
Le 10 septembre n’est pas une date de plus dans l’agenda social. Ce n’est pas un geste marginal de contestation. C’est l’expression directe d’une rupture : si l’appel à bloquer s’impose, c’est parce que la démocratie a été méthodiquement ruinée. Le blocage n’est pas un acte « radical », il est la seule réponse qui reste quand le système a détruit toute alternative.
Ceux qui gouvernent aujourd’hui, Macron et ses valets, ont vidé la représentation de son sens. Ils ont foulé aux pieds le suffrage universel : le 10 septembre est le nom de ce constat : il n’y a plus de règles communes, seulement l’arbitraire d’un pouvoir qui ne se reconnaît que lui-même.
Le rappel des forfaits est connu : mutilations et incarcérations de masse contre les Gilets jaunes, usage à répétition du 49.3 pour imposer la casse sociale, criminalisation des opposants syndicaux et écologistes, dénigrement systématique des mouvements populaires. Le fait essentiel est ailleurs : ces pratiques ont instauré un climat de défiance majeur, où l’État est perçu comme l’ennemi intérieur et non plus comme l’arbitre commun. Cette fracture ne se referme pas. Elle produit une société minée par la peur et l’épuisement civique.
La conséquence directe est sociale avant d’être électorale. Les couches populaires sont abandonnées à une double violence : celle de la précarité organisée par les réformes néolibérales, et celle des forces de l’ordre déployées pour réprimer toute tentative de résistance. « La République s’est montrée borgne, elle n’a vu que l’ennemi à abattre », écrivait déjà un collectif de chercheurs en 2019 au lendemain des violences infligées aux manifestants. Ce constat reste vrai aujourd’hui. Le travail, le logement, l’éducation, la santé publique : chaque domaine est soumis aux pseudo-impératifs de rentabilité qui ruinent davantage le pays.
Cette destruction du social nourrit directement la progression de l’extrême droite. (...)
Les médias dominants jouent un rôle dans ce basculement, il n’y a qu’à lire l’officine de propagande Le monde du 03 septembre : l’entreprise de désamorçage est en marche[1]. La concentration entre les mains de quelques milliardaires a permis la diffusion massive d’un discours réactionnaire. (...)
La France s’oriente vers une démocratie illibérale, où le vote subsiste mais où le pouvoir n’a plus de comptes à rendre.
Le 10 septembre est donc le nom d’une rupture : non plus seulement d’un système, mais l’affirmation qu’il peut fonctionner sans le peuple. Ce n’est pas une erreur de parcours, c’est une stratégie. (...)
Ce qui reste de la démocratie en France ne tient qu’à une chose : la capacité des citoyens à s’organiser hors des institutions qui les trahissent.