
Engagée dans la lutte contre le mal-logement depuis 1987, la Fondation Abbé Pierre a « récompensé » les mobiliers urbains « les plus agressifs, fourbes ou encore décomplexés » mercredi soir à Paris, à l’occasion d’une cérémonie ironiquement baptisée « les Pics d’or ».
Un an après avoir mené une grande campagne contre ces mobiliers urbains « qui empêchent les personnes les plus démunies de s’abriter ou de prendre un peu de repos », l’association a souhaité les « récompenser satiriquement » pour montrer « combien la société repousse ses exclus toujours plus loin des regards ».
« Nous voulons rappeler que ces installations ne sont pas normales et que la solution n’est pas de faire partir les SDF ou de leur mettre des amendes mais de leur trouver des solutions de logement », nous explique Manuel Domergue, directeur des études à la Fondation Abbé Pierre. (...)
« Ainsi, on ne les voit plus mais on ne règle pas le problème puisqu’on les expose l’isolement et à un risque accru de mourir seul », ajoute Manuel Domergue, rappelant que chaque année, environ 500 SDF meurent dans les rues de France. (...)
Des pierres et des pics
« Un jury d’expert » a été chargé de sélectionner « les nommés » parmi les 339 dispositifs recensés par l’association depuis le 6 décembre 2017 via sa plateforme en ligne Soyonshumains.fr. D’après leur carte qui géolocalise tous les dispositifs jugés dégradants, la plupart se concentrent dans les grandes villes et surtout en Île-de-France. Ils ont généralement été mis en place par les municipalités, des copropriétés privées ou encore des commerçants. Mercredi soir, le prix du « dispositif le plus décomplexé » a été remis à un banc transformé en un siège une place, sous un abribus à Biarritz, empêchant ainsi qu’une personne sans-domicile puisse s’allonger (...)
Outre les « Pics d’or », la Fondation espère également sensibiliser les élus, en vue des élections municipales en 2020. L’objectif : les pousser à améliorer leurs conditions d’accueil des SDF en leur demandant de voter une Déclaration des droits des personnes sans abri. « L’idée est de leur rappeler que ces personnes ont aussi des droits : ceux à la survie, au logement ou encore à l’accès aux sanitaires et à un accueil de jour », énumère Manuel Domergue, qui rappelle que plus de 143.000 personnes étaient sans domicile en France en 2012 selon l’Insee. Un chiffre qui a progressé de 50% en 10 ans (...)
Un dispositif retiré fin 2017 après une polémique
Ces récompenses ont été remises par des figures engagées dans la lutte contre le mal-logement, tels que l’humoriste et chroniqueur de France Inter Guillaume Meurice, l’avocat de la Ligue des droits de l’homme Me Arié Alimi, l’humoriste Blanche Gardin ou encore l’ancien SDF Chris Page, qui a passé trois ans dans la rue et qui s’est fait connaître sur Twitter en racontant son quotidien de sans-abri. Fin 2017, il avait également fait partie des premiers à témoigner sur ce sujet et à interpeller la mairie de Paris sur l’installation de barrières au-dessus de grilles d’air chaud dans le XIXe arrondissement de la capitale. « On n’a pas le droit de traiter des êtres humains comme ça », avait-il lancé dans un reportage du média en ligne Brut . Face à la polémique, la municipalité les avait retirées. (..)