
Le mouvement social de défense des retraites, même s’il n’est pas encore achevé, aura été inédit autant par son ampleur (sept manifestations massives, les dernières réunissant 3 à 3,5 millions de personnes), par sa durée (deux mois), que par ses formes et son contenu.
Tentons un décryptage.
(...) ce qui est radicalement nouveau est que les salariés du secteur privé, pour la première fois massivement entrés dans la danse, et là où ils avaient un pouvoir de blocage de l’économie (raffineries, ports…), l’ont exercé avec une détermination et sur une durée exceptionnelles, comme s’ils prenaient enfin conscience que l’économie, le capital ne seraient rien sans eux ; et qu’ils avaient un droit sur la production, un pouvoir de décision. (...)
Cette prise de conscience du caractère non seulement injuste, mais mortifère du régime capitaliste a engendré une colère, certes, mais plus que cela : un désir d’en finir avec cette soumission, avec cette confiscation de notre pouvoir d’agir. (...)
A surgi en profondeur, dans l’inconscient collectif, que cela suffisait, que le temps était venu de dire non seulement « Non ! », mais encore « Oui, nous pouvons reprendre le contrôle de la situation ! Nous voulons un autre monde, pour nous et pour nos enfants ! »
Les vannes d’un nouvel imaginaire se sont ainsi entr’ouvertes et ne se refermeront plus. (...)
Cette conscience n’a pas disparu avec ce que les médias dominants appellent trompeusement la fin du conflit. La grève va prendre d’autres formes, le mai rampant est là. Rien ne sera plus comme avant. La mobilisation sociale de septembre-octobre 2010 a fait naître quelque chose qui, comme après mai 68, n’est pas près de disparaître : le nouveau est là. Les salariés ont pris conscience de leur force, de leur désir, de leur pouvoir. Gageons qu’ils sauront s’en servir à l’avenir.