
Enseignante pendant près de dix ans dans le Val-de-Marne, Sandra n’a pas le droit d’exercer en Gironde où elle a suivi sa famille. L’académie de Créteil ne veut pas la libérer.
« Mon métier me manque », déplore Sandra, la mort dans l’âme. Depuis la rentrée 2022, cette professeur des écoles de 36 ans est privée de classe.
Elle n’a pas le droit d’exercer en Gironde alors que le département manque d’enseignants. Pour preuve, en août 2022, le rectorat de Bordeaux avait lancé une campagne de recrutement par le biais de petites annonces dans la presse régionale (in fine, 153 contractuels ont été recrutés pour le premier degré)… C’est pour dire !
La jeune femme n’a pourtant pas été radiée de l’Éducation nationale, elle est simplement victime du système de mutations. Après huit années passées à enseigner en Île-de-France, où elle habitait avec sa famille, Sandra a demandé à rejoindre l’académie de Bordeaux pour suivre son compagnon, qui a obtenu un poste en Gironde.
Elle est victime du barème de l’Éducation nationale (...)
« C’est inenvisageable de vivre à 600 km de ma famille »
Et la sentence risque d’être la même à la rentrée prochaine si le barème n’évolue pas. « Pire, il risque d’augmenter vu la pénurie de professeurs dans le 94, réagit-elle. Je ne suis pas très optimiste. » (...)
Certes, j’aurais pu continuer à enseigner dans le Val-de-Marne. Certains font ce sacrifice mais pour moi, c’est inenvisageable de vivre à 600 kilomètres de ma famille. L’Education nationale nous laisse le choix entre la dépression parce qu’on ne voit pas ses enfants ou la dépression parce qu’on ne fait pas son métier. J’aime ce que je fais et on me prive de ma passion.
Après ce refus à l’issue du mouvement national, la fonctionnaire a fait une demande d’Ineat-Exeat. Une sorte de dernier recours. Pour qu’il soit accepté, il fallait que l’académie de Créteil lui autorise la sortie (l’Exeat) et que, dans le même temps, l’académie de Bordeaux l’accepte (l’Ineat).
« Bêtement, j’ai cru que ça allait peut-être marcher, réagit Sandra. J’ai obtenu mon Inea – ce qui veut dire qu’il y a bien des besoins en Gironde puisque le rectorat de Bordeaux avait un poste pour moi – mais j’ai eu un refus de l’académie de Créteil pour l’Exeat. »
Elle lance une pétition et recueille plus de 30 000 signatures
Résignée, la professeur des écoles a décidé de se mettre en disponibilité pour pouvoir s’installer avec sa famille dans la métropole de Bordeaux. (...)
Le pire, c’est qu’il manque d’instituteurs. À l’aube de la rentrée, le ministre de l’Éducation nationale expliquait que 3 000 contractuels avaient été recrutés en catastrophe – lors de job-datings et avec seulement quelques jours de formation – pour palier à la pénurie d’enseignants (4 000 postes non pourvus selon Pap Ndiaye).
Le lendemain de cette annonce, après une nuit à cogiter dans son lit, Sandra a allumé son ordinateur pour lancer une pétition intitulée « Pour que les enseignants en disponibilité exercent dès la rentrée », dont on devine aisément le contenu.
Elle cumule plus de 30 000 signatures et de nombreux commentaires, qui rabâchent une certaine incompréhension de voir tous ces professeurs laissés sur le carreau alors que les besoins de l’Éducation nationale sont énormes. (...)