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Pour empêcher l’industrialisation de la forêt, des politiques et associations lancent la bataille
Article mis en ligne le 27 octobre 2019
dernière modification le 26 octobre 2019

En France, la lutte contre l’industrialisation des forêts prend de l’ampleur avec une constellation d’associations et de syndicats mobilisés. Ils se sont structurés pour peser sur le jeu institutionnel et élaborer d’ici début 2020 une proposition de loi pour que « les citoyens se réapproprient ce bien commun ».

Dans les bois, loin des discours productivistes, une autre voix commence à se faire entendre, celle du mouvement contre l’industrialisation des forêts françaises. Ses animateurs dénoncent la transformation de massifs forestiers en « usines à bois », la multiplication des coupes-rases et le démantèlement de l’Office national des forêts — l’établissement public qui gère un tiers des surfaces boisées en France.

Si l’opinion s’est émue l’été dernier des incendies en Amazonie, il faudrait désormais, selon les membres du collectif SOS forêt, s’intéresser à ce qui se trame près de chez nous, sous les frondaisons de nos forêts où la biodiversité se dégrade, menacée par les grandes usines à biomasse et la hausse des prélèvements en bois. (...)

Aujourd’hui, la lutte se trouve à un moment charnière. Samedi 26 octobre 2019, une manifestation est prévue à Fontainebleau. Elle conclut une semaine de mobilisations. Pendant deux jours, mercredi et jeudi 23 et 24 octobre, une centaine de « forestiers résistants », de chercheurs, de syndicalistes et d’associatifs se sont réunis lors des Assises de la forêt à proximité de Paris pour élaborer ensemble des propositions en faveur d’une gestion alternative de la forêt. Ces mesures alimenteront une proposition de loi citoyenne soutenue par plusieurs groupes parlementaires, dont Mathilde Panot, députée La France insoumise, est cheffe de file.
« Les citoyens savent qu’il y a un problème avec la forêt française. Avant on criait seul dans le désert »

La bataille institutionnelle est engagée et vise à accroître le rapport de force avec la filière industrielle. Le contexte actuel y est propice. « Les perceptions changent. Les citoyens ont compris qu’il existait un problème avec la forêt française, observe Régis Lindeperg, membre de l’association SOS forêt. Il y a cinq ans, on criait dans le désert. » (...)

Poser un diagnostic réel sur la qualité de nos forêts est un premier jalon. Or le constat des Assises est sans appel : les forêts s’uniformisent. Selon les données de l’Inventaire forestier national, 51 % des forêts sont constituées d’une seule essence. Les arbres sont aussi coupés de plus en plus jeunes : 80 % des arbres des forêts françaises ont moins de 100 ans. (...)

Pour les participants aux Assises, il est important de montrer qu’une autre voie est possible. « On veut proposer une porte de sortie, ou plutôt une porte d’avenir, dit Régis Lindeperg. Deux mondes s’affrontent : nous sommes les "bio" de la forêt face à la sylviculture intensive. »

Lors des deux jours de débat, de nombreuses alternatives ont été valorisées : des circuits courts au débardage à cheval, des scieries artisanales aux groupements fonciers citoyens qui gèrent collectivement des parcelles de forêt.
Des mesures législatives concrètes seront proposées pour mettre fin à certaines pratiques (...)

Plusieurs visites de terrain sont programmées. La commission s’est ainsi déplacée à proximité d’Orléans pour constater la déforestation provoquée par le chantier d’un nouveau pont sur la Loire. Les forêts se situent souvent en première ligne face aux grands projets inutiles.

Parmi les parlementaires, outre Mathilde Panot, à l’origine de la commission, on note la présence de plusieurs élus insoumis comme Ugo Bernalicis et Loïc Prud’homme, mais également l’ancienne ministre de l’écologie, Delphine Batho, Dominique Potier, du parti socialiste, Sébastien Jumel et Hubert Wulfranc, tous deux députés communistes.

Lors d’une conférence de presse, Mathilde Panot précisait le but de cette proposition de loi : « Faire entendre d’autres voix au cœur du Parlement et montrer que la violence du modèle industriel met en danger autant la nature que les hommes. » (...)

« Notre approche est globale, nous parlons autant des conditions sociales des travailleurs que des écosystèmes »

(...)

Ces dernières années, des convergences inédites se sont tissées. Entre syndicalistes, écologistes et opposants aux grands projets inutiles. Elles ont donné au mouvement une plus grande force, créé de nouvelles complicités, avec des savoir-faire et des expériences complémentaires. « (...)

Dans cette constellation, une nouvelle association, appelée Canopée, est apparue fin 2018. Créée par un ancien salarié des Amis de la Terre et ingénieur forestier, Sylvain Angerand, elle bataille pour défendre des forêts vivantes. Elle vient prendre une place encore inoccupée pour se consacrer pleinement au plaidoyer au niveau national, entre le réseau pour les alternatives forestières (le RAF), les groupes locaux SOS forêt et les syndicats de l’ONF. Canopée a été la cheville ouvrière des Assises et prépare pour les mois qui viennent de nouvelles campagnes contre la sylviculture industrielle. (...)