
Les dizaines de milliers de manifestants qui sont sortis dans la rue au mois de mai 2011, dans différentes villes du Chili (90.000 à Santiago le 28 mai), ne sont pas que des manifestants « écolos ». Ils refusent la façon dont le projet HidroAysén — un projet de grands barrages en Patagonie porté par l’entreprise privée Endesa, filiale du groupe énergétique italien Enel — a été approuvé ; l’influence exercée par les entreprises sur le gouvernement, les conflits d’intérêts de certains membres de la COREMA (Commission Régionale de l’Environnement) de Aysén — désignés par les ministres de Sebastian Piñera, l’actuel président chilien [1] — et la façon dont l’avis de la population a été méprisé.
Ras-le-bol généralisé
Un autre élément qui a motivé les manifestations, les semaines qui ont suivi cette approbation, a été la position intransigeante du gouvernement qui n’a pas arrêté de dire que « le Chili a besoin d’HidroAysén », alors que plusieurs études scientifiques affirment le contraire.
(...) Des « laissés pour compte » qui n’ont pas de sécurité sociale, souvent pas d’hôpital à proximité, des écoles sans ressources et des jeunes attrapés par la drogue et la délinquance. À San Antonio, le chômage s’élève à 14,2% depuis que le port a été donné par l’État à l’Entreprise portuaire de San Antonio, privatisant tout le bord côtier de la commune. Une installation de conteneurs d’acide sulfurique, ainsi que des conteneurs de 15 mètres d’une usine de Graneles de Chile S.A., filiale d’Agrosuper, ont poussé à quelques mètres de maisons, qui ont perdu 5 heures de soleil. Au Sud du pays, d’autres « oubliés du Chili centralisé » ont été dupés par l’industrie du saumon. Avec des capitaux norvégiens, espagnols, hollandais et chiliens, cette industrie a dévasté les écosystèmes marins, polluant de vastes superficies et faisant faillite définitivement en 2008.(...)
De nombreux abus envers les travailleurs ont été constatés, ainsi que des accidents de travail qui ont laissé plusieurs morts. Ce qui a provoqué le plus d’impact a été le chômage lorsque cette industrie est partie. En revanche, elle a bénéficié des prêts qui n’ont pas été payés par les entreprises, étant alors assumés par les banques qui sont devenues propriétaires de « barrios salmoneros », c’est-à dire d’immenses extensions de mer. C’est ce qu’on a appelé la « privatisation de la mer », signée sous le mandat de Michelle Bachelet (présidente sociale-démocrate de 2006 à 2010), qui a reformé la Loi de pêche et aquiculture le 10 mars 2010.(...)
La privatisation de l’eau s’est faite plus tôt(...)
La contamination et la déviation des cours d’eau est une constante dans l’exploitation minière. Dans le nord et le centre du pays, il est possible d’observer les effets de cette industrie : de nombreuses villes et villages ne peuvent plus utiliser les affluents pour leurs activités agricoles, ce qui a généré chômage, pauvreté et migration. La population est atteinte de maladies provoquées par l’ingestion et l’inhalation de métaux lourds et autres déchets toxiques.(...)
On se rend bien compte que le développement du pays ne concerne pas sa population, elle peut mourir de cancer à cause de la consommation d’eau polluée, ainsi que par l’inhalation des déchets toxiques qui trainent dans l’air.(...)
Des maladies respiratoires, digestives, de la vision, du système nerveux, des cancers de la peau, des inflammations... On en a entendu parler par les communautés qui vivent à proximité des centrales thermoélectriques à charbon.(...)
Toutes ces raisons ont poussé les gens à se mobiliser contre les nouveaux projets, dans des affrontements violents avec la police, qui a perquisitionné des maisons, arrivant à casser les portes et prendre des détenus de l’intérieur.(...)
non, on ne veut plus offrir les biens communs de tous les Chiliens aux riches du monde, ni que la population assume les coûts de ce qu’ils appellent « le progrès ». Il faut investir dans des énergies renouvelables, mais il faut surtout changer ce modèle dévastateur.
(...) Wikio