
Suite à l’agression au couteau d’un contrôleur de bus à Montpellier ce mercredi 8 juin, les salariés de la TAM ont exercé leur droit de retrait, provoquant la suspension des lignes de bus et tram. La circulation des transports en commun a repris ce jeudi 9 dès le matin, et la direction de la TAM s’est engagée à prendre des mesures dès le mois de septembre. Renforcement des effectifs de police, caméras, gratuité des transports : des solutions ? Au Poing, une agression de cette gravité ne nous réjouit pas plus que la perspective de voir plus d’uniformes de flics.
Sur les coups de 15h ce mercredi 8 juin, un contrôleur a pris un coup de couteau à la cuisse après avoir demandé son titre de transport à un passager à l’arrêt Les Bouisses, dans le quartier de la Martelle. Hospitalisé dans la foulée, le salarié est passé au bloc opératoire.
“C’est passé tout près de l’artère, ça aurait pû lui coûter la vie”, commente Laurent Murcia, responsable du syndicat Force Ouvrière, largement majoritaire à la TAM, très implanté parmi les conducteurs. « Les conducteurs et contrôleurs sont épuisés par la multiplication des incivilités ces dernières années sur le réseau de transport public montpelliérain. On s’excuse pour la gêne occasionnée pour les usagers, mais on ne pouvait pas laisser passer. Parce qu’on ne savait pas avec certitude si l’individu avait été interpellé, il est parti en courant dans la foulée de l’agression. Mais aussi parce qu’il nous fallait marquer le coup, montrer à la direction qu’il faut prendre des mesures. Depuis quinze ans que je roule, je peux vous dire que jusqu’à y’a quelques années ont avait pas ce genre de soucis sur le réseau montpelliérain. Dans l’absolu on a aucune idée de qui est l’agresseur. Mais quand on roule on voit tout ce qui se passe en ville, et la misère sociale est en plein boom. Depuis que j’ai commencé le nombre de gens à la rue a explosé, on voit de tout, et beaucoup de jeunes. » (...)
Le taux de pauvreté à Montpellier en 2019 était de 19 % en 2019, contre 14,3% dans l’ensemble de la France métropolitaine. D’autant plus inquiétant que ce taux souvent brandi ressemble à l’arbre qui cache la forêt : de nombreuses personnes au-dessus de ce seuil rencontrent de graves difficultés économiques. (...)
Sur Montpellier, les contrôleurs du tram et des bus sont depuis peu équipés d’un dispositif de caméras-piétons, qui permet de garder une trace vidéo de leurs interventions. Les agents, formés par la police municipale pour utiliser ce système, ont la possibilité de déclencher lorsqu’un usager le demande, lorsque le nombre de contrôleurs est inférieur au nombre de personnes contrôlées, ou dans une situation de flagrance. Lorsque l’enregistrement est déclenché, l’information doit être systématiquement donnée à l’usager. Dans un premier temps, seuls les chefs d’équipes seront habilités à en porter. Seize caméras piétons, qui coûtent 1.000 euros chacune à la métropole de Montpellier, ont été mises à leur disposition. Dans près d’un an, un retour d’expérience permettra à la collectivité d’évaluer ce nouveau système.
Par le passé, des problèmes massifs de brutalités dans les transports avaient été posés par la société de sécurité privée lyonnaise SCAT, utilisée par la direction de la TAM pour la sous-traitance des contrôles de billets. “On les a assignés au tribunal avec le syndicat, en 2018, suite à quoi le service des contrôles a été réintégré à la TAM.”, commente Laurent Murcia.
Théoriquement, un usager qui estime que son contrôle s’est mal passé peut demander via un avocat à récupérer les images. Ca, c’est la théorie. Dans la réalité, les abus de contrôleurs n’ont pas tout à fait cessés avec le départ de la SCAT. (...)
Rappelons également que les contrôleurs n’ont pas tous les droits. Selon un délégué syndical SUD TAM, « vous pouvez sortir quand vous voulez et monter quand vous voulez. [Les contrôleurs] n’ont aucun droit, ce ne sont pas des officiers de police judiciaire. Ils n’ont pas le droit de vous appréhender. […] Vous n’avez tué personne et ce n’est pas parce que vous n’avez pas validé un ticket qu’on doit vous retenir » (...)
Le Monsieur Sécurité de l’équipe du maire “socialiste”, Delafosse, Sébatien Cote, censé être en charge de la sécurité publique, avec un palmarès peu glorieux fait de chasse aux SDF, de verbalisations des livreurs à vélo précaires pendant la crise sanitaire, de répression des manifs montpelliéraines, assurait il y a quelques mois déjà un renforcement des opérations “coups de poing”, menées conjointement par les agents de la TAM, et les polices nationales et municipales. Et la création d’une police des transports à l’horizon 2023. Une vieille promesse de campagne pour Delafosse. (...)
Depuis septembre 2020, trams et bus sont déjà gratuits le week-end. Un an plus tard, les mineurs et les plus de 65 ans pouvaient aussi voyager gratuitement toute la semaine. Fin 2023, la gratuité est censée s’étendre à tous les habitants de la métropole, sept jours sur sept. Une mesure pensée , ou présentée, comme à la fois sociale et écologique, car elle encourage l’usage des transports en commun. Et qui s’inscrit dans un vaste programme autour de la mobilité chiffré par la métropole à un milliard d’euros sur l’ensemble du mandat. Lequel prévoit notamment la création d’une cinquième ligne de tramway d’ici fin 2025 et une nouvelle « offre de mobilité décarbonnée », à savoir des bus électriques qui desserviront cinq nouvelles destinations dans trois ans. Un réseau de « lignes express » dédiées aux vélos devrait à terme couvrir 235 kilomètres de linéaire.
Mais la gratuité des transports ne suscite pas vraiment l’enthousiasme des syndicalistes de Force Ouvrière. D’après eux, beaucoup de salariés se montrent inquiets quant au manque à gagner pour la TAM, et aux conséquences que cela peut avoir, en terme de conditions de travail, mais aussi de qualité du service public. (...)