins de cinq jours, cette aide pourra prendre la forme d’un prêt sans intérêts ou d’un don, selon les ressources de la victime. (...)

« La proposition de loi vise à créer une aide financière disponible rapidement pour rendre la séparation possible au moment où la victime est prête à quitter le domicile, a résumé la députée Modem Anne Bergantz. Nous savons qu’il existe de nombreux freins conduisant la victime à rester au sein du foyer : des sentiments contradictoires […] mais également des freins financiers, en raison de l’absence ou de l’insuffisance des revenus, ou encore de l’impossibilité d’accéder à ses propres revenus en raison de la mainmise du conjoint sur les comptes bancaires. »

Au cours des quatre heures de débat, les parlementaires de l’ensemble des groupes ont salué, comme le socialiste Arthur Delaporte, « l’esprit de consensus qui a régné » dans l’hémicycle. (...)

Derrière l’unanimité apparente se sont pourtant dessinées, au fil des échanges, des divergences profondes sur les politiques publiques à mener pour lutter contre les violences intrafamiliales.

Ainsi de l’ouverture ou non de cette aide aux victimes de nationalité étrangère et aux personnes en situation irrégulière. (...)
l’Assemblée nationale a supprimé la condition de régularité du séjour pour bénéficier de la mesure. (...)

La question de la nature de l’aide a également fait débat. Alors que le Sénat, à majorité de droite, avait voté le principe d’un prêt à taux zéro, l’Assemblée nationale a élargi cette mesure : il pourra s’agir d’un don si la victime bénéficie de faibles ressources, notamment dans le cas où elle a des enfants à charge. (...)

Le Sénat et une partie de l’Assemblée nationale souhaitaient même réserver l’aide d’urgence aux victimes « confrontées à des difficultés financières immédiates du fait des actions de protection destinées à se préserver de ces violences ». La suppression de cette condition a été proposée par les groupes de gauche, désireux d’élargir la mesure à toutes les victimes. Elle a été votée par l’ensemble des oppositions, malgré le vote « contre » des trois groupes de la majorité.

A aussi été ajoutée au Code pénal une peine complémentaire d’obligation de remboursement du prêt versé à la victime, avec un plafond fixé à 5 000 euros. Selon ses signataires, cet amendement fait peser sur les épaules de l’auteur des violences la charge financière de l’aide exceptionnelle. (...)

l’initiative de la sénatrice Valérie Létard poursuit son chemin parlementaire. La proposition de loi doit désormais être examinée par le Sénat dans sa version amendée, avant de revenir au Palais-Bourbon. L’élue du Nord a déjà déclaré qu’elle mettrait « tout en œuvre » pour que la présidence du Sénat inscrive « rapidement à l’ordre du jour » cette deuxième lecture.