
Nous avons souvent critiqué Mme Royal pour son action, et elle s’est toujours comportée de manière bizarre, pour ne pas dire méprisante, à l’égard de Reporterre. Mais nous constatons aujourd’hui qu’elle s’engage de manière intelligente et forte sur la question de Notre-Dame-des-Landes, et nous le soulignons sans hésiter.
Depuis une semaine, une bataille est manifestement engagée au sein du gouvernement autour de la décision de lancer une opération policière contre la Zad de Notre-Dame-des-Landes. Le Premier ministre Manuel Valls pousse à la roue, le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, hésite, en pesant la difficulté technique de l’opération, M. Hollande, président de la République, évalue en politicien les avantages ou les inconvénients qu’il retirerait d’une telle action.
Face à la brutalité du Premier ministre, la ministre de l’Environnement monte au front - de la communication - avec ténacité. Après plusieurs prises de position les jours derniers, elle a développé sa position dans Le Journal du dimanche, le 16 octobre : « La question, y explique-t-elle, est : quel est l’intérêt général et comment rétablir un ordre juste ? En d’autres termes, est-il pertinent de faire prendre des risques pour une infrastructure inadaptée, comme l’ont dit des experts indépendants ? ». Rappelant le coût du projet d’aéroport, près d’un milliard d’euros, elle dit aussi l’évidence : « Aujourd’hui, un tel projet, qui remonte à des années, mal engagé, ne serait pas autorisé. »
La ministre de l’Environnement propose de tenir de nouvelles réunions de travail « afin de sortir par le haut de cette situation ». Et elle prend position contre l’intervention policière : « Nos forces de l’ordre ont d’autres missions à mener en ce moment, liées au terrorisme, à la situation dans le Calaisis... Pour avoir géré le dossier douloureux de Sivens, où il y a eu un mort et où j’ai dû, difficilement, renouer les fils du dialogue, il est de ma responsabilité - puisqu’il s’agit d’une infrastructure qui relève de mon ministère - d’alerter sur le risque d’une évacuation par la force. Imaginons seulement un instant qu’il y ait mort d’homme, parmi les forces de l’ordre ou du côté des manifestants. Ce serait gravissime ! En répétant cela, je ne fais que défendre l’intérêt général. » (...)
Tant M. Valls que M. Sarkozy font erreur : il n’y a pas eu référendum, qui aurait valeur décisive légale, mais consultation. Au demeurant entachée de tant de biais qu’elle n’a pas grande valeur. De surcroît, de nombreuses procédures judiciaires sont encore en cours, tandis que la procédure européenne n’est pas achevée.
Il est donc urgent de rester l’arme au pied. Plutôt que d’agiter les matraques pour satisfaire on ne sait quel désir d’ordre d’une opinion qui a bien d’autres préoccupations, il faut reprendre les faits, les dossiers, et la discussion. Mme Royal, ici, a raison.