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Pas républicaine, l’école à la maison ?
Article mis en ligne le 29 novembre 2020

Jusqu’au 2 octobre 2020, nous, parents instructeurs, éduquions paisiblement nos enfants en dehors de l’école. Nous étions confiants qu’après une loi en 1998, une loi en 2007, des décrets en 2009, 2015, 2017 puis, une loi en 2019, ce cadre législatif nous laisserait enfin tranquilles, libres de jouir de la tradition républicaine réaffirmée par Jules Ferry dès 1882.

En effet, depuis plus de 138 ans, à côté d’écoles publiques laïques, d’écoles confessionnelles, les parents ont la liberté constitutionnelle1 d’instruire leurs enfants en famille.

Jusqu’au 2 octobre 2020, nous, parents instructeurs, éduquions paisiblement nos enfants en dehors de l’école. Nous étions confiants qu’après une loi en 1998, une loi en 2007, des décrets en 2009, 2015, 2017 puis, une loi en 2019, ce cadre législatif nous laisserait enfin tranquilles, libres de jouir de la tradition républicaine réaffirmée par Jules Ferry dès 1882.

En effet, depuis plus de 138 ans, à côté d’écoles publiques laïques, d’écoles confessionnelles, les parents ont la liberté constitutionnelle1 d’instruire leurs enfants en famille. (...)

Cette “liberté” est une bouée de sauvetage pour un grand nombre d’enfants. En effet, nombre d’entre eux sont harcelés, phobiques, dyslexiques, précoces, ou en attente de reconnaissance de handicap auprès de la MDPH*. Tous ces enfants sont mal accueillis dans une école dite “inclusive” qui n’a pas les moyens de ses ambitions. Les enfants instruits en famille peuvent apprendre et se reconstruire sans l’échec, les moqueries ou les violences de certaines écoles.

Cette liberté d’instruction offre aussi la possibilité de choix réfléchis de la part des familles (...)

la dernière enquête de la DGESCO4 sur l’instruction en famille mentionne que l’instruction en famille, loin d’être spécifique aux petites filles ou aux pratiques religieuses, concerne 50,7% de garçons et 49,3% de filles, et seulement 1,4% de raisons religieuses, toutes confessions confondues, quand d’autres documents5,6 mentionnent que les cas de radicalisation dans ce cadre sont exceptionnels. En revanche, il apparaît que la raison principale de l’instruction dans la famille est bien sûr… l’inadaptation ou la souffrance scolaire. (...)

nos enfants sont parmi les étudiants les plus contrôlés de France, au sein même de nos foyers, et les seuls élèves dont la capacité de l’instructeur à atteindre les objectifs et valeurs éducatifs établis par l’Etat est vérifiée chaque année.

Les petits fantômes, s’ils existent, ne seront en aucun cas touchés par cette mesure qui impacte précisément une pratique déclarée. Le gouvernement se trompe de cible. (...)

À la question posée par nos associations : "Avez-vous des chiffres, des études qui prouvent le lien entre l’instruction en famille et la radicalisation, qui justifient cette soudaine annonce par le Président ?", nos interlocuteurs ont été bien incapables de répondre. Monsieur Senghor finit par reconnaître : "Oui le chef de l’état a fait un choix (...), je ne suis pas dans la tête du président, je sais en tous cas que les éléments nouveaux de la rentrée scolaire 2020 ont joué nécessairement, je présume, dans la décision qu’il a pu prendre.". Et la direction générale de l’enseignement scolaire d’ajouter : "cette mesure n’a aucun rapport avec la lutte contre le terrorisme" !

Et si cette interdiction avait, au-delà du coup médiatique, une cause moins religieuse qu’administrative ? En effet, les effectifs de l’école à la maison ont progressé, partout dans le monde avec la crise sanitaire. La décision présidentielle viendrait donc trouver une solution simple au nécessaire besoin d’effectifs pour contrôler un nombre d’enfants accru, comme partout dans le monde9,10, en période de pandémie...

Dès lors, nous pouvons présumer que le discours répété par le ministre de l’intérieur pour défendre cette mesure liberticide, a un fondement discutable. En s’appuyant sur un amalgame injustifié, des images fausses, et une réalité sanitaire conjoncturelle, la loi s’apprête à faire disparaître un droit constitutionnel essentiel à toutes les familles et tous les enfants malgré leurs besoins affectifs ou pédagogiques à court ou long terme.

Si le gouvernement souhaite réellement que plus d’enfants puissent et veuillent aimer une École de la République qui ne "serait jamais une punition", il est temps pour lui d’agir à la source. Nous pouvons même donner quelques pistes : donner davantage de moyens dans les quartiers et les écoles publiques pour y réduire la violence, créer un véritable choix d’innovation pédagogique pour les familles afin que tous les enfants différents y soient, réellement, intégrés, créer des politiques incitatives… Pour la période de pandémie actuelle, il s’agirait, notamment, de choisir un protocole sanitaire plus à même de limiter les craintes des parents et respectueux des enfants.

Nous proposons qu’une des dernières grandes lois du quinquennat soit aussi celle de la réflexion pédagogique innovante. Progressons de concert pour définir une nouvelle façon d’accompagner ces familles férues de pédagogie ainsi leurs enfants, dans leur choix éducatif.

Cette grande avancée prendrait tout son sens pour un gouvernement vantant les mérites d’une France tournée vers l’avenir, où méthodes innovantes de l’éducation et défense des libertés individuelles chères à la république progresseraient de concert. Parce qu’on n’inculque pas l’amour des valeurs de la République, à 50 000 enfants et leurs parents en commençant par les priver d’une partie de leurs libertés fondamentales.