
Le maire de Bruz, dans l’agglomération rennaise, conteste l’installation d’un centre d’accueil temporaire sur un terrain de sa commune. Du côté de La France insoumise, on s’interroge sur le potentiel lien entre ces déplacements en régions et l’organisation des JO à Paris l’an prochain.
Le gouvernement s’était déjà vu reprocher de préparer la mobilisation de logements étudiants pour l’organisation des Jeux olympiques de Paris 2024. Il est désormais soupçonné de vouloir camoufler la présence de personnes sans-abri dans la capitale en organisant leur déplacement dans d’autres régions de France. Le conseil municipal de Bruz, en banlieue de Rennes (Ille-et-Vilaine), a ainsi exprimé lundi 22 mai son opposition à l’installation dans sa commune d’un centre d’accueil temporaire.
La préfecture, qui conteste tout lien avec les Jeux, présente le futur site comme un "sas" pour des personnes venues volontairement d’Ile-de-France, en vue de leur répartition dans d’autres structures de Bretagne. Des lieux similaires doivent toutefois ouvrir dans neuf autres régions. Franceinfo vous explique ce que l’on sait de ce projet et des raisons pour lesquelles il est contesté.
1 En quoi consiste le projet du gouvernement ?
Interrogé mardi sur le site envisagé à Bruz, le secrétaire général de la préfecture d’Ille-et-Vilaine a décrit un projet plus large de "solidarité nationale", destiné à remédier au manque particulièrement criant de places d’hébergement d’urgence en Ile-de-France. Le gouvernement a demandé "à une dizaine de préfets de région de créer des lieux d’accueil provisoires", a-t-il expliqué. En mars, la Direction générale des étrangers en France, qui dépend du ministère de l’Intérieur, expliquait déjà à 20 Minutes qu’un centre de ce type ouvrirait dans chaque région de France métropolitaine, à l’exception de l’Ile-de-France, des Hauts-de-France et de la Corse, soit dix centres au total.
Ces lieux accueilleront, sur la base du volontariat, des personnes venues d’Ile-de-France et vivant dans la rue ou en hébergement d’urgence, a expliqué à l’AFP le cabinet du ministre délégué à la Ville et au Logement, Olivier Klein. Si ce dispositif concerne majoritairement des migrants, il ne les vise pas spécifiquement et sera ouvert à tous les profils. Les résidents seront pris en charge pendant trois semaines dans ces "sas" avant d’être "orientées", dans leur nouvelle région, "vers le type d’hébergement correspondant à leur situation".
Leur séjour doit permettre d’évaluer leur "situation sociale et administrative", a précisé Olivier Klein mercredi sur franceinfo. (...)
Des associations s’interrogent malgré tout sur la réalité des solutions d’hébergement, y compris loin de Paris. "Ce que l’on sait, sur Rennes Métropole, c’est que c’est complètement saturé", a alerté mardi auprès de France 3 Jean-François Durand, président de l’association Accueil réfugiés Bruz, reconnaissant ne pas connaître la situation dans le reste de la région bretonne. (...)
On ignore pour l’instant la liste complète des villes qui accueilleront ces nouveaux "sas". Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation Abbé-Pierre, a affirmé mercredi sur franceinfo avoir eu des "échos" d’un projet similaire dans la métropole de Strasbourg.
2 Pourquoi fait-il des vagues en Bretagne ?
A Bruz, c’est l’opposition locale qui a mis un coup de projecteur sur ce plan gouvernemental. Philippe Salmon, maire DVG de la commune bretonne, dit avoir été prévenu par la préfecture de l’installation prochaine de ce centre d’accueil, sans concertation préalable. "On est mis devant le fait accompli", déplore-t-il auprès de France Bleu. Lundi, le conseil municipal a émis un avis défavorable, mais la préfecture n’est pas obligée d’en tenir compte, car le terrain appartient à la SNCF.
Outre la manière, l’élu s’inquiète du site choisi, situé à proximité d’une voie de chemin de fer et pollué, selon lui, par des hydrocarbures et des métaux lourds. (...)
Le maire souligne de son côté que Bruz met déjà à disposition d’une association 22 logements destinés à des ressortissants étrangers en attente de régularisation. Philippe Salmon assure ne pas avoir d’opposition de principe à l’accueil d’autres sans-abri, quelle que soit leur nationalité. (...)
3 Y a-t-il un lien entre ce projet et les Jeux olympiques ?
Trois députées de La France insoumise, Nadège Abomangoli, Clémence Guetté et Clémentine Autain, ont accusé sur Twitter le gouvernement de créer ces "sas" pour éloigner de Paris les sans-abri, notamment migrants, en amont de l’organisation des Jeux olympiques, en août 2024. Une hypothèse également soulevée par des associations et par le maire de Bruz, qui pointe aussi la concordance avec la Coupe du monde de rugby organisée en France en septembre et octobre prochains (dont les matchs se répartiront cependant dans neuf villes du territoire). (...)