
Le gouvernement syrien et, dans une moindre mesure, les groupes armés d’opposition ont permis en toute impunité d’attaquer les civils. « Partir ou mourir », voici le seul choix qui leur a été laissé. Enquête.
Des populations civiles entières assiégées et soumises à des bombardements intensifs n’ont d’autre choix que de partir ou mourir au titre des accords de « réconciliation » conclus entre le gouvernement syrien et les groupes armés d’opposition.
Nous avons passé en revue quatre de ces accords conclus entre août 2016 et mars 2017 qui ont abouti au déplacement de milliers d’habitants de six zones assiégées : Daraya, l’est de la ville d’Alep, al Waer, Madaya, Kefraya et Foua. (...)
LA STRATÉGIE DU GOUVERNEMENT : DÉTRUIRE, AFFAMER, DÉPLACER (...)
Depuis le début du conflit armé, le gouvernement impose des sièges à des zones civiles à forte densité de population, se servant de la faim comme d’une arme de guerre et bloquant ou restreignant arbitrairement l’accès aux produits de première nécessité – nourriture, eau, médicaments, électricité, combustible et communications notamment.
Il empêche également les organisations humanitaires d’entrer dans les zones assiégées.
Cette attaque systématique et de grande ampleur contre les civils s’apparente à des crimes contre l’humanité.
Les victimes de ces terribles violations n’ont eu d’autre choix que de quitter leur foyer en très grand nombre. En conséquence, des milliers de familles vivent aujourd’hui dans des camps de fortune, où elles ont un accès limité à l’aide humanitaire et aux produits de première nécessité, et où les possibilités de gagner sa vie sont rares. (...)
Aux souffrances due à la stratégie d’assiègement s’ajoutent les attaques délibérées contre des civils et des biens civils, qui causent une détresse inimaginable.
Pour les habitants de l’est d’Alep, les pires souffrances ont découlé de la campagne brutale et calculée d’attaques aériennes illégales menées par les forces syriennes et russes.
Des civils, des habitations et des hôpitaux ont été délibérément pris pour cibles et des quartiers entiers ont subi des bombardements et des frappes aériennes aveugles, y compris à l’aide de bombes à sous-munitions prohibées par le droit international, de « bombes barils » et d’armes incendiaires. (...)
Les groupes armés d’opposition ont aussi tué et blessé des centaines de civils, lorsqu’ils ont bombardé sans discernement les villes assiégées de Kefraya et Foua, en faisant usage d’armes explosives à large champ d’action. Ces attaques ont violé le droit international humanitaire et, dans de nombreux cas, ont constitué des crimes de guerre.
DES SOLUTIONS EXISTENT, IL EST TEMPS DE LES METTRE EN ŒUVRE (...)
Tandis que la communauté internationale met l’accent sur les efforts de reconstruction en Syrie, il est temps pour ceux qui jouissent d’une certaine influence, en particulier la Russie et la Chine, de veiller à ce que l’aide financière destinée aux régions affectées par les déplacements forcés prenne en compte le droit des victimes à la restitution de leur logement, de leurs terres et de leurs biens, ainsi que leur droit au retour volontaire dans la sécurité et la dignité.
Tous les États doivent en outre coopérer pour que de tels crimes ne restent pas impunis. Le moyen le plus simple est d’apporter leur soutien et des ressources au Mécanisme international, impartial et indépendant récemment mis sur pied par l’ONU pour faciliter les enquêtes sur ces actes et les poursuites contre les responsables présumés.