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France24
Un an après le coup d’État, la junte birmane sous pression
Article mis en ligne le 1er février 2022

(...) À l’aube, des villageois de la région de Sagaing, dans le centre du pays, sont descendus dans les rues et se sont immobilisés le point levé, d’après des images diffusées sur les réseaux sociaux. D’autres se sont assis, faisant le salut à trois doigts en signe de résistance.

À Rangoun, des étudiants ont déployé des banderoles contre la dictature, tandis que des manifestants ont déversé de la peinture rouge sang. D’autres actions de plus grande ampleur sont attendues dans les prochaines heures et de nombreux appels à fermer les commerces sont relayés sur Internet.
Crimes "imprescriptibles"

"Tragiquement, les informations reçues au cours de l’année dernière suggèrent que bien plus de mille personnes ont été tuées dans des circonstances pouvant être qualifiées de crimes contre l’humanité ou de crimes de guerre", a déclaré Nicholas Koumjian, à la tête du Mécanisme onusien d’enquête indépendant pour la Birmanie, dans un communiqué.

Créé par le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU en septembre 2018, ce mécanisme d’enquête a constitué des dossiers en vue de faciliter des procédures pénales.

"Ceux qui envisagent de commettre des crimes doivent savoir que les crimes internationaux graves sont imprescriptibles", a souligné Nicholas Koumjian.

(...) Les États-Unis ont de leur côté imposé des sanctions financières à sept personnes et deux entités "liées au régime militaire de Birmanie". Parmi les personnes visées par ces sanctions, prises en coordination avec le Royaume-Uni et le Canada, figurent les plus hauts responsables judiciaires du pays, le procureur général Thida Oo, le président de la Cour suprême Tun Tun Oo et le chef de la commission anti-corruption Tin Oo, selon un communiqué du Trésor américain. (...)

Quatre autres personnes et deux entités accusées de soutenir financièrement la junte, notamment par la fourniture d’armes et d’équipements, sont également visées. (...)

Aung San Suu Kyi, 76 ans, est détenue depuis le coup d’État qui a mis fin à une décennie de transition démocratique. La prix Nobel de la paix vient d’être inculpée, accusée d’avoir fait pression sur la commission électorale lors des législatives de 2020, qui avait vu la victoire écrasante de son parti. Elle a déjà été récemment condamnée à six ans de détention et risque au total des décennies de prison au terme de son procès

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« J’avais peur qu’ils torturent ma fille » : les déserteurs de l’armée birmane racontent

Depuis le coup d’État militaire du 1er février 2021, l’armée birmane connaît une vague de désertions. Des soldats en fuite, avec femme et enfants, racontent la difficulté de se soustraire à l’emprise d’une junte qui contrôle et menace leurs familles. (...)

« Ils m’ont demandé le lien de mon profil Facebook et celui de ma femme », expose le caporal adjoint. L’armée tient sa famille en laisse : elle fournit le logement, l’école, les soins, le salaire, la retraite... Comment partir ? Il cogite pendant huit mois. « La dernière-née n’avait même pas deux ans, je ne savais pas quoi faire. » (...)

Ces transfuges sont devenus un enjeu pour l’opposition, qui espère affaiblir la junte en ralliant un maximum d’entre eux. People’s Embrace et People’s Soldiers, deux groupes fondés par d’anciens militaires, cherchent à motiver les indécis. Ils font passer des messages dans les casernes grâce aux « pastèques », surnom des soldats aux accointances « rouges », la couleur de la Ligue pour la démocratie.

Des militaires contactent également directement ces organisations pour obtenir de l’aide. (...)

Depuis que le gouvernement d’unité nationale a appelé à mener « une guerre défensive contre la junte », le 7 septembre, les combats se sont intensifiés entre l’armée birmane et les Forces de défense du peuple (People’s Defence Forces, PDF), des groupes armés proches de l’opposition, parfois alliés aux guérillas ethniques. (...)

L’état-major considère aussi les familles comme une ressource en soi. Impopulaire, confrontée à des difficultés de recrutement depuis le coup d’État, l’armée rappelle actuellement les retraités et mobilise les épouses et les adolescents, qualifié·es même de « réservistes » d’après les témoignages recueillis par Mediapart. (...)