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Slate.fr
Syrie : sept ans d’impuissance de la diplomatie mondiale
Article mis en ligne le 16 mars 2018

Créée au sortir de la Seconde Guerre mondiale pour « préserver les générations futures du fléau de la guerre », l’Organisation des Nations unies a montré, en Syrie, les limites de son fonctionnement.

Sept ans de guerre, plus de 350.000 morts, des millions de déplacés, et pas le moindre signe de paix à l’horizon alors que la guerre en Syrie rentre aujourd’hui dans sa huitième année. Ces dernières semaines, le spectacle de l’agonie des civils cernés dans l’enclave rebelle de la Ghouta orientale s’est une nouvelle fois déroulé sous les yeux impuissants de la communauté internationale. Depuis 2011, chaque nouvelle offensive meurtrière, chaque massacre, est une illustration supplémentaire de l’échec cuisant de la diplomatie dans ce conflit.

Une communauté internationale discréditée

« Il y a un échec flagrant de la diplomatie et des organisations internationales dans le conflit syrien, notamment celle des Nations Unies, mais aussi des organisations régionales, comme la Ligue arabe. L’impunité totale durant cette guerre pose un réel défi aux cadres diplomatique et juridique définis à l’échelle internationale. Tout ce qui a été construit depuis la Seconde Guerre mondiale en matière de droits, de conventions, et de mécanismes de condamnation et de jugement sera désormais plus que jamais remis en question », constate le politologue Ziad Majed, auteur de Syrie, la révolution orpheline.

En 2013, un tournant dans le laisser-faire est franchi après l’utilisation avérée de gaz sarin dans la Ghouta orientale par le régime syrien. Les Occidentaux avaient prévenu les belligérants que le recours aux armes chimiques entraînerait une riposte armée. Les États-Unis renonceront au dernier moment à intervenir militairement en Syrie, lâchant dans ce dessein l’allié français, et achevant de discréditer la communauté internationale et ses institutions dans la gestion de ce conflit.

Fiasco libyen, souvenir de l’enlisement irakien, nécessité d’aboutir à un accord nucléaire avec l’Iran, l’heure des interventions étrangères musclées au Moyen-Orient semble, pour l’instant du moins, révolue. (...)

Comment en est-ton arrivé là ? L’incapacité collective à stopper le bain de sang syrien tient avant tout à la pugnacité du régime syrien lui-même, déterminé à se maintenir au pouvoir par tous les moyens –y compris le massacre de sa propre population.

Onze veto russes

Mais Bachar el-Assad n’aurait pas pu tenir cette posture intransigeante sans le soutien indéfectible de l’Iran et de la Russie. La stratégie jusqu’au-boutiste du régime et de ses alliés n’a souffert d’aucune hésitation. (...)

au Conseil de sécurité de l’ONU, Moscou s’est employé dès les premières semaines à bloquer toute tentative de juguler la fureur meurtrière de son allié.

Le 4 octobre 2011, les Russes et les Chinois opposent leur premier veto à un projet de résolution réclamant des « mesures ciblées » contre le régime après la répression sanglante de manifestations pro-démocratie. Par la suite, Moscou rejettera systématiquement et à onze reprises les propositions visant à condamner les exactions commises contre le peuple syrien.

Les rares cessez-le-feu et résolutions humanitaires votées à l’unanimité, se retrouvent la plupart du temps vidées de leur contenu coercitif dans leur version finale. (...)

Démissions à l’ONU
Cette incapacité répétée des Nations unies à peser sur le cours des événements a poussé deux médiateurs chevronnés à la résolution des conflits à la démission. En août 2012, Kofi Annan est le premier à jeter l’éponge, six mois après sa désignation comme émissaire spécial de l’ONU.

« La militarisation croissante sur le terrain et le manque d’unanimité au Conseil de sécurité ont fondamentalement changé mon rôle », avait alors déclaré l’ancien secrétaire général des Nations unies, prix Nobel de la Paix, en rendant son tablier.

Son successeur, Lakhdar Brahimi, artisan, entre autres, de l’accord de Taëf qui mit fin à la guerre civile libanaise en 1989, en fera de même, après avoir organisé début 2014, les premières négociations directes entre gouvernement et opposition à Genève. Le 26 janvier dernier, le neuvième round de ces pourparlers, délocalisés à Vienne pour des raisons logistiques, s’achevait une nouvelle fois sans succès.

Si en février 2017, le troisième émissaire onusien, Staffan de Mistura, parvient pour la première fois à faire accepter aux différentes parties une feuille de route comprenant quatre points de discussion –une transition politique, une nouvelle Constitution, la tenue d’élections et la lutte contre le terrorisme à la demande de Damas– les pourparlers butent indéfiniment sur le sort du président syrien dont l’opposition exige le départ. Une demande inenvisageable pour la Russie et l’Iran.

Une opposition faible et divisée
L’asymétrie du rapport de force entre l’opposition syrienne et les soutiens du régime a également miné la perspective de négociations un tant soit peu équilibrées. (...)

Si elles soutiennent l’opposition syrienne, les puissances occidentales rechigneront durant toute la guerre à soutenir militairement cette dernière de peur que les armes ne tombent entre de mauvaises mains.

« En 2011, on a demandé à la France d’agir. Il fallait une intervention rapide et musclée. On aurait éviter que les Syriens s’arment eux-mêmes », déplore l’ancienne porte-parole de l’Armée syrienne libre Lama Atassi.

L’opposition syrienne est aussi affaiblie par des divisions en son sein (...)

Cet éclatement reflète en partie les divergences des différents parrains régionaux des opposants : l’Arabie Saoudite, le Qatar, la Turquie. L’absence d’unité des pays arabes sur le dossier syrien n’a pas non plus joué en faveur de l’opposition.(...)