
Dans un tunnel du 13ème arrondissement de Paris, non loin de Bercy, Mohamed Zakatella se repose dans sa tente. Il vit là, avec une vingtaine d’autres personnes.
Il est presque minuit en ce jeudi de février, quand cinq de ses amis finissent de manger. Ils discutent autour d’une petite table basse de jardin en plastique.
Lui, préfère rester tranquillement dans sa tente, enmitouflé sous sa couette, une cigarette à la main et en compagnie de son chien en peluche. Mohamed rêve de rentrer chez lui. « À la maison, j’ai trois grands chiens, confie-il, mais ici c’est trop cher. Alors, pour pallier le manque, je m’en suis acheté un en peluche en arrivant ».
« Les bénévoles arrivent ! », s’exclame l’un de ses amis. Mohammed abaisse la fermeture éclair de sa tente pour demander s’il peut avoir une tasse de thé et une compote. (...)
L’association Utopia 56 est une association d’aide aux personnes exilées. Cinq fois par semaine, ses bénévoles font le tour de plusieurs campements parisiens pour proposer boissons chaudes, couvertures, tentes, palettes ou encore bâches.
« On ne donne pas forcément à manger, parce qu’on sait que d’autres associations le font tous les jours. On leur fournit surtout de quoi se réchauffer pour les aider à tenir l’hiver », relate Colin Martin*, bénévole, quelques heures plus tôt, tandis que la camionnette d’Utopia 56 pénètre dans l’entrepôt.
Ce jeudi 10 février, c’est lui qui s’occupe de la maraude accompagné d’un autre jeune bénévole, Jules Dormoy.
Une partie du hangar parisien appartient à Utopia : elle lui sert à stocker les dons. Colin et Jules chargent la voiture du nécessaire pour l’hiver. Ils embarquent également des pulls et des écharpes. (...)
Jouxtant l’arrêt de métro Raymond Queneau, 34 tentes sont là, alignées. L’une d’entre elles, grande ouverte, est positionnée légèrement à l’écart.
Elle abrite le petit feu que les campeurs ont initié pour péniblement tenter de se réchauffer. Ils sont une dizaine à s’agglutiner autour, essayant de le maintenir allumé, malgré la pluie et le vent de cette soirée hivernale. (...)
Dans la voiture, Jules et Colin se remémorent les raisons pour lesquelles ils ont décidé de devenir bénévoles. Colin confie que ses engagements quotidiens sont liés à l’association. « J’avais une amie qui travaillait à Utopia. Elle m’a dit qu’il cherchait une personnes pour un service civique, j’ai immédiatement candidaté et pris mes billets pour Paris », raconte-t-il. Depuis, il continue son engagement bénévole, et vit en coloc avec d’autres membres d’Utopia.
Jules, lui, est bénévole depuis de nombreuses années déjà. Toutefois, entre son travail de metteur en scène et ses boulots d’intérim, le jeune homme de 22 ans peine à trouver du temps. « En ce moment, je suis dans une période creuse au niveau du travail, donc je suis revenu. Dès qu’il y a une mission, je réponds présent », appuie-t-il. (...)
La soirée s’achève à proximité du métro Stalingrad. « On essaie d’y passer à chaque maraude, parce que depuis quelques semaines, les policiers y délogent des personnes tous les soirs. Ils leur prennent leur tente et leurs affaires », affirme Colin.
La température extérieure avoisine les 3°C. Ici, peu de personnes disposent de tentes. Pourtant, tout le monde dort déjà sur des cartons ou des matelas à même le sol. Recroquevillés sous de fines couches de couvertures et appuyés contre des murs pour tenter de se protéger de soudaines bourrasques. (...)