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Pourquoi nous ne pouvons pas attendre - par Martin Luther King
Lettre aux Blancs modérés à propos de la légitime impatience des Noirs
Article mis en ligne le 5 septembre 2013
dernière modification le 2 septembre 2013

A l’heure où l’on commémore le cinquantième anniversaire de son désormais célèbre discours I had a dream, nous republions des extraits choisis d’une autre très grande oeuvre de Martin Luther King : la Lettre de la geôle de Birmingham. Très loin de l’image aseptisée du pasteur qu’a construite l’idéologie dominante, plus loin encore des appels à la « tolérance », au « vivre-ensemble » et autres mots creux de l’antiracisme étatique et institutionnel, cette lettre ouverte propose l’une des analyses les plus profondes du racisme, de ses conséquences subjectives sur celles et ceux qui le subissent, et de la remarquable capacité de cécité et d’indifférence dont il peut faire l’objet, jusque chez les plus sincères antiracistes. Écrite en avril 1963 pendant un séjour en prison, suite à une « action directe de désobéissance civique » [1], cette lettre est adressée aux « blancs modérés », c’est-à-dire aux Blancs qui reconnaissent le caractère illégitime de la ségrégation raciale, mais qui reprochent aux activistes noirs d’être trop « impatients », trop « extrémistes », et d’utiliser des moyens de lutte illégaux.

(...) "L’histoire est la longue et tragique illustration du fait que les groupes privilégiés cèdent rarement leurs privilèges sans y être contraints. Il arrive que des individus soient touchés par la lumière de la morale et renoncent d’eux même à leurs attitudes injustes, mais les groupes ont rarement autant de moralité que les individus. Nous avons douloureusement appris que la liberté n’est jamais accordée de bon gré par l’oppresseur : elle doit être exigée par l’opprimé. Franchement, je ne me suis jamais engagé dans un mouvement d’action directe à un moment jugé « opportun », d’après le calendrier de ceux qui n’ont pas indûment subi les maux de la ségrégation. (...) "

Je n’ai pas demandé à mon peuple : « Oublie tes sujets de mécontentement. » J’ai tenté de lui dire, tout au contraire, que son mécontentement était sain, normal, et qu’il pouvait être canalisé vers l’expression créatrice d’une action directe non violente. C’est cela qui est dénoncé aujourd’hui comme extrémiste.

Je dois admettre que j’ai tout d’abord été déçu de le voir ainsi qualifié. Mais en continuant de réfléchir à la question, j’ai progressivement ressenti une certaine satisfaction d’être considéré comme un extrémiste. (...)

Aussi la question n’est-elle pas de savoir si nous voulons être des extrémistes, mais de savoir quelle sorte d’extrémistes nous voulons être. Serons-nous des extrémistes pour l’amour ou pour la haine ? Serons-nous des extrémistes pour la préservation de l’injustice ou pour la cause de la justice ? (...)