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L’Humanité
SOUS BLANQUER, LE DÉBAT INTERDIT À L’ÉCOLE
Article mis en ligne le 14 février 2019

Mardi soir, en Île-de-France, la Nuit des lycées devait permettre un débat libre sur les réformes du lycée et la loi Blanquer. Des consignes venues des rectorats ne l’ont pas permis.

Les grilles du lycée Michelet, à Vanves, dans les Hauts-de-Seine, sont restées fermées mardi soir. Parents et élèves étaient conviés à 18 heures, aux côtés des professeurs, à un débat sur la loi Blanquer. L’initiative s’inscrivait dans le cadre de la Nuit des lycées, lancée par le Snes-FSU (premier syndicat du secondaire) des académies de Créteil, Paris et Versailles. Il s’agissait de réfléchir à l’avenir de la mobilisation contre les réformes en cours, dans un moment convivial. Mais à l’heure dite, le proviseur du lycée se présente derrière la grille, fermée. Impassible comme un soldat au garde-à-vous, il invite fermement les présents… à rentrer chez eux. La réunion n’aura pas lieu.

Lettres aux députés, performances artistiques, grande « braderie de l’éducation nationale »… les idées ne manquaient pas. Certains professeurs avaient même prévu d’occuper les locaux toute la nuit. Les plus courageux resteront jusqu’à 23 heures, prenant le temps d’aller discuter avec les parents, coincés de l’autre côté du portail. Mais, dans la salle les profs, la vingtaine d’enseignants présents ce soir-là est contrainte au huis clos.

Dans le département voisin de l’Essonne, les professeurs du lycée Corot, de Savigny-sur-Orge, ont eu à peu près la même surprise. Le chef d’établissement a menacé d’un blâme les enseignants qui ne quitteraient pas l’établissement passé 19 heures. (...)

Selon le Snes de Créteil, les directions des services départementaux de l’éducation nationale (DSDEN) auraient envoyé des « consignes de prudence » aux chefs d’établissement.

ces consignes trahissent la « fébrilité » du ministère
Ce n’est pas une première. En janvier dernier, les enseignants du lycée Michelet ont dû se rabattre sur une salle mise à disposition par la ville voisine de Malakoff. Le motif, cette fois ? Le débat « saperait la réforme ». Même chose dans l’Essonne, où les professeurs du lycée Corot ont investi une salle municipale pour débattre sans être rappelés à l’ordre. (...)

« L’administration commence à comprendre que professeurs et parents ne sont pas dupes : ils prennent conscience de ce qu’est réellement la réforme Blanquer, une réforme inégalitaire, pour faire des économies. »

Illustration : les lycées doivent fournir ces jours-ci aux rectorats un effectif d’élèves par classe pour septembre 2019, alors que les choix d’orientation des élèves ne se feront qu’en juin. (./..)

« On risque de supprimer des postes aujourd’hui et de découvrir en juin qu’ils n’auraient pas dû être supprimés. À l’inverse, des collègues pourraient découvrir en juin que leur poste saute. »

Même chose pour la qualité de l’enseignement. L’enveloppe horaire assignée aux établissements se compose de deux parties. La première est réservée au financement des cours du tronc commun (cours obligatoires pour tous les établissements). La seconde, appelée « marge », sert à financer le reste, autrement dit les options, les modules d’orientation, l’aide personnalisée et les dédoublements de cours.

L’affectation de cette marge revient à chaque établissement. Par exemple, si le lycée Michelet choisit de conserver les cours en demi-groupes pour privilégier des conditions optimales d’apprentissage, Corot choisira peut-être de financer des options rares, pour offrir une diversité d’enseignements à ses élèves. Au final, aucun lycée ne sera égal à un autre. Mais les professeurs, eux, auront un statut toujours plus précaire, et les élèves, des conditions d’enseignement toujours plus imparfaites.